Février, le mois de la Saint-Valentin. Les célibataires changent leur photo sur les applis de rencontre et espèrent que le petit verre de champagne gratuit du resto leur donnera le courage de se mettre aussi nu que Cupidon devant la conquête. Pour les couples, c’est la soirée où on met nos différends de côté en se mettant énormément de pression, ce qui crée encore plus de conflits à gérer à la prochaine Saint-Valentin.
Cette fête est vraiment vulnérabilisante. Peu importe notre situation relationnelle, on ouvre notre jeu à quelqu’un d’autre, on tente de se montrer sous notre meilleur jour.
Certains prennent le pari d’aller manger en tête-à-tête avec quelqu’un pour apprendre à mieux le connaître. À mes yeux, ces gens sont complètement dingues. À l’époque où je buvais, la Saint-Valentin en mode célibataire au restaurant était l’indétrônable combinaison pour que je me ridiculise en un temps record.
Pour moi, l’alcool agissait comme lubrifiant social, et disons que je me lubrifiais fort. Disons que la conversation finissait plus souvent par : « je t’appelle un taxi », que : « viens-tu chez nous pour un dernier verre ? ».
J’ai toujours su, même avant de devenir abstinente, que ma consommation d’alcool était un enjeu quand je rencontrais quelqu’un. C’était comme un défaut que je voulais cacher. Je pouvais me contrôler, mais ces soirées étaient plutôt rares. C’est comme si, lors d’événements comme une date, mon problème de boisson devenait un problème de limites. J’avais de la difficulté à imposer mes limites envers moi-même et les autres. Je m’efforçais de boire au même rythme que la personne devant moi. Je mettais le cours de la soirée entre ses mains, sans qu’elle ait demandé quoi que ce soit. Je pouvais aussi être insistante pour que la personne s’adapte à mon alcoolémie si je trouvais qu’elle ne buvait pas assez à mon goût.
Au fil de mes années d’abstinence, j’ai développé quelques astuces pour avoir du plaisir à rencontrer des gens sans avoir besoin d’alcool. Si vous n’avez pas de problème de boisson, mais que vous participez au défi 28 jours sans alcool de la Fondation Jean Lapointe, par exemple, ou que vous voulez simplement diminuer vos consommations en cette soirée du 14 février, je vous invite à les essayer.
Tout d’abord, n’hésitez pas à parler de votre consommation. Ça semble lourd, mais personne n’aime le small talk de toute façon.
Ce sera peut-être une date plus verbeuse que ce que vous auriez imaginé, mais il y a de fortes chances que vous finissiez par savoir un peu plus comment aligner vos skis. Que vous buviez ou non, l’alcool est partout. Ça fait partie du quotidien de tous. Une fois les habitudes de chacun nommées, on peut faire des choix plus éclairés au cours de notre soirée et pour le reste de la relation, quelle qu’elle soit.
Personne ne changera personne. Si vous buvez et que vous avez besoin d’être avec quelqu’un qui boit, ne forcez pas quelqu’un à boire. Et si vous êtes abstinent à l’alcool et que vous avez absolument besoin d’être avec quelqu’un qui l’est aussi, respectez-vous dans cette décision. La consommation est un choix personnel et vous ne réussirez pas à changer la personne devant vous, ni ce soir, ni jamais.
On est chanceux, aujourd’hui. On a droit à un aperçu de la personne grâce aux applications de rencontre.
Dans votre bio, à la place d’écrire que vous aimez le crochet ou pêcher des achigans de deux pieds de long, inscrivez donc avec quel type de buveur vous êtes à l’aise. Après tout, on le fait avec la cigarette et le cannabis, on pourrait se sauver du temps collectivement et l’inscrire dans nos bios Tinder.
Ma prochaine astuce est de dater en gang. Bon, vite comme ça, ça sonne très : « nous sommes dans une commune et pratiquons l’amour libre », mais ce que je recommande, c’est de sortir entre amis pour la Saint-Valentin. Vous serez ainsi en sécurité toute la soirée, entouré de personnes que vous aimez déjà, et il y a de fortes chances qu’un autre groupe d’amis ait eu la même idée que vous.
Mêlez-vous à eux. Minces sont les chances que tout le monde se trouve un match dans les deux groupes, mais sait-on jamais, je suis de nature optimiste. D’après moi, il y en a quelques-uns qui pourraient être surpris.
Et, de grâce, allez à un endroit qui vous représente. N’allez pas dans un bar à oxygène si vous haïssez l’oxygène. Allez plutôt à un endroit qui correspond à l’humeur générale de votre groupe, amusez-vous, présentez-vous comme vous êtes. C’est peut-être la fin du monde, on n’a plus le temps de se cacher derrière des Saint-Valentins avec des repas 7 services. Cette année, ça a simplement besoin d’être une soirée pour faire de belles rencontres, où on approfondit nos discussions et où on arrête d’être gênés de se respecter.