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La rédemption de Mac Miller

Comment le rappeur a pu survivre à ses dures années?

Par
Hugo Bastien
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J’ai découvert Mac Miller lors de mes années du secondaire. À l’époque le rappeur de Pittsburgh avait à peine 18 ans et venait tout juste de sortir sa mixtape K.I.D.S.. en plus de trois autres mixtapes à son actif, la première datant de ses 15 ans.

Les thèmes explorés par le jeune rappeur variaient alors entre fumer du weed et fourrer des filles, en passant par célébrer l’été avec ses amis. Bref, du beau rap naïf et léger avec des productions intéressantes, mais surtout des flows géniaux. Il était alors considéré comme un véritable prodige, surtout pour son jeune âge.

Malheureusement, après K.I.D.S. Mac Miller s’est tranquillement enlisé dans une période étrange de sa carrière musicale. Surfant sur sa popularité grandissante, il s’est mis à réaliser de plus en plus de musique générique. De bonne foi, je continuais malgré tout à le suivre, en étant malheureusement forcé d’admettre que sa musique devenait redondante. Oui bien sûr, on pouvait toujours retrouver 2-3 tracks par album qui valaient l’écoute, mais over all, ses trucs restaient plutôt plates…

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De Blue Slide Park (2011) à Faces (2014), le rappeur a accumulé les projets inintéressants. Déçu, je regardais sa carrière mourir à petit feu en me disant que c’était un énième rappeur découvert trop tôt, dont tout le jus avait déjà été pressé. Il était maintenant condamné à répéter sa recette jusqu’à ce que mort, ou ennui s’en suivent.

Histoire de nous protéger contre d’autres futures déceptions, mes amis et moi avions inconsciemment oublié Mac Miller au travers des années. Un peu comme l’Anneau possédé par Golum, il avait été laissé dans le fond d’une grotte, abandonné. Mais ceux qui ont vu le Seigneur des Anneaux savent que le Précieux ne reste jamais caché longtemps : « Une ombre à l’est engendra une rumeur, murmure d’une peur sans nom. L’anneau de pouvoir comprit que son heure était venue. »

C’est comme ça qu’en 2015, lors d’un chilling autour d’une table à pique-nique, mon ami Mathieu sortit une phrase qu’on n’avait plus entendue depuis longtemps : « Yo, avez-vous entendu le nouveau Mac Miller? C’est fucking bon sérieux ». G0:0D AM venait tout juste de sortir et on découvrait avec stupéfaction que Mac Miller était enfin redevenu bon. Probablement aidé par les années de maturité, d’exploration et d’échecs, il avait réalisé un album incroyable comme dans le temps. Une parfaite balance entre beats smooths, introspectifs, et gros bangers sales. En un seul projet, il était étonnamment redevenu pertinent.

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GO:OD AM a marqué pour Mac Miller un changement dans sa musique. Plus mature, plus près de ses émotions, en plus de productions instrumentales vraiment solides, l’artiste était finalement passé de rap niais à rap adulte.

C’est clairement avec The Divine Feminine, son avant-dernier album sorti en 2016, que Mac Miller s’est imposé comme étant un des rappeurs les plus pertinents du moment. Véritable chef-d’oeuvre, pour moi The Divine Feminine est un de meilleurs albums sur l’amour que j’ai écouté. Une réflexion tellement belle sur l’amour, la vie de couple, mais aussi sur la sexualité et la dépendance affective. C’est de la musique qui rend amoureux, tout en brisant le coeur. Au sommet de son art, le Mac Miller qui a produit cet album est lucide, intelligent, sensible et vulnérable.

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Depuis cette déclaration d’amour, les choses se sont tranquillement effondrées pour l’artiste : toxicomanie, conduite en état d’ébriété, mais surtout une rupture avec Ariana Grande (la muse derrière The Divine Feminine). La chanteuse a expliqué qu’elle avait quitté le rappeur à cause de la nature toxique de leur relation, en spécifiant qu’elle en avait assez de jouer à la mère avec lui.

Vendredi passé, le rappeur dévoilait son premier album depuis la succession de ces tristes événements. Un album intime dans lequel il revient sur sa dernière année. Le titre du projet « Swimming » est habilement expliqué dans cette ligne tirée de la première chanson « I was drowning, now I’m swimming ».

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Cette zone grise entre la noyade et la nage est le thème principal de l’album : au cours des chansons, le rappeur se fait repentant et expose toutes ses faiblesses, attitude rare dans le hip-hop. Et malgré tous ces égarements, il affirme qu’il y a une lumière au bout du tunnel.

En fait, Swimming n’est pas qu’un album sur une peine d’amour, mais plutôt une réflexion sur la dépendance. Souffrant moi-même de comportement de dépendance, la complainte de Mac Miller m’a personnellement ébranlé. Le clip de Self Care démontre tout à fait la situation d’un dépendant : enfermé dans un cercueil, Mac Miller préfère s’allumer une cigarette, avant d’essayer de s’évader.

Étouffant dans sa tombe, il réussit tout de même à s’échapper et ressusciter

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Que voulez-vous, Mac Miller a ce don de revenir d’entre les morts. Il l’a fait en 2015, pourquoi pas maintenant?