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La guerre froide médiatique

On est loin de voir Éric Salvail animer le Gala Excellence La Presse/Radio-Canada.

Par
Judith Lussier
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Beaucoup se réjouissaient hier de la parution d’un communiqué de presse évoquant certains rapprochements entre Quebecor et Radio-Canada. En fait, il ne s’agit pas d’une demande d’amitié ou d’un traité de paix, mais simplement d’une entente commerciale qui était devenue incontournable tant pour l’empire médiatique de PKP que pour le diffuseur public. Mais surtout pour le diffuseur public.

Depuis quelque temps, la société Radio-Canada avait cessé d’annoncer dans les journaux de Quebecor. Cette perte de revenus embêtait Quebecor, évidemment, mais ce n’était pas le coup du siècle pour une société d’État non plus. L’incongruité de ce boycott avait d’ailleurs été dénoncée par Sophie Durocher dans un texte où la chroniqueuse du Journal de Montréal cachait mal le peu d’estime qu’elle semblait entretenir à l’égard de ses propres lecteurs. N’empêche qu’elle avait un point : il était gênant pour une société d’État, qui doit en principe s’adresser à tous les Québécois, de dire que les lecteurs du Journal de Montréal (le journal le plus lu année après année), ne faisaient pas partie de son «public cible». Pour sa part, Quebecor avait dans sa manche une arme dont j’ignorais l’existence : la possibilité de ne pas diffuser via son réseau Vidéotron les chaînes spécialisées de Radio-Canada : RDI et ARTV.

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Finalement, c’est un peu le début d’une guerre froide entre nos deux grands médias. Les deux parties se sont entendues pour ne pas s’envoyer de bombes atomiques, mais pour le reste, ça ne changera pas grand-chose. Quebecor ne cessera pas de dénoncer le gaspillage de fonds publics à Radio-Canada, et Radio-Canada ne cessera pas de s’attaquer à la convergence de Quebecor. D’ailleurs, la société d’État n’a toujours pas retiré ce communiqué tel que l’enjoint de faire Quebecor par coup de mises en demeure. Patrice L’Écuyer n’animera pas La Poule aux œufs d’or et Céline Galipeau n’annoncera pas en grande pompe le nom du gagnant de Star Académie. Richard Martineau et Patrick Lagacé ne cesseront pas de se pogner quand ils sont invités à une émission d’apparence inoffensive.

Toutefois, on dit que la Guerre froide aurait eu des répercutions positives sur la culture. Pour démontrer leur supériorité, les deux camps se défiaient à coup d’œuvres magistrales, de financement de magazines culturels et d’expositions controversées visant de part et d’autres à montrer que sa culture était la meilleure. C’est ainsi que Jackson Pollock aurait été instrumentalisé pour montrer la grande ouverture de la société américaine à l’art contemporain. Louis Armstrong aurait pour sa part représenté le progrès racial.

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Dans la guerre froide opposant Quebecor à Radio-Canada, je ne vois rien de bon. Ce n’est pas comme si chacun nous jetait à terre avec des initiatives des plus originales. Il n’y a rien d’enrichissant du point de vue du contenu à ce que les vedettes de TVA ne soient pas invitées aux émissions de Radio-Canada et vice versa. À ce que des éditoriaux et reportages forcément dépourvus d’objectivité dénoncent les torts des adversaires de part et d’autre. À ce que les chroniqueurs du Journal soient exclus des panels de Radio-Canada.

Moi, j’ai une faveur à demander aux médias : pouvez-vous faire la paix svp? Pour de vrai, nous, les spectateurs, on s’en fout de votre guerre. On aimerait bien mieux voir Marie-Mai aux Enfants de la télé, Sophie Durocher à C’est bien meilleur le matin, Claude Poirier à Soins intensifs, Sophie Thibault à En direct de l’univers, et Patrick Lagacé à Deux filles le matin. Merci.


Suivez @JudithLussier sur Twitter.

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