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La grande séduction du Cinéma L’Amour

Eux aussi, ils ont besoin d'un coup de main!

Par
Hugo Meunier
Hugo Meunier
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Le Cinéma L’Amour mène présentement une campagne de sociofinancement en collaboration avec la plateforme La Ruche, dont l’objectif est de moderniser l’équipement désuet et — ultimement — redorer l’image du légendaire cinoche érotique de la main.

Pas une mince tâche à l’heure où la mythique salle centenaire, qui présentait à l’origine des films en yiddish et des pièces de vaudeville, fait surtout parler d’elle pour son côté trash.

À commencer par ce procès en cours pour homicide involontaire à cause d’une histoire de jalousie qui a dérapé. Ensuite, avec cette fascinante incursion lubrique de mon camarade Louis-Philippe Messier, qui calculait avoir vu en une seule journée des dizaines d’hommes mûrs se soulager plus ou moins sanitairement autour de quelques rares femmes durant la projection de Fucking Flexible 3 et autres.

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Changer d’image

«C’est un gros défi et la campagne vise à montrer la volonté de se réapproprier les lieux différemment», explique la directrice générale de l’organisme Cinémaniak, Kalem Melançon-Picher. Elle est derrière cette campagne avec la famille Koltai, à qui appartient le Cinéma L’Amour depuis 40 ans.

Tout ce beau monde s’est entendu sur les contreparties offertes aux contributeurs.rices de la campagne: du porte-clés emblématique à 10$ jusqu’à la location de la salle pour une séance nocturne privée (1000$).

Parmi les autres lots plus originaux, il y a une séance photo sur place avec une photographe professionnelle (450$), une visite complète des coulisses (ho-ho) du théâtre bâti en 1914 (250$), des posters vintage de vieux films à l’affiche (120$) ou des photogrammes pour les collectionneurs (30$).

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L’argent amassé (l’objectif est de 10 000$) servira à remplacer les vieux DVD poussiéreux pour projeter les films par du matériel du 21e siècle.

«On veut courtiser les jeunes et véhiculer une image positive, on pense aussi à des choses qui n’ont rien à voir avec la porno», souligne Kalem.

«Ce qui se passe en bas dans la salle est là pour rester. It is what it is.»

À court terme, elle cite en exemple la diffusion de films pornos plus éthiques, voire féministes, mais aussi des festivals de films comme Filministes ou Tënk. «On a aussi des discussions pour une lecture publique des planches de la bande dessinée Aliss en présence de Patrick Senécal et d’une projection de la websérie La Reine rouge», ajoute Kalem.

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De beaux projets, destinés à un public plus jeune, sans toutefois dénaturer la mission première du cinéma: présenter des films de cul.

Passer le flambeau

La cohabitation est d’ailleurs le mot à retenir, puisque les ébats à plusieurs dans la grande salle en plein jour sont là pour rester, assure Devyn Koltai, qui hérite graduellement des activités liées au cinéma pour une troisième génération, après son père Steve et ses grands-parents qui ont acheté la place en 1981. «L’endroit s’appelait alors le Pussycats et ils ont remplacé le nom pour le Cinéma L’Amour», explique le jeune homme de 24 ans, très motivé à l’idée de trouver des moyens d’adapter le cinoche au goût du jour.

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«Ce qui se passe en bas dans la salle est là pour rester. It is what it is. Mais de plus en plus de jeunes couples viennent dans notre zone VIP à l’étage, en plus de nos soirées gaies (mardi) et trans (mercredi)», explique Devyn, qui adore sa job. «Souvent je traîne dehors devant le cinéma juste pour vendre de la merch ou donner des tours guidés aux plus jeunes», raconte-t-il.

Devyn se montre également excité à l’idée d’exploiter sa salle pour autre chose que du XXX. Il s’intéresse notamment à l’événementiel et évoque des tournages de films d’époque. «J’aimerais aussi diffuser parfois des pornos vintage. On a encore tous les vieux films ici», souligne le jeune proprio, qui écoule aussi des affiches rétro via un compte Instagram.

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Cette volonté de faire peau neuve survient près d’un an après une offensive publicitaire menée avec l’agence Publicis Montréal, qui avait orchestré gratuitement une campagne d’affichage sauvage destinée à faire redécouvrir cette institution montréalaise.

Seul l’avenir nous dira si ces initiatives contribueront à attirer de nouveaux adeptes dans les bancs rouges un peu effilochés de la vieille bâtisse.

Parce qu’au moment d’envoyer ces lignes, les films à l’affiche My first gang bang et Glamour girls 4 constituent toujours les moyens les plus sûrs d’attirer la clientèle.