.jpg)
Le quartier où je pousse est garni de toutes sortes de gens qui savent porter des chapeaux à larges rebords, dont plusieurs artistes. Puis il y a moi. La graine.
On commence en force.
C’est sans doute le peu d’heures de sommeil qui m’injectent les yeux de sang et qui distorsionnent l’heureuse perception que j’ai de moi-même en de très fleuries métaphores (et j’ai, il va sans dire, le bégonia fort fertile à’ souère).
De ce temps-là, je me regarde dans le miroir et j’ai envie de rire. La chevelure à l’ouest (non pas par esthétisme mais plus par cette broue teintée de désespoir, armes déposées aux pieds de Vercingétorix) et l’appétit à moins quart, je travaille comme une génisse et cultive les moments d’absence.
De grande absence.
Et en général, le manque de sommeil met en exergue ma formidable aptitude à déposer avec grâce chacun de mes pieds dans des plats (DES INTELLI-FRAIS) différents. Ma jupe s’arrache dans l’escalator. Je sacre le camp dans le métro en tenant des pastèques et je pleure en maudissant la vie de ne pas travailler à l’usine à biscuits soda. Ça, cousu au fait que je ne cesse de propulser par maladresse mon penny loafer de suédine ross au prochain coin de rue en essayant de me déplacer vite à cet autre meeting sans perdre mes godasses qui ont pris de l’expansion pendant l’été.
Trois fois, cette semaine.
Trois petits moments d’éternité à marcher un pied à l’air pour aller récupérer mon dû (de suédine ross).
Et chaque fois, on dirait que ça arrive devant Jean Leloup.
Ou cette chic fille qui tint jadis un troisième rôle dans La Galère.
Devant Jim Corcoran. Jim Corcoran et sa famille élargie.
Pourquoi je raconte ça? D’une part, parce que je suis très, très fatiguée.
Et d’autre part, parce que ma propension à mourir du dedans quand je croise les Joselitos de ce monde, qu’ils aient pris un train, gagné un condo en copulant au Portugal ou vendu quatre cédés et quart dans une foire de Warwick, est exponentielle. Chaque fois, c’est pire.
Mon cœur cesse. Je détourne le regard. Et je deviens immanquablement, viscéralement graine.
La graine du quartier. THE GRAINE OF THE YEAR.
Je ne sais plus où me mettre. Où onduler pour disparaître. Au diable la demi-mesure et le requeint-ben. Je peux très bien expulser un puissant BONJOUR inattendu (et qui peak) à la première starlette qui passe et qui, bien évidemment, ne m’a jamais vue de sa sainte-soda de vie, contrairement à moi qui l’ai disséquée pendant dix-huit lundis soir au poste 2.
Un BONJOUR suivi de rien.
Mais je peux aussi – ce que je fais généralement – générer l’expression de visage la plus bête du palmarès des faciès glacials avec toute la finesse de mon répertoire méthodiste, pour faire bien sûr que ladite star qui croise mon chemin comprenne bien que je ne l’ai pas reconnue. I do not know you, Olivier Loubry.
Tout à coup j’aurais l’air d’une groupie, hein, Fatal Attraction de pupille à pupille, le pipi naissant et le lapin dans le chaudron à HIGH.
Beaucoup, beaucoup de trouble pour si peu de choses, je vous le concède.
Je n’ai pourtant jamais été groupie de quiconque (cette proposition excluant unilatéralement Serge Postigo). Je préfère les pas-connus; ils sont plus confortables. Moins confrontants de la chevelure et de la race, je présume.
Mais la pire chose, la pire (à part la guerre et la phtisie galopante), c’est de me promener avec celui ou celle qui a le radar à on. Oh! qu’il/elle les voit de loin, les celebrities. Une feuille au vent, les membres lui partent dans les airs et il/elle se met évidemment à chuchoter DE TOUT SON SOÛL LE NOM DE BAPTISTÈRE DE LA VEDETTE EN QUESTION EN LUI POINTANT LES PEPPERONIS, si bien que James Hyndman finit toujours par se retourner, oreilles en vibrato, pour poser son regard comédien sur les deux tartes en posture du corbeau, bassin trempant dans leurs fluides naissants.
Se faire ainsi prendre en flagrant délit de tendresse, je pense pas que pire se peut.
Grand bien s’en fait, mais pire ne se peut pas. Ça, c’est certain.
Ça se guérit, cette peur panique de croiser idole?
Combien de potlucks ai-je ratés dès que l’hôte m’a fébrilement prévenue que ce chanteur dont le verbe m’a fait un enfant y apporterait son petit stew? Combien de formidables occasions de dire à ces personnes que j’admire tant à quel point elles m’aident à vivre ai-je volontairement ratées, par peur de devenir une fresque vivante de DON’T et d’odieux OH NO SHE DIDN’T ?
Moi, je préfère faire une face de marde – et the ultimate one – à Michel Rivard, puis détourner illico mon regard assassin vers ses deux petits chiens soucisse pour leur dire BONJOUR.
C’est arrivé ce matin.
La bise.
PS TENDRESSE :: échappée belle, alleluia. Et en ptit péché, à part ça.