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La fois où la Joconde était en cavale

C’est l’histoire d’un périple qui a failli mal finir…

Par
Malia Kounkou
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URBANIA et l’Opéra de Montréal s’unissent pour vous raconter une histoire peu connue, quoique fascinante : celle de la presque disparition de La Joconde.

Eh non, Mona Lisa ne se l’est pas toujours coulée douce au Louvre ou à jouer les invités dans le dernier clip de Beyoncé et Jay-Z : il fut un temps où l’œuvre d’art la plus connue au monde était en cavale. Oui, vous avez bien lu : en cavale! Et avant que vous imaginiez la Joconde coiffée d’une cagoule et en train de s’enfuir, une liasse de billets volés sous le bras, on vous explique un peu le contexte.

LE DÉBUT DES ENNUIS

Tout commence à la genèse de la Seconde Guerre mondiale, en 1939. Un petit gars colérique mais doué en rasage nommé Adolf Hitler a déjà repeint l’Allemagne aux couleurs nazies. Depuis, il zieute les pays frontaliers qu’il pourrait envahir en se frottant goulûment les mains. Et parmi ces pays il y a la France, terre du peintre Claude Monet et des trains éternellement en retard.

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Depuis son bureau de direction des Musées nationaux – que j’imagine donnant sur la tour Eiffel, juste pour le côté parisien un peu Pinterest –, Jacques Jaujard flaire l’entourloupe. Il la flaire si fort que 10 jours avant l’éclatement officiel de la guerre, il écrit de son plus beau stylo à plume « TRAVAUX DE MAINTENANCE » sur une feuille qu’il affiche en évidence aux portes du Louvre. Puis il ferme ces portes à triple tour.

UN VOYAGE SIX ÉTOILES

Immédiatement après, son assistante Rose Valland, un groupe d’employés et lui-même emballent sans s’arrêter pendant trois jours 3 690 tableaux et une poignée d’autres œuvres d’art (dessins, sculptures, tapisseries, meubles, bijoux), plus rapidement encore que des cadeaux de Noël achetés à quelques heures du réveillon. Au total, ce ne sera pas un, ni deux, ni même dix, mais bien 37 convois de camions et de taxis qui seront dépêchés le 28 août 1939 dès 6 h du matin pour dispatcher secrètement ces joyaux artistiques dans divers châteaux de France.

Seul James Bond a frôlé la mort plus souvent que Mona Lisa.

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Notre fameuse Mona Lisa fait bien évidemment partie du lot et bénéficie, lors de son trajet, d’un véritable traitement VIP. Non seulement elle est embaumée de papier beige et dissimulée dans une caisse en bois solide, mais cette caisse est dotée d’une double paroi, à laquelle sont fixées des suspensions élastiques de brancard d’ambulance pour qu’elle ne subisse aucun choc.

Et ce n’est pas tout : pour s’assurer qu’elle arrive à destination en un seul morceau, un camion de secours progresse juste derrière son véhicule. En cas d’arrestation aléatoire, aucun moyen de deviner qu’une célébrité occupe le siège arrière dudit véhicule : la cargaison n’a pour marques distinctives que trois pastilles rouges et l’inscription « MN LP 0 », qui signifie « Musées nationaux Louvre peinture numéro zéro ».

UN PÉRIPLE MOUVEMENTÉ

Et c’est ainsi que commence la cavale de La Joconde. Pendant six années, le chef-d’œuvre de Léonard de Vinci sera déplacé d’un lieu à un autre, au fil de la progression allemande sur le territoire français : château de Chambord, puis Louvigny, abbaye de Loc-Dieu, musée de Montauban, et hop, retour au château de Chambord… Plus globe-trotter qu’une Madonna en tournée, La Joconde parcourt en tout pas moins de 2 000 km.

Ces trajets peuvent être casse-cou, comme le prouvent les déplacements d’autres grandes œuvres. En traversant la ville de Versailles, par exemple, la boîte de cinq mètres de haut transportant Le Radeau de la Méduse s’emmêle au fil du tramway et manque prendre feu. Et il y a l’histoire du chauffeur chargé de transporter les tableaux de Watteau qui s’égare en chemin à cause du brouillard (heureusement qu’on a inventé les GPS depuis…). Sans oublier les bombardements à quelques mètres du château Chambord, les inondations dans le musée Montauban et les incendies d’origine allemande. Seul James Bond a frôlé la mort plus souvent que Mona Lisa.

Plus globe-trotter qu’une Madonna en tournée, La Joconde parcourt en tout pas moins de 2 000 km.

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Et puis, bien sûr, il y a Hitler… Refusé à l’école des beaux-arts de Vienne, il rôde depuis autour du patrimoine culturel français, avide d’y poser ses petites pattes vengeresses. C’est pourquoi, après avoir ordonné la réouverture des musées parisiens, il envoie le comte allemand Franz von Wolff-Metternich patrouiller au Louvre et faire ses courses pour lui parmi les œuvres exposées. Fort heureusement, le comte aime l’art plus que l’idéologie du IIIe Reich et, soulagé de constater sur place que le musée a été évacué, il aide même Jacques Jaujard à conserver les biens restants loin du radar nazi.

TOUT EST BIEN QUI FINIT BIEN

Ding, ding, ding! Nous sommes en 1944 et la France est enfin libre! Petit à petit, le Louvre retrouve ses joyeux habitants, qui lui reviennent par à-coups depuis leurs divers lieux de cachette. Miraculeusement, tous sont intacts. Le 17 juin 1945, Mona Lisa retrouve enfin sa place tout contre le mur duquel la guerre l’a séparée. Et depuis, le monde entier peut venir admirer son regard de près, ce regard qui ne vous quitte pas, mais qui a tout vu.

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Si vous voulez en savoir plus, rendez-vous à l’Opéra de Montréal pour assister à l’une des quatre représentations inédites de La beauté du monde, dont la musique a été composée par Julien Bilodeau et le livret écrit par le dramaturge Michel Marc Bouchard, et qui relate le sauvetage des œuvres du Louvre pendant la Seconde Guerre mondiale. Ça se passe les 19, 22, 24 et 27 novembre, à la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts.

Et si vous avez entre 18 et 34 ans et que vous y allez le mardi 22 novembre, vous aurez droit non seulement à un tarif spécial de 34 $ grâce au code promo BEAUTE34, mais aussi à un cocktail pré-représentation! Non, non, ne nous remerciez pas, ça nous fait plaisir.