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La fois où j’ai choisi d’être zen avec un client

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Il est convenu que pour être en paix, il faut sublimer le plus possible notre égo qui est le maître de nos insécurités et de nos instincts de survie les plus primaires. Souvent on pense que l’on s’en tire plutôt bien, que peu de choses peuvent nous atteindre, mais dans la vie de tous les jours, il arrive parfois que nos égos soient testés. Comme cette fois-là.

Je travaille depuis très longtemps dans un bar et je crois que j’ai maintenant un assez bon oeil pour identifier les clients indésirables dès qu’ils passent le seuil de la porte. Vendredi soir, un client un peu bizarre s’installe à une table haute près du comptoir des serveurs avec son ami. Après quelques minutes, le client me donne l’impression qu’il me regarde fixement pendant plus longtemps que ce qui est socialement convenable. Comme je suis au service, je le salue en pensant qu’il voulait peut-être commander quelque chose. Il ne veut rien et me dévisage un peu. Ça reste là.

Je raconte l’anecdote à une collègue, qui valide en disant qu’elle avait observé la même chose.

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« Ouais le gars tantôt s’est levé et est allé fixer les deux filles au bar, il ne leur a rien dit et est allé se rasseoir, vraiment creepy… »

Le comptoir des serveurs et situé entre le client bizarre et une banquette où une jolie fille est assise avec des amis. Je comprends alors que le client devait plutôt fixer la fille derrière moi, et non moi. Je ne me sens pas mal car, de toute façon, je l’ai juste salué comme je salue tout le monde au bar, ce n’est pas comme si je lui avais dit :

« Tu veux ma photo, banane ?!? »

Il faut croire qu’il y a encore des gars qui utilisent la technique de dévisager pour courtiser les filles et ce même si, dans toute l’histoire de l’humanité, ça n’a jamais marché.

Aucune fille n’a jamais dit à ses amies :

« Attendez deux secondes, les filles, je vais aller offrir un verre au vieux laid qui me fixe avec son air de maniaque sexuel là-bas. »

Mais bon, c’est assez gênant pour certains d’aborder les jolies filles et je ne suis pas là pour juger de la technique des gens, aussi pauvre soit-elle.

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Avant de quitter le comptoir à nouveau, j’entends le client dire à son ami, sans que je sois censé entendre :

« Ce n’est pas toi que je regarde, criss de cave. »

Je l’ai toutefois entendu.

Je me suis demandé quelques instants quoi faire avec ça. J’avais deux options. D’un côté, faire comme si je n’avais rien entendu et de l’autre, le confronter avec ce qu’il venait de dire. Personne n’a le droit de manquer de respect aux employés dans notre établissement.

Mon égo me disait de le confronter, d’aller chercher le portier et le faire sortir de force devant tout le monde pour l’humilier un maximum. J’aurais alors été le gagnant, le plus fort. J’avoue que cette option semblait très douce pour mon égo même s’il n’y a pas vraiment de trophée remis au gagnant d’une confrontation de la sorte.

Mon côté zen lui, me convainquait de faire le contraire et de laisser passer. Toute énergie négative investie là-dedans serait une perte sèche et que rien de bon ne pouvait ressortir de cette confrontation. Il n’y a pas de mérite à dominer un plus petit que soi.

J’ai donc opté pour le côté zen, décevant à jamais mon égo.

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Un autre facteur qui m’a fait pencher du côté zen, était que son ami avait honte de lui et lui disait de se calmer.

J’ai donc fait comme si de rien n’était. J’allais attendre qu’il commande autre chose pour lui faire savoir qu’on ne le servirait plus, car l’endroit le mettait visiblement en colère.

Je n’ai toutefois pas eu besoin de le faire car, comme c’est souvent le cas, les clients qui ne sont pas à leur place prennent un verre et puis s’en vont. C’est ce qu’ils ont fait, peu après ce faux incident.

Je pense que j’ai pris la bonne décision, malgré le fait que se faire parler de la sorte nous prend toujours un peu de vie. Ça fait toujours un peu mal d’entendre quelque chose de si gratuit et méchant dirigé à son égard. C’est vrai ce que l’on dit, qu’une insulte suffit pour détruire cent ans de compliments. Il faut donc faire attention à ce que l’on dit aux gens.

Toutefois, qui sait quel aurait été l’effet sur ce client de se faire humilier dans un bar en se faisant sortir de force? Peut-être qu’il est dans un grand malheur dans sa vie personnelle. Peut-être que ça aurait été la goutte qui aurait fait déborder son vase.

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Tout le monde a ses propres combats à livrer, il suffit de choisir les bons.

Même si je dédie un texte à cet événement, rassurez-vous, il a quand même été vite oublié.

David Malo

Twitter : @HommeMoyen

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