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La crise des opioïdes n’est pas une blague

Moins de clickbait, plus d'information

Par
Marie Darsigny
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C’est l’histoire d’un gars : il se fait prescrire des opioïdes suite à une opération mineure. Il a mal, alors il en prend de plus en plus. De toute façon, il se dit que ça ne peut pas être très dangereux : c’est fourni par un médecin! Un jour, sa prescription vient à échéance. Le sentiment de manque est insupportable. Il se tourne donc vers le marché noir, n’étant jamais trop certain de ce que les pilules vertes, oranges, blanches ou roses contiennent. Il devient dépendant. Il meurt d’une surdose.

Vous cherchez la blague? Il n’y en a pas. Parce que la consommation d’opioïdes, ce n’est pas une joke. Il n’y a pas de punch line, pas de happy ending, pas d’applaudissements. Vous croyez que je tombe dans la propagande, que je suis une militante pour la fameuse war on drugs? Attendez un peu.

Je tiens à dire que ceci n’est pas une misery porn dans laquelle vous lirez sur un passé de junkie repentante.

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Récemment, une journaliste du Journal de Montréal a cru bon de documenter sa prise de Dilaudid suite à une petite opération, y allant de blagues telles «J’en prends une autre dose, YOLO» et «J’ai hâte que le Dilaudid se trouve au Couche-Tard à côté de la slush pis des bonbons» (paraphrase). Je ne fournirai pas de lien vers l’article, mon but n’est pas d’attaquer personnellement la personne qui l’a écrit, ni de donner encore plus de clics à cette tentative de pseudo journalisme gonzo. Gardez seulement en tête le manque total de sensibilité et d’empathie de la chose. Vous ne suivez pas trop? Ça s’en vient, je vais vous donner des chiffres.

Au passage, je tiens à dire que ceci n’est pas une misery porn dans laquelle vous lirez sur un passé de junkie repentante. Vous vous apprêtez seulement à lire des faits et des chiffres, rapportés par quelqu’un qui, disons, a vu les conséquences de l’abus d’opioïdes de près, et ce, dans plusieurs situations toutes différentes les unes des autres.

Donc, les faits et les chiffres. Le Canada traverse présentement une crise des opioïdes. Alarmiste, la fille? Non, juste honnête et informée. Cherchez sur le web et vous verrez des tonnes de statistiques fournies par des organisations fédérales, donc des sources sérieuses et fiables.

Le Canada traverse présentement une crise des opioïdes.

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Des exemples? Les morts liées aux opioïdes ont triplé dans la dernière année au Canada; en 2016, environ 2500 personnes sont mortes. Si la situation n’est pas encore considérée comme étant critique à Montréal, elle l’est pourtant dans l’ouest du Canada, et ce, depuis plusieurs années. Des experts se sont prononcés : cette vague mortelle est très alarmante et Montréal ne sera probablement pas en reste. On commence à trouver des traces de Fentanyl de contrebande, un opioïde 50 fois plus puissant que la morphine, dans des comprimés vendus dans la rue.

Eh oui : nous, précieux flocons de neige québécois, ne sommes pas épargnés par l’arrivée d’opioïdes cheaps bourrés de substances non contrôlées. Bien sûr, il s’agit d’un sujet complexe aux causes multiples. Oui, il peut s’agir d’un problème qui prend racine dans la surprescription de médicaments à base d’opioïdes (oxycodone, dilaudid, percocet, vicodin, etc.), mais ce n’est pas aussi simple. On peut se demander «pourquoi» pendant longtemps, mais le fait est que le problème existe et qu’au lieu de rire des gens qui abusent des opioïdes, on pourrait peut-être, je sais pas… Les aider?

Eh oui : nous, précieux flocons de neige québécois, ne sommes pas épargnés par l’arrivée d’opioïdes cheaps bourrés de substances non contrôlées.

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Comment? Tout d’abord, en se penchant sur des stratégies de réduction des méfaits, par exemple :

  • Distribution de kits de Naloxone (une antidote qui contrecarre les effets des opioïdes momentanément, le temps d’emmener une personne en état de surdose à l’hôpital) aux premiers répondants, mais aussi aux usagers.
  • Promotion de méthodes de consommation sécuritaires (pour toutes les sortes de drogues).
  • Augmentation du nombre de travailleurs et travailleuses de rue.
  • Sensibilisation à la dépendance aux médicaments de prescription.
  • Distribution de kits pour tester le contenu des drogues de rue (Et encore, c’est un moyen qui n’est pas toujours efficace, puisqu’il semble impossible de détecter toutes les composantes des drogues de contrebande).
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En mai dernier, le projet de services d’injection supervisés (SIS) a reçu l’approbation finale de la part du gouvernement. Montréal aura donc trois sites fixes, ainsi qu’une unité mobile. C’est une initiative modelée sur InSite, un SIS ouvert à Vancouver depuis 2003.

Vous trouvez ça lourd? D’accord, je vais m’arrêter ici.

  • Vous pourrez trouver plus d’information sur les SIS ici.
  • Si vous ou l’un de vos proches désirez obtenir des services en lien avec la dépendance, vous pouvez consulter ce site.
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Je vous laisse sur une blague, puisque vous semblez vouloir rire. C’est l’histoire d’un gars : il devient accro aux opioïdes, pis, ben, en tant que société, on le laisse pas tomber.

Pour lire un autre texte de Marie Darsigny : «Le Petit Guide d’autodéfense de la santé mentale

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