Les premières lignes de l’autobiographie de Kim Gordon, Girl in a Band, parlent des derniers moments de Sonic Youth. « Quand on est monté sur la scène pour notre dernier concert, la soirée appartenait vraiment aux gars. De l’extérieur, tout le monde ressemblait pas mal à ce dont ils avaient l’air pendant les trente dernières années. À l’intérieur, c’était une histoire différente. » C’est comme ça qu’elle a commencé le récit de sa vie, avec la fin de l’une de ses grandes histoires.
Le spectacle dont elle parle a eu lieu au Brésil en 2011, quelques semaines seulement après l’annonce de son divorce. Les fans ont crié haut et fort que l’amour était mort et que la musique venait de perdre l’un des groupes les plus intéressants des dernières décennies du même coup. Huit ans plus tard, même si Sonic Youth nous manque toujours cruellement, on sait bien que la fin du band ne voulait pas dire que Gordon prenait sa retraite (Thurston Moore non plus d’ailleurs).
Sans étiquette
C’est difficile de savoir par où commencer lorsqu’on veut parler de Kim Gordon. Musicienne, artiste, auteure, designer, badass. On peut lui coller 1000 étiquettes sans jamais vraiment être capable de la cerner. Elle rejette elle-même la plupart les termes comme « légende » ou « icône », disant à Vice en 2016 : « Je ne veux pas penser que je suis une personne qui a eu de l’influence ou une icône ou bla bla bla bla. Je me sens confiante quand je travaille. Penser à des idées. C’est comme ça que je suis le plus confortable. Ou quand je joue avec un groupe. » Pendant 30 ans, elle a été une pionnière de la musique rock avec Sonic Youth, qu’elle menait avec son mari (maintenant son ex) Thurston Moore. Tout comme sa musique, elle n’a jamais cessé de se réinventer et de se renouveler au fil des ans, restant toujours l’artiste fascinante que l’on a appris à connaître.
Explorer à nouveau
À peine un an après le dernier concert de SY, Kim fondait Body/Head avec son collaborateur de longue date Bill Nace. Ils ont fait paraître un premier EP en 2013 et leur deuxième album, The Switch, est paru pas plus tard qu’en juillet dernier. Le son expérimental et très raw de ce nouveau projet permet finalement à Gordon de continuer l’exploration sonore dans laquelle baignait Sonic Youth. Elle a également fait paraître un single solo en 2016, Murdered Out.
Rolling Stone Magazine décrit le son de The Switch comme du « post-apocalyptic art-punk muck » et même si l’album est loin d’être ce qu’on qualifierait d’accessible, il est des plus intéressant. Le morceau In The Dark Room par exemple, donne un peu l’impression d’être en train de regarder un ventilateur tourner au plafond pendant une crise d’angoisse. Ce n’est pas très joyeux, mais c’est carrément hypnotisant et les fans du genre y trouveront sûrement leur compte.
On connaît surtout la musicienne, mais depuis toujours, Kim Gordon est aussi une artiste visuelle. Tout au long de sa vie d’adulte, les deux passions se sont côtoyées et parfois combinées. On a notamment pu voir ses œuvres dans des galeries de Los Angeles et de New York. On pourra bientôt voir sa première expo solo (en Amérique du Nord), Kim Gordon : Lo-Fi Glamour, au Andy Warhol Museum de Pittsburgh. L’exposition mettra en vedette de ces peintures, sculptures, et dessins, ainsi que la musique qu’elle avait composée pour le film Kiss d’Andy Warhol.
Bien plus près de nous, Kim sera en concert avec son groupe Body/Head le dimanche 10 mars et lundi 11 mars prochain à la Sala Rossa dans le cadre de la programmation hors-saison du festival Suoni Per Il Popolo.