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L’inspiration provient de tous les endroits, même d’une infâme publicité pour vendre des frites pis des burgers cheaps.
J’ai un peu honte, mais cette publicité de McDo m’a inspiré.
Je vais le dire sans fla-fla: on est rendu particulièrement ridicule avec notre consommation de café. Moi le premier, je suis excité quand Starbucks rend disponible la saveur de citrouille l’automne alors que je n’ai pas mangé de citrouille depuis ma 6e année.
Acheter un café, le boire, en parler, c’est devenu un mode de vie, une expérience sensorielle qu’on pourrait presque confondre avec le sexe tantrique chez certains.
L’abondance des choix est devenue une vraie plaie.
Pourtant, quand j’en parle avec mon grand-père, prendre un bon petit café se résume pas mal à garrocher des cuillères de Maxwell House dans de l’eau bouillante. Comment s’expliquer ce fossé monumental autour d’une même action: celle de boire un café?
D’instinct, je dirais que l’abondance des choix est devenue une vraie plaie. L’humoriste américain Dennis Leary, en 1997, parlait de sa quête impossible d’un café à saveur de café aux États-Unis.
Ça fait vingt ans… ce n’était que la pointe de l’iceberg.
Tout ça, c’était avant la troisième vague du café. Avouons que ça sonne comme un film hermétique de Jean-Luc Godard et non comme un breuvage apaisant.
Nous sommes plus cérémonieux en 2017 avec nos cafés qu’avec nos mariages.
C’était aussi avant l’explosion des lattés avec des saveurs et des motifs, des options sans sucre, sans lait, sans caféine et sans gluten.
Surtout, c’était avant l’avènement du barista-artiste.
N’oublions pas qu’on parle toujours de café, cette chose qu’on enchaînait dans des verres en styromousse lors de réunions interminables y’a pas si longtemps encore.
En tant que société, quand est-ce que le virage s’est pris pour glorifier autant le café?
Nous sommes plus cérémonieux en 2017 avec nos cafés qu’avec nos mariages. Infusion à froid, contrôle de la température, extraction optimale du grain, filtration double, triple, renversée, etc.
On se calme, de grâce.
Je m’inclus dans le bateau ceci dit, je dépense plus en café dans une semaine qu’en alcool et même parfois en alimentation. Pierre-Yves McSween a beau me chicaner au quotidien à la radio, non, je le sais que je n’ai pas besoin de mon latté gros comme une piscine avec de la saveur dedans. Mais entre un café et mes REER, je choisis pas mal toujours un café en me disant que ça va m’aider à mourir avant 70 ans et, logiquement, rendre l’utilisation de mes REER facultative.
Futé comme ça.
On ne peut pas arrêter le progrès et la troisième vague de café, même si elle est arrogante au possible.
Autre observation: si tu as besoin de caramel, de sucre, de cannelle et que tu le demandes sans lactose ton latté, peut-être que ce n’est pas vraiment un café que tu devrais boire, mais une barre de chocolat fondue ou, mieux encore, un verre d’eau.
Je dis ça, je ne dis rien.
On ne peut pas arrêter le progrès et la troisième vague de café, même si elle est arrogante au possible, est une bonne chose. C’est vrai que c’est chouette de savourer des nuances de café et de le découvrir autrement. Très chouette même. Mais est-ce que ça justifie de faire la ligne comme des raisins pendant 20 minutes le matin et d’organiser des compétitions d’art dans la mousse de latté?
Je n’crois pas non, tout comme les brunchs sur le Plateau la fin de semaine. Deux œufs bacon, pas besoin d’être Paul Bocuse pour réussir ça.
On se perd dans toute cette variété et, surtout, on laisse filer entre nos doigts la simplicité réconfortante d’une tasse de café qui, jusqu’à tout récemment, n’avait pas besoin de tout cet apparat pour nous satisfaire.
Celui de la station-service faisait un travail honorable, même sans motif de fougère sur le dessus.
Plus de cafés filtres et moins de baristas avec des moustaches coiffées à la cire d’abeille d’élevage.
J’ose encore croire qu’il y aura un retour de balancier et, comme la remontée en force du vinyle, le bon vieux café filtre retrouvera ses lettres de noblesse. Celui qu’on fait en grande quantité et que l’on réchauffe plusieurs fois dans le micro-onde ou, mieux encore, celui que l’on fait sur les ronds de poêles avec une cafetière qui pourrait assommer un voleur.
De la simplicité, juste ça, et moins de baristas avec des moustaches coiffées à la cire d’abeille d’élevage.
Aussi, si possible, quelques endroits où le Wi-Fi n’est pas une option pour me permettre de lire un livre en paix sans la horde de pianoteux d’ordinateurs portables. Je n’en demande pas beaucoup.
Pour lire un autre texte de Stéphane Morneau: «28 jours sans alcool, 28 jours d’inquiétudes et de malaises».
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