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Je suis québécoise. Je suis étudiante universitaire. Je suis contre la hausse des frais de scolarité. Je suis en grève.
Ce discours n’est pas nouveau. On l’a entendu, vu, lu plus d’une fois sur Facebook, Twitter et dans tous les médias. Il ne s’agit même plus d’une guerre entre le gouvernement et les étudiants, mais plutôt entre les étudiants pour la hausse et ceux contre la hausse. Le gouvernement fait la sourde oreille de toute façon.
Je ne vais pas mentir. J’ai un Macbook et un iPhone. Je suis matérialiste. Je vis dans une société hyperindividualisée. Je ne le nierai pas, j’en fais partie.
Mais le débat n’est point ici. J’ai déjà été pour la hausse des frais de scolarité. À l’aveuglette, j’ai cru que l’on se plaignait le ventre plein. Ensuite, je me suis dit qu’il fallait bien payer la faramineuse dette québécoise qui va ensevelir nos générations futures. J’étais égoïste.
J’ai changé de camp quand j’ai eu accès aux chiffres de l’IRIS. Quand j’ai su que cette hausse équivaudra à 1,3% du budget provincial de 65 milliards de dollars, j’en ai eu le souffle coupé. Une somme qui ne vaut rien et qui se noie considérablement dans le Plan Nord, dans les commissions qu’on a eu à profusion et les guirlandes patriotiques à coup de millions. J’ai changé de camp quand je me suis souvenue de la devise de la Belle Province : «Je me souviens».
Les débats sans arguments que je lis sur Facebook me font mal aux yeux. À croire que les étudiants québécois ne connaissent pas leur histoire. Certains Québécois ont connu l’effervescence de la Révolution tranquille. Ils ont fait bouger les choses. Le gouvernement a créé le réseau des universités du Québec, dans le but de rendre l’éducation accessible à tous. En 1968, c’était un choix collectif, un choix commun, un choix de société.
Alors aujourd’hui, quand je lis des étudiants sur Facebook écrire : «Maintenant, est-ce qu’on demande aux Québécois de payer pour leurs élites ou on demande à l’élite de payer pour son propre investissement individuel ?», je me dis que ces personnes, comme bien d’autres n’ont pas compris ce qu’on avait choisi en tant que société québécoise.
Si on me revient avec l’argument «c’est tellement plus cher ailleurs», je dirai qu’on n’avance jamais si on se compare avec des sociétés qui sont loin de nos idéaux. Dans le Québec que je connais, l’éducation est un investissement collectif, garant de notre avenir. C’est aussi une trace de notre identité passée que je ne peux laisser. La gratuité scolaire fait encore la majorité en Europe, mais le gouvernement ne compare jamais ses chiffres avec ceux du Vieux Continent.
Je suis contre la hausse des frais de scolarité. Par principe, je ne veux pas que mon Québec devienne élitiste. C’est un choix de société, pas un caprice d’étudiante matérialiste.