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Je préfère la pizza au pot

Par
Stéphane Morneau
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Dans mon dernier texte, je vous parlais des problèmes de consommation de ma mère. Quand on connaît ce pan de mon passé, la plupart du temps, on assume que c’est pour cela que je ne consomme pas de drogues.

Et pourtant, ça n’y est pour rien, même si ça influence toutes mes décisions en même temps.

Voyez-vous, je n’ai jamais eu une position complètement contre les drogues, récréatives ou non. J’ai même flirté avec l’idée d’en faire moi-même, mais je suis un bien piètre junkie, j’abandonne le projet comme celui de ma remise en forme et celui de manger mieux. Ça ne colle pas, malgré la déroute volontaire et l’ivresse. Après deux jours “sur la dérape”, je m’épuise moi-même.

Si je ne consomme pas de drogues, c’est tout simplement parce que je n’en retire pas de plaisir.

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Ça pourrait facilement être en raison des nombreux mauvais souvenirs de mon enfance, des odeurs, des cris, des larmes qui accompagnent les longues soirées à entendre des couteaux faire des plombs dans la cuisine. Ça pourrait être tout ça, mais le plaisir serait sûrement plus fort que tout ce gris.

Alors il est là mon problème, je n’ai pas de plaisir – je ne savoure pas votre plaisir.

Quand je vois des poteux détendus se passer un spliff, ça ne m’interpelle pas le moins du monde. L’odeur m’agace, les fous rires m’agressent et fondamentalement, perdre le contrôle est quelque chose que je n’aime pas me permettre.

Bref, je n’ai pas de plaisir et ce n’est pas la fin du monde.

Ce n’est pas une position cool, même que certains me diront que je ne sais pas ce que je manque. Mais il est là le hic, je sais ce que je manque. J’ai vu neiger dans le domaine et non, à quelques exceptions près avec des substances plus chimiques, le plaisir et les drogues n’étaient pas en association dans ma tête trouble.

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Souvent, je me sens un peu à l’écart de ma génération à cause de cela. Mon incapacité d’évasion, ce plaisir communautaire de puffer en gang, j’aurais aimé ça le vivre d’une certaine manière. Mais ce n’est pas pour moi, ça ne le sera jamais, pour les mêmes raisons que je me trouve ridicule d’essayer de me saouler seul à la maison afin de vivre le fantasme de l’écrivain intoxiqué.

Citer Bukowski, c’est assurément un hit sur Tinder, mais un soir de semaine ce n’est pas super champion de souper au Jack Daniels.

Je pourrais me trouver plusieurs raisons d’être un casseux de party avec le cannabis, comme le fait que le reggae me donne des envies de violence ou que le regard vide de quelqu’un après un joint me laisse espérer le retour en force de la sélection naturelle. Mais je n’ai plus ses ambitions comme quand j’étais à l’université, par exemple.

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C’est la sagesse, j’imagine, vivre et laisser vivre et tout ce qui vient avec. Qui plus est, les ex-fumeurs à l’assaut des terrasses avec du Febreze sont tellement désagréables, je ne veux pas devenir l’équivalent pour les gens de mon entourage qui apprécient, avec raison, un p’tit joint entre amis de temps en temps.

Pourquoi je ne consomme pas de cannabis? Pour les mêmes raisons que toi tu en consommes, je présume — parce que c’est ce que tu as envie de faire. Être le preacher de la non-boucane, ce n’est pas pour moi, la soutane ne va pas bien avec ma barbe et je n’aime pas interagir avec les gens suffisamment pour leur dire quoi faire.

Alors, sortez vos bongs si ça vous chante, laissez-vous inspirer par le Spécial cannabis d’URBANIA pour faire changement de votre petite grindeuse sur la table du salon pour vos soirées d’évasions. Moi, au quotidien, j’ai plus de fun avec une small pepperoni fromage bien graisseuse qu’avec un joint.

Et de nous deux, je vais sûrement mourir plus jeune et moins en santé. Donc ne suis pas mon exemple, je t’en prie.

***

Pour lire une autre chronique de Stéphane Morneau : “Papa, pourquoi ne va-t-on jamais voir mamie?”

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