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« Je m’appelle Django Gignac »

Par
Catherine Ethier
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Mes hommages.

J’étais bien installée dans cette sympathique pizzéria hip tout ce qu’il y a de plus romantico-complexe de par toutes les possibilités qu’elle offre de tisser des liens durables avec la table voisine, cordée à la nôtre puis à la suivante, mollet contre mollet, steam corporelle contre steam corporelle (et où t’as pas intérêt à échapper ta fourchette à crustacés, sans quoi tu te ramasses à la quérir sous la table avec gêne dans une vaine contorsion de chaise où l’inévitable se produit toujours: le visage déposé sur la chaude fourche du voisin de qui tu touchais déjà le mollet, tu abandonnes); et ce qui était maxi-chouette, c’est que j’étais après vivre tout ça avec cette formidable amie que je vois si peu souvent.

(j’aurais aussi pu écrire: j’ai soupé de la pizza dans le Mile-End)

Le genre d’amie avec qui l’on n’hésite pas à commander cet accessible bloody ceasar surmonté d’une appétissante olive à la gousse, un pickle, un petit four, trois branchailles d’aneth ET UNE HUITRE OFFERTE À LA VIE SUR LE TOP.

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Ce qui arrive, avec les bloody, c’est qu’il y a, on se le confiera, surenchère. Loin de moi l’idée de vous froisser le mixologue, mais on est après vivre ce trimestre de trop où l’on repousse les limites de la garniture. Du naughty, naughty topping. J’attends d’ailleurs ce moment où l’on m’apportera un bloody ceasar couronné d’une oie blanche, un Paris-Brest, un Creuset rempli de stew et un dépliant d’assurance dentaire (Lisa va avoir besoin de broches).

Alors que je m’affairais à ne pas rater un seul grain du petit sel tout le tour du verre et sans conteste récolté à même les larmes d’une veuve sicilienne consentante, ma chère amie et maman de deux magnifiques cailles s’est mise à me parler garderie.
Mais surtout, à me citer les tout-petits.

La petite Lili, qui n’est qu’onomatopées et gorgées sûrettes.
Le petit Carl-Arthur, qui a des souliers qui marchent vite.
Puis est venu le tour du petit Emixam.

Emixam, c’est le nom d’un être humain qui existe vraiment.

Un jour, Emixam te vendra peut-être une mini-fourgonette. Pointera des graphiques qui donnent le vertige avec sa petite baguette dans un meeting en haut d’une tour, en costard Armani.

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Un jour, le petit Emixam opérera peut-être ton Pap test d’une main experte.

Et ce qui est fantastique, c’est qu’il aura largement de quoi te faire la conversation, soit en te racontant ce moment précis où ses snoros de parents ont trouvé que ce serait une sucrée de bonne idée de nommer leur fils Maxime. MAIS À L’ENVERS.

Emixam. Croquez dans chaque syllabe.

Il existe. Et il en existerait plus d’un.

Chaque année, Les Zimparfaites publient le palmarès des pires prénoms attribués à de pauvres poupons qui n’ont demandé ni à porter cet ignoble bandeau avec une grosse fleur su’l côté de la noix, ni de redouter ce fatidique instant où la maîtresse fera l’appel le premier jour de classe (et où l’idée de se pisser dessus lui paraîtra subterfuge idéal pour dégoûter ses camarades AVANT qu’ils n’entendent son petit nom et le honnissent pour un motif plus digne).

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Mais lorsque ces prénoms à coucher sur la paillasse s’incarnent et s’inscrivent en cursives à côté du “Hello, my name is”, on réalise que ce qui n’était, jusqu’ici, que concept à faire cracher la soupe, ben c’est vraiment le nom de quelqu’un.

Bon. J’avais capté la mode des prénoms vieillots; Gédéon. Olive. Marguerite et Télesphore. Toutes de sensationnelles idées et autant de boutures d’êtres humains de qualité.

Mais quand tu prénommes ton héritier Emixam ou que le nom qu’il devra signer sur ses chèques, c’est Luigi Bergeron, Jennifée ou Django Gignac (il existerait vraiment un Django Gignac), c’est attendre beaucoup d’une créature qui ne maîtrise pas encore ses sphincters.

On pardonnera certes au jeune Lou-Francis de ne pas avoir performé au ballon-poire.

À Violette, d’avoir vomi dans ses chouclaques.

Mais le jeune Django, lui, devra assurer grave dans la distribution des berlingots de lait à la pause-goûter. En chevauchant un pur-sang. Chemise à jabot savamment empesée et scalp de l’ennemi brandi bien haut.

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Chaque jour, le petit boire et l’apport en calcium de la meute reposera sur ses frêles épaules, tandis que le jeune JFK Bissonnette assurera sa sécurité, main au bluetooth.

Et si je puis aussi me permettre: futur parent, sache ceci.

Si tu prénommes ta fille Perle, Mignonne ou Émeraude, ce sera immanquablement celle qui aura trois têtes de plus que les autres, des petites jambes et un gros tronc, une tache d’orangeade sur sa blouse et qui aura surtout l’air d’avoir 37 ans en pré-maternelle.

C’est beaucoup de pression, que de naître joyau.
Et loi de Murphy oblige, les Émeraude tombent pas mal toujours du côté du beurre de pinottes.

Alors à tous les Thor, les Djaz, les Luck-As et les O-Feely, je vous dis: TENEZ BON.

Vous aurez peut-être assez de bol pour tomber dans la classe d’Emixam et là, personne ne vous remarquera.

La bise.

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