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C’est la première fois de ma vie que je vais prendre une Gravol pour dormir dans l’avion. Mais une vraie Gravol. Pas celle sur le plancher. Celle derrière le comptoir. Je ne suis tellement pas un gars de drogues, dans ma tête, je me suis naïvement dit : « Ça doit être ça les pilules que les vraies grandes vedettes prennent pour dormir. » Oui Jérémy, probablement qu’ils achètent des petites Gravols qui viennent dans une boîte rose au Jean Coutu de Rosemont-Petite-Patrie.
L’avion commence à bouger. Une dame se lève et dit à l’agent de bord : «I forgot my purse in the airport.» L’agent de bord, (Asiatique, cheveux rasés, une boucle d’oreille du côté droit; Il a l’air vraiment gentil, mais on dirait complètement un méchant dans un film de bataille qui commence en étant ben fin mais finalement c’est lui qui leadait le cartel de drogue.) comme réponse, fait juste lui pointer dehors : «The aircraft is moving.» Elle de répondre avec la confiance d’un prof de cours de conduite (j’ai toujours trouvé ces gens trop confiant pour rien) : «All my money is in there.» L’agent de bord, ne voulant pas dealer avec ça, lui répond tout simplement : «Go tell them in the front.» Et la laisse aller voir les autres agents de bord.
C’est pour des gens comme cette madame qu’on a inventé les cancellations de cartes de crédit. On va pas fucker l’horaire des passagers, leurs amis, famille, collègues qui les attendent à destination, l’équipage, leurs amis, familles, collègues qui les attendent eux à destination, sans compter les autres avions, les autres gens, leurs amis, famille, collègues qui les attendent eux aussi à leur propre destination, tout ça pour que tu aies ta carte-soleil et tes Tic Tacs, madame.
J’ai la tolérance d’un héroïnomane.
Mon voisin de siège (appelons le Michel) est un vrai de vrai monsieur. Il prend l’avion en chemise repassée, jeans avec des souliers propres brun. Son carry on est une valise sur laquelle fitte parfaitement son autre carry on. Moi, je suis en coton ouaté avec des bas dans mes crocs et mon carry on est un petit sac de sport. J’ai l’air de son fils qui sort de désintox et lui, mon père, m’amène en voyage pour qu’on retrouve une sorte de relation père-fils potable.
Comme j’écris ces mots, il se lève et revient en running shoe et linge de sport. Soit il a lu ce que j’ai écrit et l’a mal pris ou il y a un gymnase dans l’avion et je ne suis pas au courant.
Je mets le film Lion (que je te conseille fortement) et réalise que ma Gravol fait zéro effet. Dans ma tête, je me dis : «J’ai la tolérance d’un héroïnomane.» Au même moment, l’agent de bord asiatique me répond : «Pas du tout.» (Cette partie est fausse, mais ça aurait été sick.)
Puis, j’enchaîne avec les films In The Mood For Love et La La Land, le tout en buvant de l’eau. Michel se prend une vodka Clamato, du vin et un café Baileys et écoute le film Rough Night. C’est le plus beau personnage de l’univers. J’essaie de m’imaginer sa vie :
Il vient de laisser sa femme pendant leur mariage et quitte pour Shanghai afin d’y vivre librement son homosexualité. Ou il est tout simplement festif.
Je pleure comme si je m’étais cassé un membre, lui est chaud et écoute maintenant Bridesmaids.
Je pleure comme si je m’étais cassé un membre, lui est chaud et écoute maintenant Bridesmaids. Soudainement, c’est lui qui semble sortir de désintox.
Michel et moi sommes rendus à trois repas et cinq films qu’on partage ensemble. Je ne me suis pas rendu là avec une fille depuis deux ans.
J’atterris à Shanghai, et l’aéroport n’a pas de Wi-Fi… moi qui pensais que ça venait de là l’Internet en général.
Mon deuxième vol, j’ai pris deux Gravols. L’agente de bord a dû me shaker pour me réveiller une fois atterri.
J’attends mes bagages à Bali et un couple asiatique semble me reconnaître. Je me dis : “J’ai déjà fait des shows à Brossard. Ceci explique cela.”
Ils s’approchent : «Can we take a picture with you please?»
Moi, surpris d’avoir des fans anglos, mais tout de même flatté : «Of course!»
On prend la photo. Avant de quitter, le couple me dit : «We have all your yoga DVDs!» Et ils quittent le sourire aux lèvres.
Soit je ressemble à un prof de yoga connu, soit quelqu’un m’a filmé à mon insu pendant les 4 cours de yoga que j’ai pris et a fait de l’argent en vendant des DVDs en Indonésie. Au même moment, l’agent de bord asiatique m’a dit : “GOT YA!”
Pour lire l’introduction au voyage de Jay Du Temple : «Avoir Peur».