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J’ai perdu Louis

Louis est un génie. Mais aussi avec un boutte de gars pas normal.

Par
Léa Stréliski
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Je suis (j’étais) une grande fan de Louis CK. Ce qui est un cliché absolu quand tu es humoriste. Aimer Louis CK quand tu fais du stand-up, c’est comme aimer le commandant Cousteau quand t’aimes les poissons. Et maintenant, ils sont tous les deux morts. Enfin, c’est tout comme.

En 2017, on ne survit pas aux allégations d’inconduites sexuelles (allô, Roy Moore!), surtout quand elles sont avérées, vérifiées et avouées. La vague est forte. Normal, elle contient des milliers (milliards?) d’années de ressac. Elle peut bien être puissante, on est des milliers (milliards?) à fermer notre gueule depuis trop longtemps, alors maintenant que le mouvement est parti, tasse-toi de d’là, tu pourrais bien boire la tasse. Et noyer ta maison, ta carrière et of course, ta précieuse réputation.

Mais pas Louis. Pas mon Louis. Louis est un génie. Louis est un dieu de l’empathie. Louis est un bon père. Louis est un gars normal avec l’intelligence surhumaine de décrire un gars normal.

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Mais aussi avec un boutte de gars pas normal. Un petit boutte. Un petit boutte qui dépasse. Mais qui à la longue, non traité, non abordé, refoulé, un jour, te pète à la gueule.

Patatra, Louis est tombé.

J’ai été fâchée contre les filles! Pouvez-vous croire? Moi là, qui viens de faire une série de shows d’humour contre la culture du viol, qui ai écrit des textes pour que les femmes brisent le silence, qui suis allée à Anne-Marie Dussault raconter ma propre agression sexuelle…

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Ugh. Vous dire l’ampleur de mon déni. J’avais honte. J’avais honte de ma colère parce qu’au début, elle n’était pas dirigée dans le bon sens… Quand c’est sorti, j’ai viré full pin Lise Payette dans ses ugly years. J’étais soudainement une grand-mère, une de ces femmes qui a vécu de l’abus et ne veut pas que les plus jeunes générations parlent, qui défend une sorte de « ravale la réalité, fille; c’est de même que ça se passe depuis toujours, on va pas foutre la merde maintenant, eh puis qu’est-ce que quelques “petits” traumatismes féminins face au génie d’un homme? » WHAT. THE. FUCK.

J’ai eu ces pensées. Je les ai eues. J’ai été fâchée contre les filles! Pouvez-vous croire? Moi là, qui viens de faire une série de shows d’humour contre la culture du viol, qui ai écrit des textes pour que les femmes brisent le silence, qui suis allée à Anne-Marie Dussault raconter ma propre agression sexuelle… Imaginez comme le conditionnement est fort pour qu’en quelques secondes, je me mette d’abord à vouloir protéger mes acquis.

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J’aurais voulu qu’elles se taisent parce que je ne voulais pas perdre MON LOUIS.

Une folle.

Bon, bien évidemment, ça a duré 2 secondes. Je me réveillais de ma sieste alors je voyais pas encore clair, mais tout de même, j’ai été assaillie par ces pensées comme on se bat contre un essaim d’abeilles.

Puis, la réalité, la vraie de vraie réalité m’a frappée en pleine face… Ouin, on a beau être un génie, se crosser devant les filles est et restera toujours criminel. Surtout dans une situation d’abus de pouvoir, dans laquelle il se trouvait puisque ses victimes étaient des femmes humoristes qui l’admiraient.

Le dommage est horrible. Moi c’est mon idole et je suis traumatisée qu’il ne le soit plus. Je ne veux même pas imaginer quand c’est ton idole et tu le perds parce qu’il s’est crossé devant toi.

Ugh 2017, j’ai hâte que tu termines.

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