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J’ai la réponse à ta question indiscrète sur ma consommation d’alcool
Depuis trois ans et demi, je ne bois plus. C’est la meilleure décision que j’ai prise de ma vie, juste après arrêter de penser que si je me coupe une frange, elle ne deviendra pas grasse dès midi, cette fois-ci.
J’ai lâché les toupets et l’alcool et je ne reviendrai jamais en arrière.
C’est redondant à lire peut-être, mais ce qu’on dit sur la sobriété, c’est vrai. Je dors comme un poupon dans un pays du G7, j’ai payé à peu près toutes mes dettes (si vous lisez ceci à l’aube de votre vie adulte, NON, ce n’est pas une bonne idée de prendre une carte de crédit sur le fly donnée par une préposée aux parfums dans un magasin à grande surface).
J’ai fait le ménage dans mes amis, je leur paie même des pichets quand on sort. Je me souviens de tous les potins dits dans la soirée et aucun secret ne tombe de ma bouche par mégarde.
J’ai évacué l’alcool de mon système, mais impossible de montrer la porte au party animal qui vit en moi. C’est encore bibi icitte qui va caler la bière après un spectacle, c’est moi qui paie des tournées de shooters en m’en prenant un de ginger ale pour faire partie de la gang, c’est moi la dernière au bar qui dis au barman qui avait hâte de nous voir quitter : « Merci, pis je m’excuse, mon ami ne voulait pas vraiment lancer un tabouret par terre en criant : JE SUIS UN TAQUIN ».
Je suis comblée dans ma vie de fille sobre. Je suis à l’aise d’en parler, d’en promouvoir le mode de vie. Je comprends aussi ceux qui boivent. Je suis encore convaincue qu’il y a de ces chanceux qui peuvent consommer sans problème en ce bas monde et je leur lève mon mocktail.
Juste une petite chose, par contre.
Quand la fête bat son plein, lâchez-moi avec vos questions. Si vous me voyez, moi, ou quelqu’un d’autre, boire un peu trop d’eau gazeuse, se resservir dans le tonic sans accéder à la bouteille de Tanqueray et y mettre un agrume pour y ajouter un zeste de folie, faites comme quand vous voyez quelqu’un voler à l’épicerie : vous n’avez rien vu. Il y a une raison à notre hydratation. Une raison parfois pas si grave, parfois sensible. Souvent, presque tout le temps, un peu difficile à crier entre deux succès de Pitbull.
Je suis tannée de faire attention à comment vous vous sentez quand vous me demandez : « Scuse, je me demandais juste, pourquoi tu ne bois plus d’alcool? »
Chaque fois, la fête s’arrête autour, je deviens les mains moites, je sais que je vais vous rendre mal à l’aise. J’utilise une de mes phrases coquettes pour essayer d’alléger l’atmosphère, du genre : j’ai pris ma retraite de la boisson, hihi!
Mais aujourd’hui, j’abdique.
La vraie raison pour laquelle je ne bois plus, c’est que je suis alcoolique. Une pas pire, à part de ça. Une assez pas pire pour gager une bouteille de pet nat que je perds à peu près tout ce que j’ai si je me remets à boire.
C’est frette, c’est trash, ça vous pète un gender reveal party sur un temps. Mais ça ne me dérange pas, parce que pour vrai? Un gender reveal party!? C’est comme la vision que vous avez de l’alcoolisme : totalement dépassé!
Quand vous me demandez pourquoi je ne bois plus, j’ai l’impression que vous arrêtez de regarder la fille qui est devant vous et que vous voyez le florilège de préjugés que le mot alcoolique transporte sur ses épaules : l’itinérance, la morbidité, les familles éclatées. Je ne suis rien de tout ça. J’étais juste une fille qui médicamentait son anxiété sociale. C’est tout!
Une dernière petite affaire. De grâce, ne commencez pas à accaparer mon attention pour vous valider dans votre consommation raisonnable en m’expliquant que vous, vous ne pensez pas avoir de problème, parce que vous buvez juste les mardis, jeudis et samedis, entre vingt heures et minuit. Comme on dit, I’m too sober for that shit.
Mais je suis contente qu’on fête ensemble, ce soir. Et ma porte sera ouverte pour qu’on en parle davantage.
Demain, au brunch. Pas là. Là, on s’amuse.