.jpg)
J’ai donné mon chat et je suis devenu l’antéchrist
À toi, ma chatte. Ma grosse crisse de chatte ou plutôt, mon ancienne chatte. T’es pu vraiment ma chatte parce que je t’ai donnée. J’me suis débarrassé de toi. Je sais que tu préfèrerais ce terme, parce que t’étais dramatique, comme chatte.
J’me souviens de ce matin glorieux où t’es entrée dans ma vie, ma grosse chatte. Coloc #1 t’avait trouvée dans l’fin fond d’la campagne. Tu mangeais d’la crap dans une vieille grange avec tes frères et sœurs comme une badass. T’as ensuite fait un grand voyage en Yaris jusqu’à Montréal. Coloc #1 a failli mourir en chemin parce que t’as trouvé le moyen de sortir de ta boite pour te projeter violemment sur le dash du char comme une osti d’folle.
Moi pis Coloc #2, on t’attendait dans l’appartement, la face dans la fenêtre, excités. On avait hâte que t’arrives. La voiture s’est alors arrêtée devant l’appartement. Coloc #1 en est sortie, une p’tite boule de poils dans les mains. Elle t’a brandie vers le ciel, glorieuse, le bras bien tendu, comme le singe dans le Roi Lion quand il présente Simba à la foule pour la première fois. Tu semblais paniquée, pauvre amour. C’est sûr que, quand la seule chose que tu as connue dans la vie, c’est une grange pis que là, dans la même journée, tu te tapes ta première ride de char avec une fille qui, qu’on s’le dise, est reconnue pour conduire comme une psychopathe et qu’en plus, t’arrives à Montréal sur un coin de rue où se trouve un Maxi fucking BS d’un bord pis un vieil immeuble louche où ils tournent clairement d’la porn de l’autre, ça t’donne pas l’goût d’vivre mettons.
Nos premiers mois ensemble se déroulèrent comme dans un conte de fées. T’étais cute en tabarnak, quand t’étais p’tite. On a appris à s’connaitre, pis m’semble qu’on s’aimait. Grâce à toi pis à nos photos nices, j’ai même gagné genre 3 followers sur Instagram. J’vivais le fame, pour vrai. Thanks.
Notre vie a légèrement basculé le jour où Coloc #1 et Coloc #2 ont décidé qu’elles retournaient vivre à la campagne chez leurs parents. Elles n’aimaient pas ben ben ça, Montréal. Je les comprends, souvent. Bref, elles ne pouvaient pas t’amener avec elles. On s’est donc trouvé un beau p’tit 3 1/2 toi pis moi. T’étais un peu comme ma blonde, ou alors comme ma p’tite fille. Ton stade I’m not a girl, not yet a woman s’est tranquillement terminé et tu es devenue, comment dire, une femme. Une chatte adulte. Et pas n’importe laquelle. Tu es devenue une chatte au caractère particulier, une… une… une bitch.
T’étais un peu comme ma blonde, ou alors comme ma p’tite fille. Ton stade I’m not a girl, not yet a woman s’est tranquillement terminé et tu es devenue, comment dire, une femme.
C’est de ma faute. J’pas bon avec les chats. J’ai toujours eu des chiens. Je t’ai traumatisée, c’est sûr. Je ne respectais jamais ta bulle. J’te serrais dans mes bras fort fort pour avoir un semblant d’affection alors qu’il était évident que tu priais au Dieu des chats pour que j’te crisse patience. Je jouais avec toi comme je joue avec un chien. T’aimais pas ça. T’avais pas l’air de m’aimer moi non plus. Ça m’faisait d’la peine. J’essayais de comprendre ta psychologie complexe. De retenir mes envies de venir te flatter pis de te faire des colleux parce que t’aimais pas ça. J’me sentais comme un colon qui ne comprends pas c’est quoi, le consentement. Quand tu dormais, j’me dépêchais de venir te flatter avant que tu te réveilles. C’est dur des fois, d’avoir une belle grosse boule de poils toute mignonne à tes côtés sans pratiquement jamais pouvoir s’en approcher.
J’me réveillais la nuit pis tu me fixais, littéralement, dans le coin de la chambre. Pas moyen d’avoir un chat qui ronronne. Nanon, le mien, y fixe esti. Y fixe dans la noirceur des ténèbres. Je t’ai menacé souvent d’aller te domper à la SPCA si tu ne calmais pas tes tits. Mais j’étais pas capable. J’me répétais qu’un animal, c’est pour la vie. Sauf que là, t’avais juste 3 ans pis chanceux comme j’suis, tu taperais sûrement le 25 ans juste pour me faire chier. J’avais l’impression d’être la victime d’une relation abusive. Que la toune quétaine Love the Way you Lie avait été écrite juste pour nous, ma grosse chatte. Toi, tu t’en crissais. Parce que t’es un chat pis un chat, ça s’en crisse.
Je t’ai menacé souvent d’aller te domper à la SPCA si tu ne calmais pas tes tits. Mais j’étais pas capable. J’me répétais qu’un animal, c’est pour la vie.
Et puis un jour, j’ai rencontré un autre minou. Un minou humain. Un minou qui m’aimait autant que j’l’aimais. Un minou qui m’faisait du bien pis qui me laissait lui donner autant de colleux que j’le désirais. Mais mon minou précieux était allergique à ma grosse chatte. Pour vrai, là. De vraies allergies. Pis ma grosse chatte l’haïssait, lui aussi. Encore plus qu’elle m’haïssait moi. C’tait pas cute. On était deux hommes dans un appartement, un gavé de médicaments depuis des mois pour survivre au chat, l’autre qui braille sa vie parce qu’il ne sait plus quoi faire dudit chat. Winning at life, pour vrai. Pendant c’temps-là, le chat, dans le coin, qui nous regarde en nous faisant des fuck you avec ses griffes meurtrières.
J’ai choisi. J’ai fait un choix pas très populaire, ma grosse chatte. J’ai choisi l’humain. Je t’ai donnée. Pas n’importe où. Je t’ai trouvé une belle famille. J’te l’cacherai pas, j’ai pleuré à cachette pas pire souvent les jours précédant ton départ. J’me cachais parce que j’voulais pas que mon nouveau minou humain culpabilise davantage. J’ai googlé mille fois « est-ce que les chats s’ennuient de leur maitre? ». Les études étaient partagées. Je choisissais de croire celles qui disaient que non parce que ça m’rassurait. J’me disais que dans le fond, t’étais peut-être pas une bitch. Peut-être que tu m’aimais juste pas. Que si j’te donnais à quelqu’un de calme, à une cat lady, peut-être que ça te ferait du bien. Peut-être qu’entre gurls, vous vous comprendriez. Pis que tout le monde serait plus heureux.
Si tu trouves une nouvelle famille pour ton animal et que ça s’avère être une meilleure solution pour tout l’monde, y compris l’animal en question, c’est quoi l’problème?
J’ai bien sûr eu droit aux commentaires culpabilisants de ceux qui me voyaient comme le démon parce que je donnais mon chat. T’sais ces êtres supérieurs qui s’prennent pour des activistes parce qu’ils partagent des vidéos zéro legit de PETA qui datent de genre 2003 en pensant changer l’monde. « Un animal c’est pour la vie ». Quelle déclaration simpliste. Dans la vie, les situations changent, ça arrive. Un peu de nuance et de rationalité, ça t’tente pas? Si tu trouves une nouvelle famille pour ton animal et que ça s’avère être une meilleure solution pour tout l’monde, y compris l’animal en question, c’est quoi l’problème? Pour vrai, continue de partager les cochonneries de pseudoscience/Gandhi/kale que tu trouves sur la page de marde de David Avocado Wolfe pis sacre-moé patience, thanks.
Revenons au félin. Ça fait plus de deux ans et demi maintenant que tu n’es plus dans ma vie, ma grosse chatte. Presque autant de temps que tu en as fait partie. Pis je ne regrette pas. Même si moi pis minou humain on s’laissait demain matin, j’le regretterais pas. J’suis bien avec ma décision. Pis j’suis pas mal sûr que toi aussi.
J’voulais juste te faire un p’tit coucou, ma grosse. Parce que je pensais à toi, aujourd’hui. J’espère que tu vis ta vie de chatte comme la badass que tu étais dans le temps. Mais avec un peu plus de tendresse, quand même. Bisous, grosse pute. xox