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J’ai campé toute seule dans un parc national tout neuf
On s’entend que le parc a 1,5 milliard d’années. C’est la partie « parc national » qui est toute neuve.

URBANIA et la Sépaq s’unissent pour vous faire découvrir la nature comme vous ne l’avez jamais vue.
Cette année, pas d’Éric Lapointe ni de vomi dans la ruelle pour moi. Plutôt que de passer la Saint-Jean en ville et en troupeau, j’ai pris la route vers le Témiscamingue pour camper dans le très neuf parc national d’Opémican, plus précisément dans le secteur de la Pointe-Opémican, inauguré quelques jours plus tôt. Une façon rafraîchissante d’aimer son Québec pour la fête nationale.
Bon. Ce qu’il faut savoir, c’est que je suis loin d’être une campeuse expérimentée. Citadine pissou et dédaigneuse, en 2016, j’avais même écrit ce texte plein de mauvaise foi : 7 Raisons d’haïr le camping. Oh! Que j’étais dans l’erreur ! Mais, à ma défense, je ne connaissais pas encore le camping de 2019, niveau parc national de la Société des établissements de plein air du Québec, la fameuse Sépaq. Au Québec, on l’a l’affaire.
Discussion avec les grenouilles
Après six heures de route en tête à tête avec mes balados, je commence à voir des lacs partout, des pins hauts de 10 étages et des bêtes bizarres qui traversent la route : je dois être sur la bonne voie. Effectivement, peu de temps après, j’arrive au pavillon d’accueil de la Sépaq, un beau bâtiment tout en verre et en bois qui donne sur une plage mystérieuse en plein cœur de la forêt. Je ne le sais pas encore, mais c’est la pointe Opémican : au cours des 6 000 dernières années, cette plage a longtemps été un havre algonquin, avant de devenir un haut lieu de l’industrie forestière. Il y a eu tant d’action ici, et pourtant, c’est si calme!
La vue du sommet de la falaise compense amplement les moustiques et la transpiration.
Avant d’oser me lancer dans l’allumage d’un feu (me connaissant, ça risque d’être embarrassant), je décide de me dégourdir les jambes dans un sentier de randonnée. La vue du sommet de la falaise compense amplement les moustiques et la transpiration. En plus, l’avantage d’être toute seule, c’est que je peux parler à toutes les grenouilles que je croise sans que personne se moque de moi (« OMG! T’es ben cute toi! Je vais t’appeler Boing-Boing! »). J’aurais le goût de rester là pour voir le soleil se coucher sur ce lac magique de 110 km de long… Mais il va bien falloir que je fasse face à mes peurs : ce soir, je dors toute seule en forêt.
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Glamping
Je n’ai ni tente ni expérience, alors j’opte pour le prêt-à-camper. Une belle cabane toute neuve avec matelas, vaisselle, moustiquaires et cafetière, mais surtout vue sur la forêt à l’infini. Contre toute attente, je parviens à allumer un pas pire feu, et je me fais griller des saucisses (végé au kale, je reste fidèle à moi-même) en lisant un livre. Le plus magique dans tout ça, c’est que je n’ai ni WiFi ni 4G qui entre; je n’ai donc aucune excuse pour travailler!
Cette nuit-là, j’ai rêvé qu’une biche sortait de sous mon lit…
Laissez une fille des villes deux secondes en forêt toute seule avec ses pensées et déjà elle se voit Princesse de la nature en rêve.
La journée la plus sportive de ma vie
Je n’ai qu’une journée complète de congé devant moi, alors je décide d’en profiter autant que je peux. YOLO! Il est 7 h, je repars en randonnée. Je me dépêche, parce qu’à 10 h, j’ai rendez-vous pour mon baptême de rabaska. Cette fois, au lieu de grimper la falaise, j’emprunte le chemin qui longe le lac. Seule au monde, je découvre les vestiges de l’ancien poste de flottage de bois : l’auberge Jaudoin, l’énorme chaîne pour treuiller les chaloupes, la vieille maison du surintendant. Les draveurs qui travaillaient là en 1890 devaient tellement avoir la chienne, dans ce coin perdu et sans moyens de communication modernes…
Les draveurs qui travaillaient là en 1890 devaient tellement avoir la chienne, dans ce coin perdu et sans moyens de communication modernes…
Surtout que, rendue sur le rabaska, j’apprends qu’une campeuse a aperçu un ours ce matin! Les naturalistes du parc ont beau me jurer que les ours noirs ne veulent rien savoir de moi, et qu’ici, il y a plein d’espèces rares bien plus intéressantes à voir, j’ai maintenant deux nouveaux buts pour ma journée : 1. apercevoir un ours pour écrire un super article, 2. surtout ne pas apercevoir d’ours, histoire de ne pas me faire dévorer tout cru.
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Crédit: Mathieu Dupuis
J’emprunte donc un vélo tout terrain pour aller le plus profond possible dans les chemins, et tenter de voir le fameux ours. À la limite, j’accepterais de voir seulement un lynx.
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Une chance que je n’ai pas d’allergies. Le blanc à terre, c’est yink du pollen! (P.S. Dites-moi si vous voyez un ours ou un lynx caché dans cette photo.)
On m’a aussi donné une feuille pour effectuer un rallye d’interprétation. Il y a des photos numérotées d’animaux locaux un peu partout dans le bois, et on doit deviner le nom de chacun en français, en anglais ou en algonquin… Résultat : je suis pas pire en mammifères et en oiseaux, mais je suis pourrite en rongeurs et en poissons. Et je sais maintenant dire polatouche en algonquin (canackadawe).
À 14 h, je fais le circuit patrimonial. La garde-parc est full impressionnée que je connaisse déjà plein de choses sur les bâtiments du poste de drave (je ne lui ai pas dit que j’ai déjà fouiné partout pendant ma randonnée ben-trop-tôt-le-matin). Elle m’ouvre ensuite la porte de la forge, où on a reconstitué l’ambiance d’antan avec des projections interactives complètement dingos.
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Les petites lumières au plafond s’allument comme des étincelles! Fallait être là.
Toujours à la recherche de l’ours
Rendue là dans mon programme, je suis sincèrement crevée. Mais je n’ai toujours pas trouvé l’ours! Je loue donc un kayak, dans l’espoir d’en voir un qui pique une saucette à l’écart dans le lac. Au bout d’une demi-heure, quand j’ai fini de dépenser l’énergie qui me restait sur ma pagaie, j’abandonne ma poursuite impossible et me laisse porter par l’eau pour absorber un peu de l’immensité de la nature. Je n’ai pas apporté d’appareil photo, car je suis assez maladroite pour réussir à retourner un kayak dans un lac calme. Vous devrez donc me croire sur parole quand je vous dis que, depuis le milieu du lac Témiscamingue, la vue clouerait le bec à n’importe qui tellement c’est beau.
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Crédit: Mathieu Dupuis
Pic-bois, laisse-moi pas revenir en ville!
Et voilà. Le lendemain, c’était déjà l’heure de rentrer. Ce n’était plus la Saint-Jean. C’était l’heure où je passais de Princesse de la nature à Citrouille. Qu’à cela ne tienne. Je suis maintenant BFF avec les gardes-parc de la Sépaq. Je pense même me magasiner des shorts à zippers beiges comme eux. Pas mal certaine que je reviendrai à Opémican l’an prochain pour les leur montrer.
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