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J’ai aimé un anglo

Par
Kim Lizotte
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À en croire Kim Lizotte, sortir avec un anglo, ça dope la confiance en soi et ça affole la princesse romantique en nous. Entre autres. Regard intimiste sur l’anglo en tant que chum.

Assez surprenant qu’une fille du Bas-du-Fleuve, qui a grandi à Québec et qui n’avait jamais parlé anglais avant ses 17 ans, ait pu se retrouver en couple avec un anglophone. Un vrai de vrai, trouvé directement en banlieue de Toronto. Un grand Ontarien d’origine allemande, qui boit de la «Canadian» et qui crie « Go Leafs go ! » pendant les matchs de hockey. Ça relève presque du miracle, étant une fière séparatiste nationaliste qui hurle des “Vive le Québec libre” à tout bout de champ !

Il est rassurant, l’Anglo-Saxon du ROC. Il maîtrise l’étiquette, les bonnes manières et les formules de politesse tel un homme de la royauté. Tellement qu’on se sent un peu habitante à ses côtés. Il n’oublie jamais un « please », un « thank you », un « is everything ok ? ». Il se tient droit sur sa chaise et s’époumone à répéter à quel point « he really appreciate this and this and this ! ». « I really appreciate it » est sans aucun doute la phrase que j’ai le plus entendue en deux ans à Toronto.

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Tout ce charme quasi monarchique disparaît lorsqu’il se retrouve avec ses amis. L’anglo passe du rôle du bon fils bien élevé à celui d’adulescent partyboy avec une aisance impressionnante. Un sous-sol, un baril de bière (oui, comme dans les films), des ailes de poulet et des amis obnoxious qui gueulent fort l’un par-dessus l’autre, et voilà le travail.

Tu me like, je te love ?

Vous commencez à fréquenter un de ces spécimens ? Vous êtes donc probablement dans la phase du « I LIKE YOU ». Girls, j’espère que vous êtes prêtes à vous armer de patience et de tact, car cette période de temps va vous sembler interminable. Le Québécois pure laine est beaucoup plus enclin à dire « Je t’aime » que son voisin de l’Ouest. Probablement parce qu’il n’a pas le choix, je vois mal un Simon Tremblay étirer un « Je t’apprécie » pendant plus de six mois. La femme québécoise a trop de caractère pour accepter un tel traitement. Tu m’aimes ou pas, ciboire ?

Notre anglo, on peut le fréquenter LONGTEMPS. Il peut nous bombarder de « I like you » pendant des mois, pour ensuite enchaîner avec un « I like you so much » et, au moment où l’on n’a plus d’espoir, il nous abandonne ou… nous fait l’honneur de prononcer les mots « I LOVE YOU ».

Le fameux « I LOVE YOU » des Anglais, la chose la plus importante après la naissance d’un bébé. Quand j’ai demandé des explications sur la différence entre un « like » et un « love », mon Ontarien m’a répondu : « If I say I love you, it means : I would die for you. » (Oui, comme dans la toune de Bryan Adams.)

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Bref, si vous n’êtes pas en amour et que vous avez peur de l’engagement, prenez vos jambes à votre cou. Le « I LOVE YOU » a une telle importance que vous devez vous préparer à recevoir une demande en mariage dans les prochains mois.

Car oui, il est traditionnel. Et c’est ça qui est rassurant pour une fille. Venant d’une famille non conventionnelle avec une mère ultra féministe qui s’est mariée avec une robe courte/sans voile/sans traîne, jamais de ma vie je n’avais rêvé d’un mariage de princesse. La personne qui m’a fuckée pour toujours en insérant dans ma tête des images d’amour romantico-surréaliste, c’est définitivement mon ex.

“I can’t wait to ask your dad if you can be my wife. ” “You’re gonna be so beautiful when you’re gonna walk down the aisle, I’m gonna cry.”

Disons que ça fait changement du “Je me marie pour faire plaisir à ma blonde.”

Tout est possible, and beyond

Le bon côté des Anglos, c’est leur absence de complexe d’infériorité et de côté colonisé. Ils sont ambitieux et ne sont pas nés pour un petit pain. Et ça, ça a changé ma vie.

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“You’re good. Do it. You deserve the best. You can do everything. You’re so brilliant. You should write. You’re a good writer, you should go to school, you should go to New York ! Do everything you want, you’re good at it!”

Toujours se dépasser. Jamais peur d’échouer. Toujours dans le renforcement positif, jamais d’attitude défaitiste. Ils sont très bons pour relever nos forces.

Le downside, c’est que l’ambition, le statut social, le côté matérialiste prennent beaucoup trop de place. C’est bien beau croire en soi et savoir qu’on peut réussir, mais si c’est juste pour avoir a nice place downtown et le char de l’année, bof. Le travail, la réussite, le dépassement, ça entraîne aussi son lot de problèmes : monsieur est toujours au travail, se définit par son travail, a besoin de se prouver et évalue ses qualités d’être humain par ses performances. (Oui, je généralise, but in Toronto, you live to work, you don’t work to live. C’est eux-mêmes qui me l’ont dit.)

Il était là, mon problème avec mon anglo : pourquoi voir si grand pour si peu ?

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Mais ce qui est bien en tant que « p’tite Québécouèse », c’est qu’on peut atteindre l’âme de notre Anglais. Notre fameux côté émotif, un peu fou, moins traditionnel, qui vit un rapport différent à la sexualité que sa consœur ontarienne plus prude, qui a une culture à partager, ça charme son homme. Ça l’humanise, même. Mais ça lui fait souvent honte devant ses parents. J’ai dû d’ailleurs m’inventer une personnalité de fille sage pour m’intégrer aux bonnes familles du Rest of Canada.

Somme toute, il me ramenait sur terre, me rassurait, me sécurisait, me faisait voir la vie à travers ses yeux de Nord-Américain pour qui tout est possible, et moi, en échange, je lui rappelais l’importance de la « joie de vivre » si typique.

Faut croire que j’ai pris ça comme une longue expérience culturelle et linguistique qui a changé le cours de ma vie. Ainsi, c’est grâce à un anglophone si je m’assume autant en tant que femme québécoise non traditionnelle. Thank you so much, dear ex. I really appreciate it.

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Mais il ne devait pas avoir que des qualités, car je file maintenant le parfait bonheur avec… un Québécois. Qui parle français. Et qui me dit des “Je t’aime”, lui.