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Investiture présidentielle : à quoi s’attendent les résidents de Washington D.C. ?

Deux Washingtoniens nous racontent comment ça se passe.

Par
François Breton-Champigny
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Il y a un an jour pour jour, le Téléjournal de Radio-Canada animé par Patrice Roy ouvrait avec plusieurs nouvelles «choc», dont la présence de l’armée canadienne pour venir en aide aux habitants de Terre-Neuve littéralement ensevelis sous des mètres de neige. «Les quatre derniers jours, je les ai vécus un peu seule. Donc je commence à me sentir un petit peu isolée», témoignait une dame prise dans son logement en raison de la tempête.

Eh boy… Si seulement elle avait su ce qui l’attendait…

365 jours plus tard, disons que les manchettes sont beaucoup plus stressantes. Sous un fond de pandémie mondiale qui ne finit plus, les États-Unis s’apprêtent à mettre en place un nouveau président au lendemain de manifestations violentes au sein même du haut lieu de pouvoir, le Capitole à Washington.

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On s’est entretenu avec deux résidents de la capitale américaine à la veille de cette journée qui restera gravée dans les mémoires pour savoir comment ça se passe.

Le calme après la tempête

Contrairement au fiasco du Capitole le 6 janvier dernier, Thierry Humeau ne croit pas que l’investiture de Joe Biden sera teintée de chaos. «Après les événements du Capitole, tout le monde s’est affolé pour l’inauguration. Il y a plus de 15 000 soldats de la National Guard et des corps de police de tous les États voisins partout en ville en ce moment. C’est pratiquement impensable qu’il y ait des débordements majeurs», estime le propriétaire d’une entreprise de production télé et vidéo.

L’Européen d’origine explique que les entrées de la ville sont «bloquées» par les autorités, ce qui empêche les supporters de Trump (qui proviennent majoritairement d’États plus ruraux selon lui) de pénétrer dans la capitale américaine.

«Je gérais une équipe mobile sur place ce jour-là pour Al Jazeera donc j’ai suivi le cortège de la Maison-Blanche jusqu’au Capitole. J’ai vu les scènes d’attaque en direct. C’était très intense».

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Pandémie oblige, les commerces comme les restaurants, les bars et les magasins sont également fermés depuis belle lurette. Avec la présence des autorités, la ville est carrément «morte» d’après l’entrepreneur, un contraste avec les émeutes violentes du Capitole qu’il a vécu de l’intérieur. «Je gérais une équipe mobile sur place ce jour-là pour Al Jazeera donc j’ai suivi le cortège de la Maison-Blanche jusqu’au Capitole. J’ai vu les scènes d’attaque en direct. C’était très intense».

Aujourd’hui, un caméraman de son équipe de production assistera en chair et en os au moment historique où le 46e président des États-Unis entrera en fonction. Une journée «beaucoup plus calme» en vue selon Thierry Humeau.

«Je pense que les autorités n’avaient pas calculé jusqu’où les supporters de Trump étaient prêts à se rendre le 6 janvier. Maintenant, elles savent quoi faire pour ne pas que ça se reproduise et elles ont agi en conséquence», pense l’entrepreneur, qui ajoute du même souffle que l’accès au périmètre pour assister à l’investiture est «extrêmement» contrôlé et qu’une partie de la ville est carrément «fermée».

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Ce qui manquera le plus à l’entrepreneur cette année est l’aspect festif qu’amène une nouvelle inauguration. «D’habitude, les hôtels sont pleins, les bars et les restaurants débordent, c’est la grosse fiesta. Il y a une atmosphère enlevante à marcher dans les rues. Ce sera beaucoup plus ennuyeux cette fois-ci».

Après quatre années de «catastrophes» avec Trump à la tête du pays, l’Américain d’adoption prodémocrate se dit prêt à tourner la page. «On est arrivé au bout, on a tenu bon. Maintenant, concentrons-nous sur l’avenir!»

Bières artisanales et lumières de Noël pour célébrer

C’est en retournant près de son ancien lieu de travail à deux pas du Capitole à l’occasion d’une balade en vélo avec son fils que Keegan Bursaw a réalisé l’ampleur des forces de sécurité déployées dans sa ville. «J’ai travaillé à l’ambassade canadienne pendant 6 ans et je n’ai jamais vu autant de policiers et de militaires que ça», confie l’ancien responsable des communications originaire d’Ottawa.

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Hummers blindés, soldats avec des fusils d’assaut, autopatrouilles bloquant de grosses artères, le père de famille a eu droit à tout un effrayant spectacle pendant son exercice dominical avec son rejeton. «Toute la planète a vu les images des émeutes du 6 janvier. C’est difficile de vivre ça en tant que résident parce qu’on sait que derrière ça, des gens d’ici souffrent de voir leur ville de la sorte».

«La journée où il a été élu, les gens criaient de joie, klaxonnaient dans leur auto et dansaient dans les rues.»

S’il se désole de voir la capitale sous ce jour peu favorable, Keegan mentionne que depuis que l’élection de Joe Biden a été officialisée, un «poids» semble être tombé des épaules des résidents. «La journée où il a été élu, les gens criaient de joie, klaxonnaient dans leur auto et dansaient dans les rues. Donc je crois que malgré les difficultés qu’on vit en ce moment, la majorité des gens s’appuient sur le fait que l’ère Trump est enfin terminée pour passer à travers».

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Comme beaucoup de ses concitoyens, Keegan se dit prêt à «arracher le plaster» et compte bien célébrer l’événement à sa manière avec sa famille. «Certains de mes voisins envisagent d’allumer leurs lumières de Noël, d’autres vont faire sonner des cloches. De mon côté, je vais boire une bonne bière froide artisanale spécialement faite pour l’occasion à l’effigie de Biden et Harris (la vice-présidente)», confie l’Ontarien.

Si le futur s’annonce plus lumineux, le papa espère que la «mauvaise» réputation associée au fait d’être Américain, qui s’est fortement accentuée avec la présidence de Trump selon lui, ne collera pas à la peau de son petit garçon de trois ans. «Lorsqu’il voyagera autour du monde et qu’il rencontrera des gens, je veux qu’il dise fièrement: “Je suis né à Washington D.C., je suis Américain et j’en suis heureux”».