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Inside the tounes : Les Hôtesses d’Hilaire – Viens avec moi

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La dernière fois que je me suis assis avec Serge Brideau, le leader des Hôtesses d’Hilaire, il m’avait parlé d’une idée folle et intrigante sur laquelle il travaillait : un opéra-rock psychédélique. C’était il y a plus d’un an et l’album concept Viens avec moi, un ambitieux projet de 19 chansons (!) vient tout juste d’être lancé. À l’occasion de la présence du band aux Francofolies de Montréal, on s’est tapé l’album ensemble un samedi soir autour de quelques bières pour en parler.

Lire « pas mal de bières et on a fermé un bar à scotch après ».

En tk…

Parle-nous donc de la genèse de tout ça, cher… comment c’est né?

On savait qu’on voulait faire un album concept. On est allés s’enfermer au B-12, un studio à Valcourt faire une session d’écriture pis on a micro-dosé de l’acide; la dernière fois que j’avais fait ça j’avais 19 ans. Ça a débloqué plein d’affaires. On a écrit au moins 40 idées de chansons, des riffs, des onomatopées à crier… Je savais que je voulais faire de quoi sur la péninsule acadienne. Pour moi c’est une capsule de temps. Y’a beaucoup de monde qui sont jamais sortis de là; ça fait son charme autant que des fois c’est frustrant. Mais c’est beau, et c’est chez nous, et c’est plein de personnages fascinants, plus grands que nature, pis d’histoires. C’t’un univers en soi.

On a micro-dosé de l’acide; la dernière fois que j’avais fait ça j’avais 19 ans.

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Plus tard on a fait des sessions d’enregistrement chez Hilaire, mon père. D’habitude il vit au Mexique l’hiver, mais là y’était là, et le premier matin il est passé devant la gang tout pomponné à 10h AM avec une bouteille de vin dans les mains et il est allé s’enfermer dans son motorisé avec sa blonde. Il a 79 ans, tsé. Ça a un peu impressionné le réalisateur, Pierre-Guy Blanchard, pis il a comme compris pourquoi je tenais à parler de Tracadie, de ce monde-là, et il s’est mis à écrire. On a déliré sur Wilfred de Star Académie, qui vient de la même place que nous-autres; tsé, c’était le premier chanteur acadien connu au Québec depuis Edith Butler! C’était énorme chez nous, vous avez pas idée combien tout le monde a capoté, on existait finalement à la TV… On s’est rappelés de comment ça avait été instrumentalisé, des banques alimentaires vides dans les villages et du monde qui payaient pareil pour appeler aux Productions J. Et on a réfléchi à notre place là-dedans, comment la musique est secondaire aussi par bouts dans cette industrie-là, qu’on soit underground ou pas.

On a écrit tout le scénario d’une shot ce jour-là.

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L’Acadie des terres et forêts

Cette toune-là parle d’Edmunston. Fallait situer les Hôtesses d’Hilaire en début de carrière, et c’est la première place où je me souviens qu’on s’est dits « coudonc, ça va peut-être marcher ce band-là ». On n’avait pas d’amis là-bas et la place était ben pleine. Y’avait un gars sur mes épaules une partie du show, du monde qui savaient toutes les paroles, c’était fou raide. C’est là que l’aventure a vraiment commencé.

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Petit paradis sur le bord de l’eau

Je l’habitais vraiment le petit paradis un moment donné. Deux ans. Pas de voisins, la mer, c’était vraiment beau. Le rêve de tout acadien; acheter une place de même pour une fille et vivre là.

C’est pas arrivé.

Pousser la note

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C’est l’idée de la télé-réalité qui me fait capoter. C’est symptomatique de ben d’autres affaires me semble; la célébrité c’est tout le monde qui rêve de ça astheure. Y’a pas de héros ni de pas bon dans cette histoire-là, c’était ben important pour moi.

All in the Bus

C’est ça faire de la musique : t’arrive dans une ville et t’es leur party de l’année, c’est spécial, ils se crinquent depuis des mois. Et le lendemain, pendant qu’ils se remettent et se racontent leurs souvenirs, toi tu recommences ailleurs.

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Pousser ma note

Mixer ça c’était un travail de moine.

Smell the Money Baby

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Ah pis les entre-tounes c’est des « Glen Thibodeau ». Glen c’est le narrateur de toute l’affaire. C’est ben inspiré de Joe’s Garage, de Zappa.

Post ta shit

Je me suis forcé à écouter La Voix pour faire l’album, pis un moment donné tant qu’à faire je me suis tapé Tout le Monde en Parle. C’était l’émission sur les influenceurs. C’est tout un monde je trouve. La fille qui gagne sa vie en se posant en bikini, qui vient expliquer comment faire semblant de parler au monde comme si c’était tes amis… c’t’épeurant en maudit, pareil.

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L’éveil de Kevin

Je lui ai envoyé la toune et il a répondu comme je m’attendais « tabarnak Serge j’ai 70 ans pis tu m’écrit pour faire de la musique… esti que je trippe. » (rire) Et il est venu en studio. Et il a nailé ça en deux takes, comme un vrai pro !

Microdosing

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Le calvaire de Serge

P’tite clé Bé

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Fuck shit up!

C’est le moment où le power-trip du chanteur tue le band.

Ça arrive quand même souvent.

Comme chum

C’est Mico, notre guitariste, qui chante cette toune-là.

Moi dans l’histoire chuis gone.

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Spread the Love

Mangez tout’ un char

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L’érotisme est mort

Hot Seat

Pour qu’un personnage comme Serge finisse juge à « Pousse ta note », fallait qu’il se passe quelque chose. Qu’il arrête de boire, qu’il change de vie.

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Moi, chaque fois que quelqu’un d’un organisme se présente comme un sauveur qui vient me donner un chèque comme si ça tombait du ciel, je me rappelle que c’est de l’argent des fonds publics et que si je suis pas là, ce gars-là perd sa raison d’être. Parce que souvent, ils te laissent les miettes après que tout le monde se soit payé, après leurs cocktails, leurs voyages pis toute, et ils s’attendent à ce que tu dises merci à genoux… Les artistes existent pas grâce aux fonctionnaires, tsé. Pis c’est jamais un cadeau, recevoir quelques cennes pour autant de travail de la part de monde qui vivent sur ton dos.

J’ai déjà eu cette conversation là avec un animateur de radio qui m’a lancé pendant la pause « tu devrais être reconnaissant, je viens de te donner dix minutes ». Moi je venais de lui donner dix minutes de contenu et une raison pour que le monde écoute son show… c’est un échange, faut jamais oublier ça, me semble.

On travaille ensemble, je travaille pas pour toi, chose.

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Obstacle émotionnel

Ben Bouchard, le réal, a encore beaucoup à voir avec cette toune-là. Il la connait cette industrie-là, tsé. Je pense que ça a été une petite thérapie pour lui, faire cet album-là.

Comme pour nous autres!

***

Mise en scène par le Théâtre du futur (Navet Confit, Olivier Morin et Guillaume Tremblay), avec une scénographie de Michel Fordin, des images de Kevin McIntyre, et la participation, notamment, des Hay Babies, de Anna Frances Meyer (Les Deuxluxes), de Diane Losier et de Robin-Joël Cool, Viens avec moi, l’opéra rock plus grand que nature des Hôtesses d’Hilaire, est une œuvre critique, questionnant la notion de succès, d’authenticité et d’exploitation commerciale, sur fond de rock psychédélique.

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L’opéra-rock en entier sera présenté dans le cadre des Coup de Coeur Francophone au Club Soda le 1e novembre.

En attendant, il sera possible de voir le groupe aux Francos de Montréal ce jeudi avec Galaxie au MTelus.