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Hubert Mansion

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Il y a sept ans, Hubert Mansion a quittĂ© le pays du Manneken-Pis et de Jacques Brel pour la ville de l’Orange Julep et du Grand Antonio. De sa cabane au Canada, il a anatomisĂ© la race 514 pour Ă©crire le Guide de survie des EuropĂ©ens Ă  MontrĂ©al. Sa façon toute personnelle d’aider les cousins en exode dans la mĂ©tropole Ă  ne pas retourner au plus criss dans leur pays.

Pour un EuropĂ©en, qu’est-ce qui frappe en arrivant Ă  MontrĂ©al?
C’est le «calme». C’est une ville sans stress et les MontrĂ©alais sont cools: c’est leur cĂŽtĂ© amĂ©ricain. Le responsable marketing qui arrive au bureau en skate-board, c’est quand mĂȘme moins frĂ©quent en Europe. L’autre aspect de MontrĂ©al est son cĂŽtĂ© bi. D’abord il y a le bilinguisme. C’est fascinant, car ça nous rappelle l’AmĂ©rique des films. C’est aussi une ville de terre et d’eau, car il y a le St-Laurent tout prĂšs qui est un fleuve immense. MontrĂ©al est aussi bi dans le sens qu’il y a l’urbanitĂ© de la ville, mais Ă  50 km de route il y a des ours. Ajoutons le cĂŽtĂ© bisexuel, ainsi que le village gai et cĂŽtĂ© hĂ©tĂ©rosexuel. Et finalement le mĂ©lange de modernitĂ© Ă  la new-yorkaise, en contraste par rapport Ă  des choses beaucoup plus anciennes, sans pour autant ĂȘtre antiques.

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Comme?
Il y a dans cette ville des vitrines de magasins qui, dirait-on, n’ont pas changĂ© depuis les annĂ©es 50. On y trouve des chemises carottĂ©es, des pulls dĂ©modĂ©s, des tas de choses qu’apparemment personne n’achĂšte, car je les vois depuis cinq ans. Il y a encore de vieux barbiers et des restaurants dĂ©passĂ©s oĂč les serveuses ont elles-mĂȘmes dĂ©passĂ© l’ñge d’ĂȘtre serveuse. Pour moi, c’est ça MontrĂ©al et c’est ce que j’aime! Pour le comprendre, il suffit de traverser Sherbrooke d’est en ouest : on change de pays, de temps et de milieu social. C’est sans doute le meilleur parcours pour connaĂźtre la ville.

Comment peut-on reconnaßtre les Montréalais?
En gĂ©nĂ©ral, ils sont en shorts. Il ont souvent un collier autour du cou et du gel dans les cheveux. Ils sont vĂȘtus d’un t-shirt et il ont les poches pleines de trucs. Comme on peut le voir, les MontrĂ©alais ne sont pas assoiffĂ©s de mode : mĂȘme s’il le sont par rapport au reste du QuĂ©bec, il ne le sont pas par rapport Ă  l’Europe.

Et comment sont-il?
Les MontrĂ©alais ont un projet. C’est-Ă -dire qu’ils ne sont pas installĂ©s dans quelque chose: ce sont des gens qui sont toujours dans une mobilitĂ© permanente. Ils sont des individualistes, des dĂ©racinĂ©s sentimentaux Ă  la recherche de paix intĂ©rieure. MĂȘme les gens qui se saoulent la gueule toutes les nuits et fument du pot le sont. Les MontrĂ©alais sont aussi curieux, trĂšs ouverts aux nouvelles idĂ©es, Ă  apprendre, Ă  bouger et Ă  grandir.

Quelles difficultés les Européens rencontrent-ils à Montréal?

Les nouveaux arrivĂ©s ne comprennent pas le type de relations qui s’installe entre eux et les MontrĂ©alais. Ils les trouvent parfois froids, distants, mĂȘme hypocrites. Ils ont l’impression que pour les gens d’ici, une relation doit ĂȘtre utile pour exister. C’est comme une sorte de business relationnel. C’est pourquoi avant d’entamer une amitiĂ©, il y a certainement beaucoup de peur des deux cĂŽtĂ©s. L’EuropĂ©en a peur d’ĂȘtre rejetĂ© par le milieu dans lequel il vit, tandis que le MontrĂ©alais a peut-ĂȘtre peur d’ĂȘtre jugĂ© car il souffre d’un complexe d’infĂ©rioritĂ©.

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Qui est?
Beaucoup de MontrĂ©alais se sentent mal Ă  l’aise par rapport Ă  la facilitĂ© d’élocution des Français et prĂ©fĂšrent ne pas parler plutĂŽt que de passer pour des ignares. Pourtant, encore une fois, il ne s’agit que de codes culturels qu’il faut comprendre pour les dĂ©passer.

Assistante: Caroline Desilets
Peinture: Luc Paradis