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Grosse catastrophe deviendra petites maladresses…
J’ai une confidence à vous faire : bien que je trouvais la comparaison au « 11 septembre » du monsieur interrogé dans ce reportage incroyablement maladroite, je dois avouer que – des jours plus tard et des kilomètres plus loin – le rapprochement a du sens.
Le visionnement maladif, l’oeil rouge et la ‘yeule béante, de ces photos et capsules vidéo, l’écoute de ces bulletins spéciaux et de ses témoignages ainsi que la lecture de bon nombre d’articles, d’opinions et commentaires allant dans toutes les directions a bel et bien des relents de la fameuse attaque terroriste.
Tant qu’à être dans l’aveu, en voici un autre : j’ai beaucoup d’admiration pour ces chroniqueurs et gérants d’estrade qui se risquent sur la place publique, claviers dégainés. Sans blague, j’envie les André Pratte et compagnie qui voguent avec aisance du sujet d’actualité A à la tendance B du jour au lendemain.
Pour tout vous dire, bien que j’apprécie l’espace qu’Urbania me prête chaque lundi, l’exercice demeure aussi lent qu’ardu des années plus tard. Bien que – culture du clic, démocratisation et circulation rapide de l’information obligent -, la majorité des médias font dans l’instant présent, voire futur, je me demande toujours comment certains scribes trouvent le temps de faire toutes leurs recherches pour avoir autant d’opinions en une semaine.
Et, bien évidemment, lorsqu’il est question de catastrophes du genre, l’incompréhension est incommensurable, les émotions sont à fleur de peau et la majorité des données n’a toujours pas été analysée. Les risques d’agir connement sont donc très grands et, malheureusement, le week-end a été riche en commentaires douteux et bourdes qui en disent long.
Alors que la réflexion « apocalyptique » de Mathieu Bock-Côté m’a… surpris (tout comme cette boutade du Navet), la « réaction à chaud » de Lise Ravary – où elle écorche notamment Jean-François Lisée, vante la caricature d’un collègue en plus de laisser tomber un bête « Pipelines 1 – Trains 0 » sans s’expliquer – m’a incroyablement déçu tant on y coupe les coins ronds (si ce n’est pas déjà fait, je vous invite d’ailleurs à lire la décapante version « remixée » du billet par Julien Day). Cerise sur le sundae, Mme Ravary mettait en ligne une nouvelle intervention le lendemain soulignant la multiplication d’avis des « zexperts » qui se prononcent quand « (j)ustement, on ne sait rien de rien » (bonne joueuse, elle confiera tout de même qu’elle aurait « peut-être » dû y aller mollo sur le cas du PQ, “mais bon”.) Un pavé de plus, mais on demeure toujours dans le flou gaussien. « Mais bon », hein!
La palme revient toutefois à Éric Duhaime qui, avant d’afficher un statut Facebook à la vue de ses dizaines de milliers de contacts et abonnés, semble avoir scruté une boule de cristal qui lui a transmis cette révélation : la visite d’Amir Khadir à Lac-Mégantic serait, en fait, une occasion pour « propager son parti-pris anti-pétrole ». Faut quand même le faire! Se servir d’une tragédie – et d’un univers parallèle – pour planter un adversaire idéologique en l’accusant de faire de l’opportunisme. Car, évidemment, dans notre réalité, Amir Khadir ne s’est pas lancé dans une telle tirade. Il a abordé la question des produits pétroliers – comme bon nombre de commentateurs -, bien sûr, mais a surtout exigé des réponses ainsi que des moyens de prévenir ces incidents.
La médaille d’argent, elle, sera remise à cet utilisateur de Reddit qui – sans aucune preuve, ni piste – a lié l’accident à une manigance du gouvernement Harper afin de « blesser » une région qui ne l’appuie pas, en plus de mousser la fameuse sécurité des pipelines. Et si c’était un coup des Illuminatis (d’où l’illustration de ce billet de blogue, en effet), un coup parti?
Alors que plusieurs reprochaient au premier ministre à la coiffure Lego son manque de subtilité en annonçant carrément sa visite à Lac-Mégantic comme une « photo opportunity », les bonzes de Montreal, Maine & Atlantic Corporation lui ont fait toute une faveur en ajoutant une nouvelle gaffe à leur inventaire en servant à la population francophone un communiqué non seulement plaignard – l’enquête publique nous empêche de faire avancer la nôtre! Bouhouhou! -, mais également traduit par Google Translate. Disons que si le conglomérat voulait passer pour une entité responsable et attentive aux détails, c’est foutrement loupé…
Bref, c’est sûrement un peu bête, voire un peu pissou, mais dans de tels cas – surtout lorsque je vois tant d’intellectuels se casser la gueule – je préfère ranger mon clavier au profit de mon porte-monnaie. Après tout, il ne faut pas s’leurrer, la plupart des opinions, théories et diatribes de petits et grands penseurs valent à peine deux sous quand il est question de tragédies du genre, autant investir ses pesos ailleurs.
Justement, la Croix-Rouge recueille actuellement de l’argent pour Lac-Mégantic. Cliquez ici pour avoir plus de détails et, surtout, pour donner quelques dollars.