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Gabrielle Boulianne-Tremblay : apprendre sur l’humain

L'écrivaine et comédienne nous parle création.

Par
Vanessa Duval
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Vanessa Duval est directrice artistique, designer et rĂ©dactrice. Elle a fondĂ© le Studio Couleur Vive il y a quelques annĂ©es et quand elle nous a proposĂ© de nous faire dĂ©couvrir, Ă  travers un petit questionnaire, des crĂ©atrices et des crĂ©ateurs qu’elle aime et dont elle admire le travail, on a dit : « ben oui, c’est sĂ»r! Quand est-ce qu’on commence? » Cette semaine, c’est avec la comĂ©dienne et Ă©crivaine Gabrielle Boulianne-Tremblay, qu’on a notamment pu voir dans Ceux qui font les rĂ©volutions Ă  moitiĂ© n’ont fait que se creuser un tombeau, avec qu’elle s’est entretenue.

Comment décris-tu ton travail à ta mÚre ?

Ma mĂšre, c’est la premiĂšre personne qui m’a encouragĂ©e dans mon parcours que je voulais atypique. Ça ne l’a pas du tout surprise quand elle m’a vu sur mon ordinateur Ă  onze ans en train d’écrire mon premier roman (de science-fiction). Quand je participais Ă  des piĂšces de théùtre pour l’école, elle trainait sa camĂ©ra et on avait bien du plaisir Ă  regarder ça en famille.

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Elle a toujours su que j’étais fascinĂ©e par la langue française, le théùtre, le cinĂ©ma, que j’avais une imagination dĂ©bordante, je n’ai pas besoin de lui expliquer mon travail. Elle a cultivĂ© ma passion d’apprendre, bien que j’aie dĂ©crochĂ© l’école (Ă  la premiĂšre session de cĂ©gep), je me suis toujours intĂ©ressĂ©e Ă  une plĂ©thore de sujets. Être assise derriĂšre un pupitre en plus avec de la dysphorie de genre en bas de page, ne m’a pas aidĂ©e Ă  poursuivre mes Ă©tudes, mais dans un autre sens j’y ai trouvĂ© une force, celle d’apprendre Ă  me dĂ©brouiller par mes propres moyens, celle d’ĂȘtre plus crĂ©ative.

Je dirais qu’elle sait que pour moi, l’écriture, le jeu, c’est vital, essentiel, crucial pour mon Ă©panouissement en tant qu’humaine. C’est comme ça que j’apprends sur l’Humain. C’est aussi ma plus grande fan, qui m’appelle chaque fois qu’elle me voit Ă  la tĂ©lĂ©vision ou qu’elle lit un de mes articles. Ça m’émeut. Longtemps j’ai eu l’impression de faire honte Ă  mes parents parce que je n’étais pas le fils qu’ils attendaient, mais plutĂŽt une fille. Mais que j’ai Ă©tĂ© un gars ou que je sois une fille aujourd’hui, elle m’épaule dans tout, elle embarque dans mes projets fous! Je plonge, mais ça m’arrive d’hĂ©siter avant, elle, non. Je crois qu’elle est plus badass que moi.

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Quels projets portant ta signature peut-on voir dans la ville ?

Hummm, on peut se procurer le film « Ceux qui font les rĂ©volutions Ă  moitiĂ© n’ont fait que se creuser un tombeau » le film au titre aussi long que sa durĂ©e. C’est un film qu’il est nĂ©cessaire de voir, ne serait-ce que pour rĂ©veiller la poĂ©sie en dormance en nous. Il ne faut pas le voir comme le film du Printemps Érable, ce n’est pas ça, c’est un pivot qui pousse Ă  rĂ©flĂ©chir sur le sens que l’on donne Ă  nos actions, pourquoi nous les posons ou pas. C’est un film miroir qui nous renvoie le portrait d’une sociĂ©tĂ© qui gagnerait Ă  s’épanouir davantage. Si on a un budget limitĂ©, on peut soit le louer sur YouTube ou mĂȘme le louer Ă  la BANQ. J’y campais le rĂŽle d’une femme trans. Ça m’a permis d’avoir une voix, ça m’a permis de faire du bien Ă  ma communautĂ© en pouvant parler d’une façon dĂ©dramatisĂ©e dans les mĂ©dias, ça m’a permis de me guĂ©rir aussi. Donc, never forget, comme on dit.

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Il y a aussi Les Secrets de l’Origami, mon recueil de poĂ©sie. On peut aussi l’emprunter Ă  la BANQ si jamais. Un recueil oĂč je « fais dur, mais au moins je fais quelque chose » (j’arrive pas Ă  croire que je me quote moi-mĂȘme) mais l’essence du recueil se retrouve dans cette phrase. Je crois que la poĂ©sie vit un bel essor en ce moment, et ça me rĂ©jouit de faire partie de ce mouvement.

Sinon en 2020 on pourra se procurer mon roman qui verra le jour chez Marchand de Feuilles. La date de sortie reste Ă  confirmer (ce n’est surtout pas une plug pour qu’on me suive sur Instagram ou Facebook). J’en suis encore Ă  travailler dessus. Je bĂ»che avec un acharnement que je ne me connaissais pas. Parfois ça m’amuse de penser que la littĂ©rature, c’est tout sauf de la littĂ©rature, c’est de la sculpture, c’est de la danse, c’est de l’orfĂšvrerie, c’est de la musique, c’est de la peinture. Avec le roman, j’en ai pris un peu plus conscience.

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J’aime aussi la photographie. RĂ©cemment, une des photos d’une session avec le photographe engagĂ© Yannick Fornaciarri s’est retrouvĂ©e sur le site de Vogue Italia. Je capotais un peu c’était tellement surrĂ©aliste, mais c’est une photo qui passait un message, ce n’était pas gratuit. (On peut se rendre sur mon IG pour y lire le message). Ce n’est pas mon genre de faire des trucs qui n’ont pas de signification. La photographie, c’est une autre façon d’avoir un discours, plutĂŽt un dialogue.

Comment as-tu su que tu voulais ĂȘtre crĂ©atrice ?

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Oh ça, je l’ai toujours su, mais comment c’est arrivĂ© je ne m’étais jamais posĂ© la question. Je crois que c’est parti avec des papillons dans le ventre quand j’ai incarnĂ© Le Petit Prince Ă  mon Ă©cole primaire. J’étais fascinĂ©e par le fait que l’on pouvait passer des messages en Ă©tant quelqu’un d’autre et qu’en plus, ça nous renvoyait Ă  notre propre identitĂ©. Bien sĂ»r la poĂ©sie et la philosophie contenue dans cette Ɠuvre me faisaient vibrer. Quand j’ai lu mes premiers livres aussi, je me disais « oh, je veux en faire, je veux faire voyager les gens tout comme je voyage sur ce banc de parc en ce moment oĂč je suis en train de lire un livre. » Pour moi, la crĂ©ation c’est de la magie, c’est de l’alchimie, et je crois qu’il y a une sorciĂšre ou un sorcier qui sommeille en chacun de nous. Je suis heureuse de l’avoir su tĂŽt dans ma vie.

Selon toi à quoi sert la création ?

Je crois qu’elle sert Ă  l’évolution des consciences. Elle sert Ă  nous faire rĂ©flĂ©chir. Ça fait voyager, c’est nourrissant. La crĂ©ation nous sert Ă  nous sentir vivants, Ă  devancer la mort (de l’ñme). C’est ce qui tient en vie. C’est ce qui nous permet d’ĂȘtre des deux mondes : Ă  la fois terriens et cĂ©lestes.

Y a-t-il un sujet récurent dans tes créations ?

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Oui, assurĂ©ment : les relations amoureuses/interpersonnelles et l’anthropologie de l’amour. Dans mon recueil de poĂ©sie par exemple, il y a le deuil amoureux qui est abordĂ©. Je suis une fille qui vit la vie Ă  cent mille Ă  heure et je crois que les gens comme moi, on peut ĂȘtre trĂšs endeuillĂ©s Ă  cause de ça. Ces thĂšmes-lĂ , je dirais que ça me fascine, avant mĂȘme que je sache jouer, que je sache Ă©crire, je dirais que c’est ça qui revient comme l’écho d’un cri primal qui sans cesse revĂȘt une autre tonalitĂ©, un autre vĂȘtement. L’humain et sa psychĂ© me fascinent, c’est un poĂšme Ă  réécrire sans cesse. Au final, peu importe ce que j’écris, je pense que c’est le mĂȘme cri qui revient dans mes textes ou dans ma façon de jouer Ă  la camĂ©ra : celui de la naissance, de l’entrĂ©e percutante au monde.

Le mot que tu aimes?

En fait, il y en a deux. D’abord, le mot « mignon » parce que c’est vraiment mignon comme mot. Et aussi « pourpre » parce que quand on le prononce Ă  voix haute, on dirait qu’on donne deux bisous avec nos lĂšvres. #romantiquefinie

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