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Faut-il bannir les Mini-Miss?

Par
Pascal Henrard
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Alors que la France vient d’interdire les concours de beauté pour les moins de seize ans, au Québec, comme d’habitude, on est pour, mais on est contre.

Je lève pour vous le voile sur cette affaire qui est en train, elle aussi, de déchirer le Québec.

D’un côté, les aficionados de la superficialité, les amateurs de gamines gominées et les esclavagistes (selon leurs détracteurs) de l’image surfaite. De l’autre, les féministes égalitaires, les parents gardiens de l’insouciance des enfants et les sensés de l’humanité.

En France, si tu organises un concours de beauté de bébé, tu es désormais passible de deux ans de prison et de 30 000 euros d’amende. Au Québec, au pire, tu te fais publier dans le Journal de Montréal, au mieux tu défiles à Laval.

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Je ne sais pas vous, mais moi, que ce soit avec des gamines de six ans, des donzelles de 19 ou des mamys de 63, tous les concours de beauté me font gerber… Bon OK, #jeudiconfession, je m’émoustille un peu en voyant les filles en maillot numéroté se déhancher sur les scènes suréclairées de Miss Tropical, mais en général, une fois qu’elles ouvrent la bouche, je débande. Fin de la parenthèse machiste.

Ancêtres de la télé-réalité qui élimine au compte-goutte les crétins pour élire des débiles, les concours de beauté n’ont jamais vraiment fait dans la valorisation intellectuelle et l’amélioration du sort de l’humanité. Même en prétendant que c’est la personnalité qui est évaluée, il faut bien avouer que la personnalité se situe plus souvent en dessous du maillot que sous le chignon. En général, pour gagner, le maquillage fait plus d’effet sur le jury que la connaissance de l’œuvre de Simone de Beauvoir.

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Cette exacerbation de l’image corporelle travestit la réalité et déforme le naturel qui ne reviendra plus jamais au galop. Alors imaginez quand ça commence à 6 ans…

Comment croyez-vous que les poupounes encore pouponnes se sentent en participant à des concours comme Mini-Miss? Et celles qui les regardent avec envie, que pensez-vous qu’elles pensent? Est-ce que ce genre de mise en marché de la beauté préfabriquée reflète nos (attention au gros mot) valeurs?

Une pétition dénonce cette sexualisation à outrance des plus jeunes. Vous pouvez la signer ici.

Mais ne devrait-on pas aussi s’interroger sur la marchandisation de l’apparence de tous les humains en général? Les concours de beauté pour adultes sont-ils meilleurs pour notre santé mentale? Les émissions de télé spécialisées qui exhortent la perte de poids, prônent le changement de look, cherchent la perfection à tout prix ou encouragent la surconsommation de produits de beauté artificielle sont elles plus éthiques pour notre moral (j’ai pas dit « morale ») ?

On peut se poser bien des questions sur la vie qui nous entoure et la façon dont les autres la vivent. Mais de quel droit pouvons-nous les empêcher de la mener comme bon leur semble? Parce que ça ne fait pas partie de nos (encore le gros mot) valeurs?

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Remarquez l’ironie. D’un côté, on veut bannir les concours de grimage et de déguisement et de l’autre on veut se convaincre que le port du voile religieux est anodin. Il y a des fois, j’ai envie de devenir trappeur.

Photo de John Londono : couverture du numéro Urbania spécial bébé