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L’Halloween est finie, enfin on peut se mettre à chanter des chansons de Noël et guérir certaines personnes de leur noëlophobie.
Depuis quelques années, probablement depuis toujours, il semble de bon ton de chialer contre le temps des Fêtes qui arrive, pour certains, trop brutalement au lendemain de la fête des morts, parfois très exactement le 1er novembre.
Alors que les enfants se battent encore pour les derniers klendacks et grouillent de sucre dans leur lit, l’épicerie du coin tasse les citrouilles et fait place aux lumières de Noël. La première neige n’est pas encore tombée que déjà on entend une version jazz acoustique de Frosty The Snowman au Starbucks, où l’on peut déguster pour la saison un latte au pain d’épices à 320 calories.
Personnellement, je capote.
J’adore tout ce qui est associé à Noël : l’odeur du sapin, l’activité de décorer le sapin, le disque Ginette Reno chante Noël, jouer Ave Maria au piano, le lait de poule et le vin chaud, le retour des clémentines à l’épicerie, les calendriers de l’Avent, les faux Pères Noël, les lumières sur les artères commerciales, le panettone, les marchés de Noël, les versions techno de chansons traditionnelles dans les centres d’achat, le magasinage frénétique, les poinsettias, l’attente de la première neige, et, comme une cerise sur le gâteau de tout ça : le pain surprise de ma grand-mère, enrobé d’un pouce de fromage à la crème, servi le soir de Noël.
Je soupçonne ceux qui chialent contre le temps des fêtes d’être soit 1. d’éternels chialeux qui chialent aussi quand vient l’été, donc ceux-là ne comptent pas, 2. des chialeux d’occasion, qui chialent par mimétisme de ceux qui appartiennent à la prochaine catégorie, soit 3. les chialeux de gauche qui saisissent n’importe quelle occasion pour dénoncer les abus du capitalisme sauvage et les dérives environnementales associés à ce temps de réjouissance (l’utilité de cette catégorie étant bien sûr de mettre le feu aux poudres et de semer un peu de controverse dans ce texte qui en est dépourvu). Mais la plus grande proportion de chialeux, je les soupçonne réellement d’être 4. des nostalgiques non assumés en raison d’une enfance refoulée : des noëlophobes.
Permettez-moi de m’attarder plus longuement sur cette catégorie, puisqu’elle est loin d’être banale et que la ligne est mince entre celle-ci et sa version extrême que je n’ai pas évoquée encore : les grincheux pleins de vinaigre.
Les nostalgiques qui ne s’assument pas risquent de devenir d’éternels rabat-joies, mais surtout, de vivre malheureux le restant de leurs jours et de développer une maladie qu’on ne nommera pas puisque ce serait culpabilisant pour tous ceux qui en sont atteints.
La source de leur chialage provient du fait qu’au fond, ils aiment bien la période des Fêtes et tout ce qui y est associé, mais ont peur que cet attachement à une réjouissance très profondément ancrée dans leur enfance ne révèle leur enfant intérieur, ou pire, leur haut degré d’immaturité. Se sentant hors norme, la norme étant de chialer quand approche le temps des Fêtes, ils craignent l’inadéquation sociale.
J’ai déjà fait partie de cette catégorie de personnes, à l’adolescence, cette période où l’on n’assume pas certains éléments associés à l’enfance et où l’on fait tout pour avoir l’air sérieux et au-dessus de tout (pour ma part, l’année où j’ai donné tous mes vieux toutous aux pauvres). Mon affranchissement de cette étape de vie m’autorise à pointer du doigt ceux qui n’en sont pas encore sortis et à leur donner des leçons de vie. Car je remarque que certaines personnes ma foi très adultes en sont encore à cette étape : j’en vois même qui, passé 30 ans, sont encore gênés d’être vus avec leur mère, mais c’est une autre histoire.
Je proposerai donc un exercice de visualisation très simple qui permettra aux noëlophobes de se départir de leur anxiété du temps des Fêtes. Assoyez-vous donc confortablement et fermez les yeux. Rendus là, vous voudrez peut-être demander à une personne de qui vous êtes proche de lire le reste de l’exercice avec sa plus belle voix de yoga.
Prenez une grande respiration. Pensez à vous quand vous étiez petit, devant l’arbre de Noël. Rappelez-vous l’excitation qui s’emparait de tout votre être à la vue de cet arbre qui symbolisait tous les cadeaux que vous déballeriez dans quelques jours. Rappelez-vous qu’à cette époque, vous n’aviez pas le fardeau d’en acheter, simplement d’en recevoir.
Maintenant, retournez-vous. Dans votre tête, je veux dire. Derrière l’arbre, il y a vous, adulte, qui bougonne les bras croisés et qui grommelle des phrases comme «maudit temps des Fêtes», ou «j’aime pas ça Noël». Parlez à votre Schtroumpf grognon. Dites-lui pourquoi vous, vous aimez Noël. Rappelez-lui votre chanson préférée (moi, c’était Le p’tit renne au nez rouge).
Maintenant, revenez dans votre corps d’adulte. Pensez à tout le chemin que vous avez parcouru depuis l’enfance. Vous êtes une personne vraiment différente aujourd’hui. Plus personne, sauf vous peut-être, ne se rappelle des niaiseries que vous avez dites dans votre enfance, par exemple, la fois où vous avez dit à votre prof de piano que vous vouliez jouer «Le p’tit renne au nez rouge» au récital d’été. Maintenant, vous savez qu’il s’agit d’une incongruité. Embrassez votre enfant intérieur de façon adéquate, puis rouvrez les yeux.
Comment vous sentez-vous?
Super. Parce que maintenant, vous êtes un adulte et, si je me fie à l’an passé, vous n’avez pas encore acheté vos cadeaux et vous vous retrouverez à courir dans les magasins à la veille de Noël, payant trop cher pour des articles trouvés à la dernière minute. On en reparlera à la prochaine séance.