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On se souvient tous de son Rap à Billy, mais on oublie parfois que le poète Lucien Francoeur a aussi été professeur de littérature et de français au cégep de Rosemont durant 32 ans. Frais retraité de l’année dernière, que pense-t-il aujourd’hui du milieu de l’éducation?
Ce texte est extrait du Spécial ÉTUDIANTS, en kiosque dès maintenant ou disponible en version PDF sur la Boutique Urbania
Pourquoi as-tu pris ta retraite?
Parce que j’en avais plein mon casque de la maudite bureaucratie pis des grilles de correction qui finissent plus! Et parce que j’étais écœuré. Pas des étudiants, là, bien qu’ils ne soient pas faciles ! Ils sont dans la mutation complète, celle qui les fait passer d’étudiants analogues, ceux qui écrivaient encore avec un crayon, à étudiants numériques, qui sont, eux, dans le virtuel.
Il est où, le problème, avec cette mutation?
C’est que cette génération est la première à avoir été élevée sans toucher un vinyle et qui n’achète pas de livres parce qu’on peut les trouver sur Internet. Ça donne des gens qui sont équipés dans une classe comme s’ils étaient dans une navette spatiale, tsé, pis le professeur, c’est un troglodyte avec une brosse et une craie! Là, on est dans le pire, on est dans la transition : on voit le passé — qui fonctionnait — se saborder et le présent qui est en train de jeter le bébé avec l’eau du bain. On ne sait plus comment sizer les étudiants.
Tu t’es senti dépassé?
En fait, moi, je m’ennuie des élèves qui aimaient apprendre et même de ceux qui ne comprenaient rien aux cours, mais qui étaient quand même un peu intéressés. Avec le recul, je me dis que j’aurais dû faire certaines affaires différemment. En faire plus pour me faire plaisir, être plus sévère envers les teignes, mais moi, je suis un humaniste, hein! Il faut former des citoyens, sinon, on forme des robots. Tellement qu’à Silicon Valley, là où on pense toute la technologie, les dirigeants des entreprises envoient leurs enfants dans des écoles où on utilise uniquement du papier et des crayons. Parce que ça fonctionne. Avant de travailler avec des outils technologiques, il faut savoir travailler tout court. Autrement, on forme des impatients qui trouvent que tout ne va pas assez vite, parce qu’ils ont accès constamment à Internet.
As-tu des exemples de solutions?
Revenir à des classes plus homogènes : des faibles avec des faibles, des forts avec des forts. Sinon, le faible est terrorisé par le fort, et le fort est ralenti par le faible. Et les réseaux sociaux… Moi aussi, j’ai ces affaires électroniques-là, mais je sais me servir d’autre chose.
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