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Et si Donald Trump était le coup de pied au cul dont on avait besoin?

Par
Stéphane Morneau
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Nous y sommes presque, dans quelques jours Donald Trump changera sa carte d’affaires qui passera de «president elect» à «Mister president».

C’est palpable, un climat de peur s’installe. On craint le pire avec le Donald à la présidence. Ce changement de garde chez nos voisins du sud a de quoi nous inquiéter et c’est difficile d’être rassuré par les discours qu’il tient. La peur de l’inconnu, du changement, est concrète.

Ceci dit, là où les choses pourraient être réellement différentes, et c’est là que j’essaie de ranger mon cynisme dans mes poches, c’est dans notre envie d’unifier nos voix pour opérer un réel changement à la suite de cette nouvelle réalité, que sera la présence de Donald Trump dans la chaise la plus puissante du monde.

Donald Trump, comme Philippe Couillard au Québec, nous chante les louanges de sa victoire politique.

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Et ce, même si une majorité d’électeurs n’était pas en faveur de le voir au pouvoir. N’est-ce pas là une maudite belle opportunité de remettre en question notre appareil politique? Notre façon de voter? La pertinence même d’avoir des partis, des chefs de partis et des élections articulées autour de ces entités souvent immuables, interchangeables et sans réelles possibilités de changements?

Et si Donald Trump, avec toute sa bruyante bêtise, était l’artisan d’un réel changement malgré lui?

Et s’il devenait la goutte de trop qui ferait déborder le vase de notre indignation? Et si on l’utilisait comme ultime exemple de «quoi ne plus faire» dans notre société pour s’élever au-dessus de nos mauvaises habitudes?

Vous avez peur de Donald Trump parce qu’il est grossièrement stupide, mais moi j’ai espoir qu’il allume quelques lumières chez les plus endormis d’entre nous.

Ce qui m’inquiète, cependant, c’est qu’on est resté de glace devant les Charest, Vaillancourt et Gérald Tremblay de notre politique. Bon, il y a eu des petites grognes passagères, mais nous avons encore de très nombreux exemples que la politique ne sert que les politiciens et on ne cherche pas à casser le moule. On espère encore qu’avec les bonnes personnes en place, de belles choses se produiront.

Changer les politiciens ne changera pas la politique et changer le président des États-Unis ne changera pas le monde.

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C’est affreusement défaitiste comme constat, mais c’est plus fort que moi. La machine est tellement lente, grosse et tentaculaire que les changements sont improbables. Nous avons des variations sur un même thème. Les riches sont riches, les pauvres restent pauvres et les laissés-pour-compte regardent de l’extérieur sans porte d’entrée.

C’est surtout de ça que j’ai peur – le changement est long à opérer.

C’est Falardeau qui avait piqué cette citation à un inconnu pour titrer l’un de ses bouquins : «les bœufs sont lents, mais la terre est patiente.» Le hic, c’est que la patience s’effrite quand les bœufs ne travaillent plus à labourer la terre. Ici, les bœufs se font des «high-five» en traitant les femmes comme une sous espèce et nous attendons les fruits de leur labeur.

Sauf que ça ne viendra jamais tant qu’il n’y aura pas un désir de partage et d’équité. Ça se manifeste dans l’évasion fiscale, dans l’écart entre les classes, dans la gentrification et dans plein d’autres choses. Ça se manifeste aussi dans la nomination d’une coquille vide à la présidence américaine qui s’autoproclame l’agent du changement alors qu’il est la personnification crasse d’un statu quo lourd et oppressant.

Je n’ai pas peur de Donald Trump, j’ai peur des gens qui vont l’instrumentaliser pour servir leurs plus bas instincts.

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J’ai surtout peur des gens qui de toute façon trouveraient une façon d’être intolérants, bêtes et méchants, comme ils le démontraient très bien au quotidien bien avant la vague orange aux États-Unis.

Dans le fond, Donald Trump c’est comme une poussée d’acné sur le nez avant un rendez-vous galant. Tu le sais que la chose à faire est de le laisser tranquille et d’attendre que ça passe, mais c’est plus fort que toi, tu veux crever le bouton même si ça veut dire qu’un autre viendra prendre sa place le lendemain en plus de laisser une vilaine cicatrice.

Soyons patients et laissons-nous le temps d’évacuer organiquement les boutons en montrant l’exemple. Faire la bonne chose, encourager l’inclusion, l’écoute de l’autre et rallier des gens à la cause, au lieu d’essayer de crier plus fort que les idiots qui maîtrisent déjà le cri assourdissant comme arme de ralliement.

Pour lire un autre texte de Stéphane Morneau : « On a les politiciens qu’on mérite ».

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