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Est-ce que la troisième guerre mondiale est à nos portes?
Pendant que Jay Du Temple perdait son mojo comme Samson en se rasant les cheveux devant 10 000 personnes et qu’un mouvement de solidarité de niveau «Notre-Dame de Paris passe au feu» s’organisait autour du gars des annonces d’A&W, des choses sérieuses se passaient ailleurs dans le monde, un peu sous le radar.
Au Moyen-Orient, plus précisément, en marge de l’assassinat par drone d’un général iranien vraiment big par les États-Unis vendredi dernier.
Voici donc un genre de «la crise irano-américaine (oui, ça se dit) pour les nuls» pour vous mettre à jour si c’est pas encore fait.
D’emblée, l’attaque américaine qui a fauché le général iranien Qassem Soleimani, mais aussi un chef militaire irakien et plusieurs personnes qui prenaient part à leur convoi pris pour cible, ne sort pas de nulle part.
C’est disons un gros step dans l’escalade de tensions qui prévaut depuis des dizaines d’années entre les deux pays.
L’Iran a annoncé la reprise de son programme nucléaire, même si le pays assure qu’il se soumettra quand même aux contrôles de l’Agence internationale de l’énergie atomique.
« L’Iran et les États-Unis appuient depuis longtemps des camps adverses dans plusieurs conflits et l ’enjeu est toujours le même : qui aura l’influence au Moyen-Orient », résume Julie-Pier Nadeau, chercheure à l’Observatoire sur les États-Unis à la Chaire Raoul-Dandurand.
En fait, on pourrait affirmer qu’une sorte de guerre froide régnait déjà entre les deux puissances (au sens nucléaire du terme), qui s’exprimait à coup de roquettes sur des bases américaines d’un bord et de sanction économique de l’autre.
Quelques promesses de paix avaient été faites, notamment par la signature d’un accord international sur le programme nucléaire iranien en 2015 à Vienne.
L’Iran avait alors accepté d’appliquer drastiquement les breaks sur ses activités nucléaires en échange d’une levée d’une partie des sanctions économiques internationales contre son pays.
Ces belles intentions auront duré jusqu’en 2018, lorsque les États-Unis se sont retirés de l’accord de Vienne.
Depuis l’assassinat du général iranien – un véritable héros de guerre aux yeux de la population – l’Iran a annoncé une nouvelle phase de la réduction de son engagement en matière nucléaire.
Traduction #1 : l’Iran a annoncé la reprise de son programme nucléaire, même si le pays assure qu’il se soumettra quand même aux contrôles de l’Agence internationale de l’énergie atomique.
Traduction #2 : L’envoi d’une délégation pour s’assurer que tout le monde porte un casque et des bottes à cap d’acier dans des usines de transformation d’uranium n’empêchera pas l’Iran de menacer de rayer de la carte Israël et toutes les autres places qui sont chummy chummy avec les États-Unis si tout ce beau monde fait trop chier la république islamique.
Des représailles à prévoir
Un général proche de l’ayatollah a d’ailleurs déjà promis des représailles contre des cibles militaires américaines et leurs alliés. Donald Trump a répliqué en évoquant l’attaque de 52 sites iraniens, dont plusieurs sites culturels, ce qui serait considéré comme un crime de guerre. « Il faut prendre avec un grain de sel ce que Trump avance sur Twitter », nuance Julie-Pier Nadeau, reconnaissant au président américain un talent indéniable pour jeter de l’huile sur le feu.
Le chiffre 52 est sinon hautement symbolique, puisqu’il correspond au nombre de citoyens américains pris en otage à Téhéran en 1979.
Comme si les choses n’allaient pas assez mal comme ça, voilà que le parlement irakien a voté dimanche en faveur de l’expulsion des troupes étrangères sur leur sol, visant d’abord les 5200 soldats américains déployés depuis six ans pour lutter contre l’État islamique.
La marde est pognée là aussi et des roquettes se sont abattues près de l’ambassade américaine de Bagdad peu de temps après le vote du parlement.
« Non à l’Amérique! », ont d’ailleurs scandé plusieurs élus du parlement, ce qui a le mérite d’être assez clair merci comme message. Après ce vote, Donald Trump a aussitôt menacé l’Irak de « très fortes sanctions » si ses troupes se faisaient kicker out du pays. Hier, ils ont annoncé leur retrait « par erreur » avant de changer d’idée dans la journée.
Bref, la marde est pognée là aussi et des roquettes se sont abattues près de l’ambassade américaine de Bagdad peu de temps après le vote du parlement.
De général à martyr?
Quelques mots maintenant sur Qassem Soleimani, le général assassiné, dont la mort a mis le feu aux poudres et risque de l’élever au rang de martyr.
La chercheure à l’Observatoire sur les États-Unis à la Chaire Raoul-Dandurand parle de quelqu’un de très respecté et d’une figure importante en Iran mais aussi en Irak et au Liban, où il commandait des groupes.
Ce militaire au passé prolétaire s’est bâti une réputation par ses faits d’armes durant la guerre Iran-Irak en 1980.
Considéré comme un terroriste par les États-Unis, Donald Trump déclarera sur Twitter que le monde est un endroit plus sécuritaire depuis sa mort.
Reconnu comme un brillant tacticien, il a ensuite gravi les échelons rapidement pour devenir en 1997 le chef de la Force Al-Qods, les forces spéciales des Gardiens de la Révolution. En 2003, au début de la guerre en Irak, il dirigeait un réseau de milices pro-iraniennes contre les forces américaines, avant d’être dépêché dans plusieurs pays pour superviser des batailles les années suivantes.
Considéré comme un terroriste par les États-Unis, Donald Trump déclarera sur Twitter que le monde est un endroit plus sécuritaire depuis sa mort.
Des milliers de personnes ont manifesté dans les rues à Téhéran au lendemain de son assassinat et un deuil national de trois jours a été décrété par le régime iranien.
Et la suite?
À quoi peut-on s’attendre maintenant? Doit-on se creuser un bunker dans notre cour et renouer avec notre ami survivaliste un peu bizarre?
« Il faut quand même tempérer le #worldwar3 », souligne Julie-Pier Nadeau, d’avis que l’éventualité d’une guerre ouverte contre les États-Unis reste bien peu probable, puisque les Iraniens ne font pas le poids militairement.
La situation est néanmoins préoccupante et l’Iran va très certainement réagir pour ne pas perdre la face. Bref, la table est mise pour un clusterfuck de niveau olympique. « Ça dépend de ce que l’Iran décide de faire, la balle est un peu dans leur camp. Le terrain est très explosif et l’enjeu est complexe », résume Mme Nadeau, qui qualifie « d’important » le niveau d’escalade à prévoir.
En attendant la suite des choses, le bras de fer se poursuit, dans un climat de grande incertitude.
Ah oui, et il y a des feux en Australie aussi.
Si vous voulez en savoir plus, voici quelques articles qui résument presque aussi bien que moi la situation :