.jpg)
Espoir et tie-wraps : récit d’une virée d’affichage électoral avec le Parti québécois
Est-ce la dernière élection du Parti québécois?
C’est la rumeur qui papillonne au-dessus de la campagne qui s’annonce charnière pour le parti. Formation phare de l’échiquier provincial depuis sa fondation par René Lévesque en pleine Révolution tranquille, le parti bélier du souverainisme est aujourd ’hui à la croisée des chemins, ayant quelque misère à séduire une génération dubitative à l’identitarisme d’hier.
Avec 9% des intentions de vote et la moitié moins chez les jeunes selon un récent sondage, ce déclin évident a de quoi faire pirouetter Ti-Poil dans sa tombe.
Que s’est-il passé?
Pour mieux saisir l’engagement de la fibre péquiste actuelle, j’ai retrouvé Hans Bessette-Morin et Alexis Bastien, deux fidèles du parti qui m’ont gentiment accueilli pour une virée d’affichage dans la circonscription de Rosemont, où se présente le candidat Pierre-Luc Brillant, oui oui, le grand frère méchant dans C.R.A.Z.Y.!
.jpg)
Est-ce que l’acteur bouclé de District 31 pourra redonner Rosemont aux péquistes, cet ancien bastion perdu en 2018 aux mains du solidaire Vincent Marissal? Le comédien-musicien réussira-t-il à faire un Pierre Curzi?
La tâche s’annonce ardue.
Dans Rosemont, les sondages placent le PQ au troisième rang avec une projection de 17% des crochets aux urnes. Le député sortant Vincent Marissal, de QS, est en tête à 33%, suivi de près par Sandra O’Connor de la CAQ avec 29%. Jamais facile d’affronter l’ennemie jurée de Skynet.
Qui sait? Peut-être que l’opération d’affichage aura l’effet escompté, nous sommes, après tout, qu’au début des hostilités.
.jpg)
Hans décrit Pierre-Luc Brillant, 44 ans, comme un jeune politicien super disponible qui croit en l’indépendance pour les bonnes raisons et peut bien représenter les intérêts citoyens de Rosemont. « C’est rafraîchissant d’avoir un artiste comme candidat et la réception est vraiment bonne », avance-t-il en sortant les affiches de sa berline.
.jpg)
Fin communicateur, Hans est résident du quartier depuis quelques années. À 37 ans, il est le président du parti pour la circonscription, chargé de compte chez Desjardins et membre du PQ depuis belle lurette. « Mon numéro de carte est assez vieux pour mon âge », avoue en ricanant le natif de l’Outaouais à l’optimisme intarissable.
Notre collègue pour la veillée, Alexis, 16 ans, aimerait bien voter, mais il doit d’abord terminer son secondaire 5. Le jeune homme est représentant jeune du parti dans Rosemont et affilié à la cause depuis deux ans. « Mes parents ont voté OUI, mais l’intérêt à la politique est venu de moi », affirme l’étudiant de Ville-Mont-Royal, attiré par la sociale-démocratie et la défense de la langue française.
.jpg)
En marchant vers notre premier poteau, Hans poursuit. « On a l’impression que le noyau dur du PQ est une vieille génération qui s’est accaparé l’indépendance, mais en ce moment, les jeunes recommencent à s’y intéresser et les idées bourgeonnent et avancent à travers eux. »
Outre la question d’un troisième référendum gagnant, la justice sociale, l’accessibilité au logement et l’éducation sont quelques-uns des nombreux enjeux de la circonscription située dans l’est de Montréal.
Mais passons aux choses sérieuses.
.jpg)
Pour remplir dignement notre mission, il faut choisir les emplacements avec stratégie, respecter la règle « des trois poteaux », affirmer sa présence sur les artères passantes, trouver l’angle optimal d’affichage, se questionner à savoir s’il faut être à gauche ou à droite du trafic, faire gaffe pour ne pas causer un risque pour les personnes en situation de handicap.
Bref, une science insoupçonnée qui compte son lot de variables.
Deux gros tie wraps noirs, hop! l’acteur est suspendu en sandwich. « Toujours plus serré au bas », conseille Hans qui va jusqu’à croquer l’attache autobloquante (EN FRANÇAIS SVP!) pour assurer une bonne pose.
.jpg)
L’escabeau et la paire de ciseaux étant pris pour la soirée par une autre équipe de bénévoles, on fait avec ce qu’on a. «Faire de la politique, c’est trouver des solutions », me dit Hans, crampé, au moment où je lui offre mes mains en position courte échelle afin que le visage de l’acteur-musicien soit bien visible.
Plus notre batch d’affiches diminue, plus je me surprends à analyser les pancartes « adverses » avec des yeux d’accrocheur. J’inspecte leur job de tie wraps, leur technique d’accrochage, le raffinement du travail. Un art, rien de moins.
.jpg)
« C’est bon, on est en haut de la CAQ », dis-je fièrement, en faisant la ballerine avec les traits du beau barbu au bout de mes doigts. Si plusieurs candidates et candidats dans Rosemont ont mis le pied sur l’accélérateur dans la course aux poteaux, il en reste encore des bons de libres.
Mais l’affichage est-il si important dans une campagne électorale? « Pour des raisons écologiques, ça devrait être repensé. Mais un parti qui n’est pas affiché, aux yeux du public, est un parti invisible, qui n’existe pas. C’est encore une obligation. Mais il y a une réflexion sur le sujet. On aimerait plus des idées que des visages, non? », souligne Alexis, d’une éloquence un peu trop intimidante pour son âge.
.jpg)
Notre trio trouve son rythme, quand soudainement, au bout de la rue, deux bénévoles de Québec solidaire se baladent, eux aussi, pancartes sous le bras. Évidemment, je propose une baston en bonne et due forme. Suggestion refusée sur-le-champ avec quelques rires. Moi qui croyais intraitables les rues de la joute politique.
Je leur demande leur avis à savoir pourquoi plusieurs jeunes de notre génération se sont ralliés aux valeurs des oranges, contre qui le PQ a perdu des bastions historiques, comme Rosemont, Gouin et Hochelaga-Maisonneuve. « Après le long règne des Libéraux au pouvoir (interlude 2012-2014 du PQ), le Québec avait envie de changement et cette volonté s’est traduite à travers des nouveaux partis, la CAQ et QS, précise Hans. Mais on voit qu’un renouvellement est désiré, que des promesses n’ont pas été respectées, ici même, dans Rosemont, que le candidat sortant n’était pas très présent selon les témoignages récoltés durant les séances de porte-à-porte. »
.jpg)
Le soleil se couche et on affiche encore et toujours, infatigables. J’éclaire au cellulaire les minutieux travaux tandis que des marcheurs d’après-souper nous encouragent dans notre besogne.
L’engagement de mes pairs est manifeste, la fierté pour le parti semble inébranlable malgré les conjonctures actuelles.
.jpg)
« C’est une nouvelle ère qui commence et c’est maintenant », lance Hans, rayonnant de confiance dans la noirceur. L’ouvrage ne fait pas peur à mes deux camarades, qui seront au bat tous les jours, après le boulot pour l’un et après l’école pour l’autre, jusqu’au 3 octobre.
Dans Rosemont, la maison péquiste ne brûle pas encore.
L’espoir est là.