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Exclusif! Mon amie-humoriste-et-co-Urbano-blogueuse se livre à moi, Oprah étant retenue. Première partie. La suite demain dans son blogue où je m’ouvre aussi. C’est beau l’ouvert.
JMA: Wazzup, Lizotte?
KIM: (Soupir) Je ne sais même pas par où commencer. T’as remarqué mon détachement cette année? Je ne passe plus 90% de mon temps à commenter la politique sur les réseaux sociaux, à parler de mon attachement pour le Québec, à publier des articles sur les redevances minières, la commission Charbonneau, les scandales à Ottawa et la chasse au BS du PQ… Je ne sens plus l’effervescence de la dernière année, je ne sens plus de vent qui me pousse vers l’avant. J’ai trop marché, le jour, la nuit. Je me suis impliquée, je me suis affichée, j’ai été cinglée (le verbe transitif, pas l’adjectif) sur les réseaux sociaux. J’ai affiché le carré rouge, j’ai scandé tous les slogans. Même le « Charest dehors, trouve-toi une job dans l’Nord! » à deux heures du matin, pendant que l’escouade antiémeute tirait des balles de caoutchouc sur nous. J’ai encore des bleus sur les pieds (note: son pédicure demeure toutefois parfait à première vue) et encore plus sur le cœur. Je ne sais plus quoi défendre, j’ai l’impression à la fois de prêcher aux convertis et de hurler dans l’oreille des sourds.
JMA: Bon, ça commence raide. Faut-il trouver un divan incliné en cuir?
KIM: Sérieux, il me reste quoi? Que je m’accroche à toi comme si t’étais mon last resort?
JMA: Sur le divan en cuir?
KIM: N’essaye pas de m’avoir, Aussant. Tu ne m’auras pas. J’ai assez donné. Des années de ma vie à défendre le Québec, à croire à la souveraineté, à participer à des dîners, des documentaires, des plateformes, des rencontres de jeunes souverainistes, séparatistes, indépendantistes. J’ai donné mon cœur, mon espoir, mes larmes à Parizeau, Bouchard, Landry, Boisclair, Marois, Duceppe, alouette. Je n’en peux plus d’être abandonnée.
JMA: Prends sur toi, fille. Tu sais au moins maintenant, grâce à Chris Hadfield, comment pleure un astronaute en apesanteur.
KIM: Justement, j’ai pleuré dans une salle de bain crasse de Chambly lorsque le Bloc Québécois a été pratiquement rayé de la carte. J’ai retenu mes larmes quand Duceppe a démissionné, en me disant qu’on allait le revoir, plus fort, ailleurs. J’me suis même un peu réjouie de la victoire du PQ… en cachette, je ne te l’ai pas dit! J’ai haï Nicolet de t’avoir abandonné pour la CAQADQ. J’ai pensé que le PQ tiendrait ses promesses. Je crois au Québec, mais le Québec veut pas me crouère. Je suis tannée de répéter la même cassette comme une mongole. Je répète les mêmes arguments depuis 1995 et je répète des choses qui, pour moi, sont des évidences. C’est aliénant! Le Pierre Falardeau en moi est fatigué, JMA, je suis fatiguée de nous, Québécois. T’es pas fatigué, toi?
JMA: C’est moi qui pose les questions aujourd’hui.
KIM: En plus, t’as une famille! Des jumeaux de deux ans! Une femme! Une vie de rêve à portée de main si tu quittes. Moi j’ai même pas ça. Et tu ne trouves pas qu’on a un problème de marketing? Qu’on n’est pas sexy, nous la gang du OUI? Qu’on nous associe à une bande de ceintures fléchées qui giguent, qui se promènent avec le drapeau des Patriotes autour du cou, qui vivent dans le passé, qui chantent du Paul Piché et qui veulent juste vivre une grosse St-Jean perpétuelle?… C’est comme plus fort que ton look branché de « jeune politicien dans le vent » avec ses lunettes cools…
JMA: En fait, c’est que…
KIM: T’as pas le goût de tout sacrer là des fois? T’étais bien avant. T’avais de l’argent, tu pouvais voyager, être libre. Tu faisais un multiple de ton salaire actuel et encore là, on te le reproche! Tu déranges, Aussant. T’aimes déranger? T’es un petit rebelle. Tu pleures des fois en position fœtale dans ton bain parce que tu te sens attaqué et incompris? Oui, je sais, c’est plusieurs questions en une, je suis Anne-Marie Dussault sur le speed.
JMA: Ou Christiane Charette sur la tisane. Mais c’est moi qui pose les questions aujourd’hui. Écoute, t’auras juste à te lire demain dans ton blogue pour avoir mes réponses…
KIM: Vois-tu, je pense comprendre comment tu te sens. Dans ton domaine comme dans le mien, les gens avec des ambitions personnelles nous survivent. Ceux qui pensent à leur nombril et qui ont des buts précis. Ils se voient premier ministre dans 15 ans ou rêvent d’un show à 100 000 billets vendus. Ceux qui foncent vers le succès, la réussite personnelle…. Alors au diable les reproches de manque d’intégrité, au diable les mensonges, les scandales, les rumeurs. Ils continuent, ils montent les échelons, sans rien vouloir changer ni rien avoir à exprimer. Sans réel désir de changement, sans réel désir de faire avancer une cause, sans réel désir d’apporter à la société. Mais malgré tout, ils avancent… et nous dépassent par simple patience.
JMA: Des coquins quoi.
KIM: Notre manque d’ambition personnelle va finir par avoir notre peau mon ami. Moi, je ne veux pas de millions, je ne veux pas être la nouvelle star du moment, je veux juste faire mon travail et que les gens y trouvent une résonance. Éveiller quelques esprits, juste faire en sorte que ma parole de jeune femme soit immortalisée dans le temps, pour qu’on sache qu’en 2013, ce n’était pas tout le monde qui pensait pareil…
JMA (Je me réveille brusquement).
KIM: (Soupir) Mais tu sais qui est sexy? Sugar Sammy. Les gens l’aiment, votent pour lui, lui font gagner des trophées. On aime se faire rappeler qu’on est petit et en rire, comme pour contourner la question et ne pas s’y attaquer. C’est pour ça que Jean Charest était sexy. Il nous regardait avec assurance, pour nous rappeler de rester à notre place. Que c’était lui qui savait ce qu’on devait faire et où on devait aller. Ces deux-là sont bons dans ce qu’ils font, on va leur donner ça. They are in. Moi je ne gagnerai jamais d’Olivier. Je suis pas sexy. Je suis une femme qui joue au monsieur dans un monde de monsieur. On me trouve pertinente juste quand on aime ce que je dis. Les gens qui m’aiment et me suivent sont des gens qui se sentent aussi incompris et des femmes qui se reconnaissent dans mon discours. Je ne ferai jamais l’unanimité.
JMA: Jean Charest sexy? J’ai vu des photos Hey girl de moi durant la campagne électorale qui disaient que j’étais quand même assez…
KIM: On n’est pas sexy mon ami. On n’est pas dans la bonne gang. Fait-on partie de ces petites choses qui sont découvertes et qui sont appréciées lorsqu’elles disparaissent?
JMA: Beh… Prévois-tu ma disparition?
KIM: Oui.
JMA: Mais encore?
KIM: Parce que je t’aime et que je crois en toi. Et tous ceux que j’aimais ont fini par m’abandonner. Les Nordiques. Le PQ. Le Québec. Les hommes. Un jour, ce sera toi…
Note au lecteur: Kim va bien. Il a suffi d’un café latte et d’un peu de chocolat noir pour qu’elle reparte, baguettes en l’air, travailler à ses 36 projets actuels. La suite demain dans son billet hebdomadaire. C’est moi qui répondrai à ses questions.