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En pièces…

Ou comment les ponts de Montréal et Mortal Kombat sont intimement liés…

Par
André Péloquin
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Sujet de débats dans la communauté des amateurs de jeux vidéo et autres « geeks» depuis quelques années, le « downloadable content» (DLC) suscite les passions. Comme le terme anglophone l’indique, le DLC est du contenu téléchargeable qui peut aller du fichier réglant un bogue qui resté inaperçu lors de la production initiale du jeu à de toutes nouvelles aventures complémentaires qui se greffent au produit original.

Les premiers DLC – de petits jeux entiers, en fait – étaient offerts par abonnements. Atari (oui, oui) avait mis sur pied un service – le GameLine – qui permettait de télécharger de petits jeux à l’aide d’un modem branché à même la ligne téléphonique (le bon vieux temps, j’te dis). Une fois installé, le jeu fonctionnerait pendant 5 à 10 parties. Ceux qui n’en avaient pas eux assez devaient donc le télécharger (et donc payer) à nouveau.

Ambitieux, les créateurs du module GameLine bossaient aussi sur d’autres DLC qui pourraient être achetés par les joueurs d’Atari: de l’actualité, des résultats sportifs, l’horoscope du jour, etc. Malheureusement, le krach de la compagnie Atari de 1982-1983 allait tuer le projet dans l’oeuf.

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Quelques années plus tard, Sega allait s’associer à Time Warner pour offrir le Sega Channel, une chaîne télé spécialisée en jeux vidéo et accessible à l’aide d’un adaptateur et d’un abonnement mensuel. Une fois l’adaptateur connecté au Genesis, la console liée au Sega Channel, l’utilisateur pouvait avoir accès à une cinquantaine de jeux en ligne disponible via la connexion câblée de sa télé (un peu comme Videoway, disons). La console Genesis n’ayant pas été à la fine pointe de la technologie pendant très longtemps, le projet fera patate en 1998.

Pendant ce temps, des programmateurs amateurs s’échangent des niveaux supplémentaires pour des jeux d’ordinateur comme Doom. Ceux-ci vont même jusqu’à modifier l’apparence des ennemis, d’armes et de décors. Les dirigeants d’entreprises flairent la bonne affaire…

Microsoft compte parmi les premières entreprises à charger pour du contenu à la pièce pour ses créations. En 2002, on offrait des niveaux supplémentaires et de nouveaux modes de jeux pour MechAssault, un jeu X-Box, pour une modique somme. Le jeu étant un produit de qualité bien côté par la critique, plusieurs utilisateurs ont payé une somme supplémentaire sans broncher.

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Plus tôt cette année, la compagnie Midway lançait un nouveau chapitre de Mortal Kombat. En plus des fameuses mises à mort traditionnelles, on y retrouve près d’une trentaine de combattants. Depuis, les DLC pour le jeu de combat pullulent. On peut autant acheter d’autres guerriers (dont Rain, un ninja qui porte une tenue violette) et des costumes supplémentaires. Après un mois sur le marché, on rapporte que plus d’un million d’exemplaires du jeu ont été écoulés.

Tout ça pour dire que si des « geeks» sont prêts à injecter quelques dollars supplémentaires pour télécharger un ninja qui « rend hommage» au chanteur Prince (Rain… violet… Purple Rain), il est prêt à payer pour traverser un pont pour gagner sa vie!

En plus du rapport annonçant la mort imminente du Pont Champlain (comme si on ne le savait, m’sieur Lebel), on apprenait hier que plusieurs alternatives étaient considérées pour le remplacer, dont un tunnel. On parle des milliards de dollars que la mésaventure va coûter, mais on susurre à peine les moyens de le financer ou – du moins – de payer son entretien.

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Profitons-en pour la jouer Microsoft: implantons des péages sur tous les ponts et tunnels de l’île. Tu veux casser des gueules avec un ninja violet. Paye! Tu veux te rendre au travail par tes propres moyens. Paye aussi! Le transport en commun s’en portera mieux, tout comme la densité du trafic (du moins, on le souhaite). OK, les « squeegees» du coin Papineau/Sherbrooke vont en baver un peu, mais bon…

De toute façon, comme les Québécois sont plutôt frileux lorsqu’il question de sortir son porte-monnaie (on se rappellera le mur de lamentations sur Twitter accompagnant l’implantation d’un « paywall» sur le site de The Gazette limitant l’accès aux articles à moins de payer 6,95$ par mois), tout ça relève sûrement de la science-fiction, voire même du monde des jeux vidéo.