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En attendant d’avoir 10 Céline Dion
Le déclin des artistes francophones dans la programmation du Festival d’été de Québec se poursuit et continue d’en inquiéter certains.
D’abord, sur le plan statistique, on observe effectivement une chute de la représentation québécoise qui est passée, selon les chiffres recensés par le quotidien Le Soleil et par le candidat à la direction du Parti québécois, Paul Saint-Pierre Plamondon, de 80% dans les années 80, à 63% en 2011, puis à 38% cette année.
Certes, il faut comprendre que l’ampleur et l’ouverture sur le monde du FEQ ont explosé depuis sa version originale en 1968.
Fondé au départ par une soixantaine de jeunes artistes québécois, le festival visait à promouvoir, d’abord et avant tout, les talents d’ici.
L’ampleur et l’ouverture sur le monde du FEQ ont explosé depuis sa version originale en 1968.
Au fil du temps, les artistes internationaux ont été de plus en plus nombreux et de plus en plus populaires. Résultat: le FEQ est maintenant considéré comme un des événements musical incontournable au pays voire un passage recherché sinon obligé pour tous les grands groupes ou artistes de la planète.
Il n’est pas rare qu’on soit plus de 100 000 à s’entasser sur les plaines d’Abraham devant un méga-concert un beau soir de juillet. Combien d’artistes québécois peuvent attirer autant de monde en un seul endroit, un seul concert? On peut probablement les compter sur les doigts d’une seule main.
On souhaiterait tous, dans un monde idéal, qu’il y ait 10 Céline Dion qui rayonnent aux quatre coins du globe. La réalité, c’est qu’il n’y a qu’une seule Québécoise qui a atteint de tels sommets et, compte tenu de notre population, c’est déjà exceptionnel.
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À l’image de notre playslist
À 38% d’artistes de chez-nous, c’est, j’en suis convaincu, un pourcentage beaucoup plus élevé que ce qu’on retrouve dans votre playlist personnelle.
On ne peut pas demander au FEQ de voir petit. De se ratatiner sur lui-même, de scraper le travail des vingt dernières années. À 38% d’artistes de chez-nous, c’est, j’en suis convaincu, un pourcentage beaucoup plus élevé que ce qu’on retrouve dans votre playlist personnelle.
Nous sommes, en quelque sorte, tous un peu responsables du déclin de la chanson québécoise en raison de notre amour de la musique anglophone.
Je me souviens de mes parents qui couraient les boites à chansons pour entendre un chanteur en chemise à carreaux gratter sa guitare avec sa ceinture fléchée.
Le monde change, évolue. Certains disent heureusement, d’autres sont nostalgiques du bon vieux temps., mais personne ne peut arrêter ça.
Il devient même parfois difficile de classer certains groupes ou artistes. Il y a quelques années, j’ai eu la chance d’entendre au FEQ Pink Martini chanter dans sept ou huit langues.
Une des plus grandes artistes de la région de Québec, Pascale Picard, chante en anglais. So what?
Aimeriez-vous vraiment mieux qu’elle chante « Porte vingt-deux » plutôt que Gate 22?
Un des plus grands privilèges que j’ai eu comme animateur à la radio de Québec a été d’accueillir dans mon studio Pascale, seule avec sa guitare, qui m’a interprété quelques-uns de ses hits. J’en avais la chair de poule.
Un quota = une dévalorisation
De toute façon, l’imposition d’un quota de 50% de francophones au FEQ entraînerait sans doute une dévalorisation des chanteurs québécois, un peu comme les quotas francophones à la radio. On relaye la musique d’ici en pleine nuit. On mettrait les shows francophones sur les scènes et les soirs les moins achalandés et les moins prestigieux.
Mais, on a beau sortir tous les arguments du monde en faveur de la liberté linguistique en matière de musique, le lobby pro-Franco, pro-Québec va continuer d’en réclamer plus, par intérêt.
Plus de sept dollars sur huit du FEQ proviennent du privés et des spectateurs.
Paul Saint-Pierre Plamondon a d’ailleurs confirmé mes pires craintes en affirmant la semaine dernière qu’il faudra davantage subventionner l’industrie culturelle québécoise pour qu’il y ait plus de contenu québécois. Woh les moteurs!
En quoi plus de subventions équivaut à une recrudescence pour la musique franco? Nos goûts musicaux ne sont pas à vendre!
Ensuite, le FEQ bénéficie de bien peu de subventions comparé aux Francofolies de Montréal. Plus de sept dollars sur huit du FEQ proviennent du privés et des spectateurs. Moins d’un dollar sur huit de son budget proviendrait des trois paliers de gouvernements réunis.
La pression de Montréal
Assez troublant de constater aussi que la plupart des voix qui souhaitent imposer plus de français au FEQ semble provenir de Montréal. Comme si l’ouverture sur le monde et la langue de Justin Bieber se justifient davantage dans la métropole en raison de son caractère cosmopolitain et multiculturel. Comme si les gens de la capitale ne sont que des cul-terreux de campagne qui doivent se contenter de chanteurs locaux plus talentueux dans le démarchage de subventions que dans la composition ou l’interprétation. Qui s’inquiète du pourcentage de musique francophone d’Osheaga? Vous me répondrez « who cares ».
Mais bon, je peux parfaitement comprendre la jalousie des Montréalais. On n’a peut-être pas d’équipe d’hockey, mais c’est quand même chez nous que Rage Against The Machine et Paul McCartney viennent chanter.