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Elles sont candidates et ont moins de trente ans

Faire sa place en politique, une campagne à la fois.

Par
Claudia Fortin
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Ça fait un bon moment qu’on dit que la sphère politique doit changer, qu’on doit faire plus de place aux femmes à tous les paliers de gouvernement. Ça serait en effet logique que la proportion d’élues soit proportionnelle au nombre de femmes dans la population (je vous donne un petit hint : ce n’est pas le cas en ce moment). On pourrait d’ailleurs avancer le même argument pour la diversité en général et on aurait raison de le faire. Et tandis qu’on y est, un peu plus de jeunes au sein de nos gouvernements ne ferait pas de tort non plus.

Alors à quelques mois des élections municipales et en pleine campagne fédérale, j’ai voulu m’entretenir avec quatre jeunes femmes qui faisaient le saut dans l’arène. Ayant un parcours différent et provenant de milieux disparates, une chose les unit toutefois; ce désir ardent de faire bouger les choses et de prendre leur place.

Trop jeune ?

Plonger en politique vient, on s’en doute, avec son lot de défis : accumuler du financement (oui, faire de la politique c’est un peu plus cher qu’économiser pour un voyage dans le Sud), se monter une équipe solide et se préparer mentalement à assumer les responsabilités qui viennent avec le rôle d’élue n’en sont que quelques exemples. Et, quand on est une jeune femme, il faut se préparer à affronter un obstacle supplémentaire; le doute que notre candidature soulèvera chez les citoyen.ne.s.

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Marie-Ève Pelchat, 24 ans et déjà prête à faire campagne, se présente dans la circonscription de Montarville pour le Parti libéral du Canada (PLC). Elle estime que sa place est aussi méritée que n’importe quel aspirant à ce poste. « On va peut-être me juger pour mon manque d’expérience en politique, mais je suis prête à faire face à cela. Dans le milieu, tout le monde a déjà été un débutant », m’explique Marie-Ève à peine quelques jours après l’annonce de sa candidature.

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Camille Esther Garon a 26 ans et sa volonté de s’impliquer au fédéral remonte à bien loin. Candidate pour le Nouveau Parti démocratique (NPD) dans la circonscription de Beauport-Limoilou, la jeune femme est prête à écraser n’importe quel doute qui viendrait se dresser sur son passage. « Je veux créer le changement que je souhaite voir. À la base, la politique canadienne n’est pas faite pour une personne comme moi. Pourtant, les personnes qui n’ont jamais été représentées méritent un siège à la table, ils font partie de la société », m’explique Camille alors que je découvre son quotidien.

Même si les élections municipales ne sont prévues qu’au mois de novembre (prévoyez vos calendriers), de jeunes femmes allumées sont aussi déjà prêtes à amener un vent de fraîcheur, que ce soit en région ou dans les plus grandes villes.

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Dans la capitale du 450 (a.k.a. Longueuil), on trouve notamment Lysa Bélaïcha qui convoite le poste de conseillère municipale dans le district Boisé-du Tremblay. « Quand des femmes se font élire, ça attire plus de femmes. Pour les jeunes, c’est la même chose, ils deviennent des modèles pour les autres », m’explique Lysa en se promenant dans les rues de son district. Pour la jeune d’origine algérienne arrivée au Québec à l’âge de trois ans, la population est prête à accueillir plus de jeunes et de diversité chez les élu.e.s. « Les gens, je le vois dans leur visage, sont contents et surpris. Ils trouvent ça beau de voir des jeunes se présenter. On arrive purs dans un domaine qui est dur, prêts à tout pour défendre les intérêts des personnes qu’on représente et se faire la voix de leurs idées et leurs préoccupations », me raconte la jeune femme.

Comment se faire prendre au sérieux ?

« On avait organisé une rencontre avec un partenaire économique. Avant le rendez-vous, il a préféré s’adresser au directeur général plutôt qu’à moi », me raconte Annie Veillette, conseillère municipale et candidate pour la mairie de Matane au téléphone. Gravitant dans un conseil municipal où elle est la seule femme, l’aspirante mairesse doit souvent mettre son pied à terre pour prendre sa place, surtout dans une rencontre où on ne s’adresse qu’aux « messieurs » alors qu’il y a des femmes dans la pièce. « Quand on a séparé les dossiers, ç’a été logique que je reçoive celui de la famille. J’ai senti que je l’ai eu vite. » Malgré tout, Annie considère qu’elle mérite sa place en tant que mairesse. « Si les autres sont capables, alors pourquoi pas moi ? », interroge la jeune conseillère.

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« On m’a demandé pourquoi je ne me présentais pas comme bénévole à la place. Je suis déterminée à m’élever et je n’ai pas envie de m’excuser en le faisant », ajoute Camille, plus motivée que jamais. Également animatrice et conférencière, la jeune politicienne considère qu’elle a l’expérience nécessaire pour convoiter le poste et qu’elle pourra tabler sur les compétences acquises dans son parcours professionnel pour relever ce nouveau défi. « Je me réveille tous les matins en me disant que je sais ce que je fais, que je mérite ma place comme candidate », me déclare Camille, sans l’ombre d’un doute à propos de sa candidature.

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Marie-Ève de son côté, croit qu’il est plus que temps de se départir du paradigme politique de « l’homme-blanc-dans-la-cinquantaine » et de prendre les femmes au sérieux, affirmant du même coup que les choses bougent de ce côté.

L’étendue du féminisme

« Pour moi, la politique c’est réclamer l’espace qu’on mérite. C’est ça qui peut faire la différence. Il ne faut pas oublier aussi l’importance du féminisme intersectionnel », lance Camille. La candidate m’explique que pour elle, l’équité est une priorité, que s’il est capital de retrouver des jeunes femmes en politique, il faut aussi inclure dans les décisions les femmes issues de toutes les communautés. « La lutte n’est pas réservée à une seule catégorie de femmes », renchérit Lysa.

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On en revient donc à cette idée que ce n’est pas parce qu’on est une femme que l’on peut prétendre comprendre et vivre la réalité de toutes les femmes. Miser sur une diversité notamment dans les genres, les âges et les communautés culturelles en politique est primordial. « Oui, l’émancipation des femmes c’est important, mais on doit toutes les inclure [les femmes issues de différentes communautés culturelles ou les femmes trans par exemple] et il est de notre devoir de représenter toutes les réalités. La diversité est un fait, l’inclusion est un choix et l’équité est un devoir », m’explique Camille.

À ce titre, espérons qu’on verra de plus en plus de Marie-Ève, de Camille, de Annie et de Lysa se faire une place sur nos bulletins de vote… et au sein de nos gouvernements.