URBANIA a accepté l’invitation d’Élections Montréal d’aller à la rencontre d’électeurs et d’électrices qui se rendront aux urnes les 6 et le 7 novembre pour défendre les différents enjeux qui les animent.
Les propos rapportés dans l’article qui suit ont été recueillis librement afin d’ouvrir la discussion autour de différents enjeux d’actualité. En aucune manière Élections Montréal ne s’associe aux opinions véhiculées dans le texte.
Alors que les partis municipaux s’affairent en pleine campagne électorale, la fin de semaine du scrutin, elle, pointe tranquillement à l’horizon. Les 6 et 7 novembre 2021, les Montréalais.es seront invité.e.s à se rendre aux urnes pour choisir leurs représentants à l’Hôtel de Ville et aux mairies d’arrondissement jusqu’en 2025.
Animés d’une volonté d’aller au-delà du débat partisan, nous avons parcouru les rues de la métropole afin de prendre le pouls de la population. À travers la pluralité des voix citoyennes, l’importance du vote et son incidence sur le quotidien sont apparues déterminantes. Ces rencontres nous ont permis de dresser un portrait en quatre pôles de différents enjeux d’actualité. Les discours se croisent, trouvent écho, s’expriment librement tant sur des inquiétudes que sur des idées porteuses. Nous les avons unis, dans leurs similitudes et leurs divergences, pour tenter de refléter, à la veille des élections, ce que les Montréalais.es souhaitent, ensemble, comme ville de demain.
Les terrains vacants sont rares. Notre ville se doit donc d’être plus active dans l’acquisition sur le marché privé pour socialiser les propriétés. Les logements communautaires représentent une goutte dans l’océan. Les besoins sont immenses. Une partie encore trop grande de la population vit dans des conditions inadéquates. Ces personnes ne demandent pas le luxe : que le strict minimum respectant la dignité humaine la plus primaire. Pas de moisissures ni de punaises de lit, sans devoir dépenser 50 % du revenu mensuel en loyer. Montréal doit être une alliée afin que les plus vulnérables n’aient pas à se battre pour un besoin aussi élémentaire.
Je crois que Montréal demeure une métropole abordable, tout de même accessible même si on voit les prix augmenter. Cela dit, les représentants devraient pouvoir intervenir dans l’actuelle crise du logement, mais aussi aider à l’accessibilité à la propriété, surtout pour la jeunesse montréalaise. Mon conjoint et moi ne savons pas si nous allons avoir les moyens pour le coin. J’aime cette ville, chaque quartier doit se permettre une vitalité économique, tout en préservant son ambiance, sa couleur, sans tomber dans du copier-coller. Certains projets de condominiums ne sont pas moches, mais ça pourrait être plus beau.
Côte-des-Neiges a des enjeux d’habitation importants. L’itinérance a augmenté, il y a un besoin de logements sociaux. On ne va pas résoudre ces problèmes avec plus de tours. Qui va habiter le quartier s’il poursuit son embourgeoisement? Les habitants du centre-ville, comme une banlieue? Les étudiants étrangers plus fortunés? Il faut que le quartier demeure accessible à la mixité.
Je me rends compte qu’il faut voir plus loin que le pétrole en raison de la crise climatique. La ville ne peut recevoir autant de trafic, on le remarque partout, autant dans les quartiers résidentiels que sur les réseaux routiers, mais concevoir l’automobile comme un fléau est selon moi déplacé. On doit penser aux familles, aux travailleurs, aux commerçants qui dépendent d’une clientèle plus large, sans oublier les quartiers mal desservis par le transport en commun. Juste pour aller au hockey, c’est compliqué sans voiture. Montréal est une ville à quatre saisons où la circulation est grandement facilitée par l’utilisation de la voiture. Des consultations doivent prendre en considération tous les besoins des citoyens.
Je suis consciente qu’on prend du territoire automobile et que la circulation est parfois ralentie, mais au-delà de l’évidence écologique, le transport actif est plus qu’une simple façon de se déplacer, c’est une façon de vivre la ville. C’est incroyable tout ce que j’ai découvert en sillonnant ses rues. En ajoutant que je ne me suis jamais sentie en danger.
Certains cyclistes ne sont pas encore acquis à l’idée de rouler à l’année. Ça a sa part de risque et d’encombrement. Ça dépend du boulot, des dénivelés à affronter, mais c’est plus facile que l’on peut le croire. La piste cyclable devant chez moi, sur l’avenue De Chateaubriand, est même déneigée avant la rue. Et côté portefeuille, c’est vraiment avantageux. Tu n’as pas besoin de dépenser pour le garage ni pour l’essence. Le vélo à Montréal est synonyme pour moi de ne pas être coincée dans le trafic et de me déplacer sans stress, en se sentant bien et libre.
À l’insécurité, une réplique que l’on voit, c’est plus de policiers dans les rues. Naviguer uniquement dans un paradigme punitif n’ouvre pas la voie à d’autres solutions. Si on injecte plus d’argent dans les forces de l’ordre, c’est au détriment des mesures sociales.
Par exemple, impliquer des équipes d’intervention spécialisées, non armées et mieux outillées pour répondre à des situations de détresse psychologique, à l’aide de l’éducation populaire, en offrant des services plus inclusifs et tenter de mieux comprendre la complexité des arrondissements vulnérabilisés par le manque d’investissements sociaux.
Qu’est-ce que ça fait à une jeunesse immigrante et racisée de se faire constamment surveiller dans les quartiers, les parcs, les écoles qu’elle fréquente? Il existe un historique de violence envers des communautés vulnérabilisées par la discrimination systémique, ce qui explique la méfiance. Cela ne va pas se régler avec des campagnes de relations publiques. Il faut entamer une vraie conversation citoyenne sur la sécurité publique.
Je considère que la Ville a un rôle important à jouer au chapitre de la sécurité de ses citoyens. Depuis les récents incidents liés aux armes à feu dans plusieurs quartiers, j’évite de les fréquenter. Il y règne un climat tendu. La population semble craintive, on sent une fausse sécurité. Les citoyens, et surtout les citoyennes, doivent pouvoir profiter de l’ensemble de la ville en toute confiance.
Avoir plus de policiers sur le terrain assurerait une plus grande tranquillité d’esprit, mais ça doit être fait adéquatement. Les forces policières doivent agir pour nous, en respectant tous les Montréalais, sans préjugé basé sur la couleur, et sans bafouer nos droits.
Selon moi, la relation entre la police et la population est habituellement bonne, dans Saint-Henri comme dans Côte-des-Neiges, où j’ai grandi. Mais la Ville doit aussi investir dans des actions communautaires, prendre position pour être plus proche des habitants du quartier.
Densifier le centre-ville, construire sans arrêt, ce n’est pas une solution miracle ni la voie à suivre. Je ne vois pas l’intérêt d’ériger des gratte-ciel de béton, des tours de bureaux interminables à destin unique, qui ne sont des espaces ni de créativité, ni de sociabilité, ni d’expérience de vie. Il faut réfléchir à des façons de développer la Ville et de retenir ses citoyens, d’empêcher l’exode vers les banlieues. Concevoir un centre-ville destiné non seulement au boulot, mais aussi au plaisir d’y rester et d’y habiter.
Il faut faire croître le centre-ville dans une perspective rassembleuse et non comme un carrefour purement fonctionnel. Un paysage de tours n’ajoute pas au cachet d’une ville comme Montréal. Ce serait une erreur d’identité de désirer une ville touristique à vocation de consommation. Montréal se valorise à travers un esprit, qui doit certes évoluer, mais sans dénaturer sa personnalité ni son passé.
Il faudrait que ce soit élaboré dans une perspective citoyenne. Un lieu de travail, mais aussi de vie sans voiture, en promouvant le vélo, la piétonnisation des rues. Avec le REM qui s’installe, le quartier sera mieux desservi, mais concentrer une population doit se faire de façon socialement responsable, en harmonie avec la réalité du logement et non pour nourrir l’opportunisme spéculatif.
Est-ce utopique d’oser concevoir un centre-ville comme un écosystème plus indépendant? En offrant de la production alimentaire en serre ou de l’agriculture sur les toits?
En ce moment, je trouve plusieurs gratte-ciel très laids. Il y a un enjeu esthétique, une conversation à entreprendre sur la beauté de la ville. Il faut construire de manière judicieuse, avec une vision, de l’audace. Je ne pense pas que les Montréalais soient intéressés par un centre-ville générique qui ressemble à celui des autres métropoles. Il faut qu’il ait un cachet propre.
Une conception de URBANIA et INSUBORDINATION
Texte et photos : Jean Bourbeau
Design : Marc-Antoine Jacques
Développement et intégration : Théo Gjini