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Écoute-moi

Par
Kim Lizotte
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«Donc, c’est ça, je vis des crises d’angoisse à répétition depuis 2 ans, j’ai pris des antidépresseurs, mais bon, depuis la mort de ma mère, comment aurais-je pu fonctionner autrement, surtout que c’est pendant cette période que je me suis rendue compte que Frank me trompait! » Seigneur Dieu. On se calme. On ne se connaît que depuis 30 minutes.

Je ne sais pas si c’est ma face qui attire les confidences, mais je commence à avoir de la difficulté à accumuler les centaines de secrets dont je suis bombardée. Je ne parle pas ici de mes amis proches, qui, un soir de pleine lune, finissent toujours par m’avouer qu’ils ont des fantasmes qui frôlent la déviance sexuelle, non, vous, je ne vous trahirai jamais. D’ailleurs, vos secrets, chers amis, sont tellement surréalistes (je me tiens avec des artistes, ça aide pas!), que personne ne me croirait. La preuve, en voici un : « Hier, j’ai fait un trip à 3 avec un joueur de hockey et un magicien, mais s’il-te-plaît, dis-le pas à personne! » Et bien, chère amie, ton secret est tellement loufoque que j’ai beau le dire en plein dans mon blogue, personne ne va me crouère.

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Bref. Je ne suis pas ici pour vous révéler des secrets ou pour vous parler de mon habileté à les garder.

J’ai des secrets à moi. Que personne ne sait. Ni ma mère. Ni ma meilleure amie. Aucun de mes ex non plus. J’ai des secrets enfouis que je ne m’avouerais même pas à moi-même, seule devant mon miroir, ou enfermée dans une chambre de torture avec un bourreau qui me fixe avec un seau d’eau et des fils électriques. Au grand jamais. J’ai des secrets trop graves. Des confidences qui pourraient détruire des vies, chambouler des existences, humilier des gens, causer des catastrophes. Je les garde enfouis au fond de moi, à côté de mes squelettes. Certains sont des boulets, certains m’attristent. Certains, bizarrement, me touchent profondément. Car je sais que j’en suis l’unique confidente, et parfois, ce sont de beaux secrets, inavouables. Et je suis celle qui les porte dans son cœur, telle une gardienne de chambre forte.

Et bien sûr… j’ai des secrets banals, rigolos, loufoques, digne du Echos-Vedettes et ce sont ceux-là qui sont difficiles à retenir. Mais bon, il y a aussi…les confidences d’inconnus.

Voilà où je veux en venir. (Non, ceci n’est pas un article sur les secrets! Je ne vais pas non plus essayer de vous recommander de lire « LE SECRET »… et je ne veux pas non plus que vous m’écriviez vos secrets! Louise Deschatelets est là pour ça!)

Au cours des derniers mois, j’ai rencontré beaucoup de gens que je ne connais pas, dans le but de faire une recherche pour un projet. Et ce qui m’a frappée, c’est la facilité avec laquelle les gens se livraient à moi, d’un coup, les larmes aux yeux parfois, ou en m’énumérant tous les coups durs, tous les obstacles, toutes les cicatrices au cœur qui ont marqué leur vie. Mais avec un tel besoin de les partager, de trouver une résonance, d’immortaliser leur vécu au creux de mon oreille. Au-delà des témoignages, au delà des merveilleuses rencontres et de tous ces moments uniques, ce qui me reste en tête, c’est ce cri du cœur, cette quête de reconnaissance, ce « ÉCOUTE-MOI ».

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« ÉCOUTE-MOI » me spinne dans la tête et résonne dans mon cœur et explique tant de comportements. Ça explique les « REGARDEZ-MOI ». Les « LISEZ-MOI ». Les « ÉCOUTEZ-MOI ». Partout, tout le temps, en vrai, sur scène, sur les écrans, name it. Cet espèce de « Je veux tellement pas vivre tout ça pour rien ».

Un espèce de : « J’ai vécu de quoi. Et je dois faire semblant que non. Je dois retourner au bureau. Vivre ma vie. Parce qu’entre deux jobs, deux cafés, deux amis, deux rendez-vous, deux séances de magasinage, deux dates et deux soupers de famille, qui prend le temps de m’écouter? Qui prend le temps de me demander si je suis passé au travers les dernières épreuves de ma vie? »

Alors donc, dans ces cafés, ces restos, ces parcs, avec mes grands yeux bleus et ma face qui hoche telle une psychanalyste freudienne, j’ai ouvert mes petites oreilles pleines d’empathie.

Moi, une inconnue, maintenant le cœur rempli d’histoires déchirantes. Parce qu’on ne montre peut-être que ce qu’on veut montrer à nos proches. Parce qu’on fait peut-être que montrer nos bons moments sur notre wall Facebook. Parce qu’on rit peut-être avec des copains par texto. Mais à la fin de tout ça, on a besoin d’une personne qui ferme sa yeule, qui nous regarde dans les yeux et à qui on peut hurler sa souffrance, pour l’immortaliser et au moins lui donner un sens. Et que quelqu’un sache ce qui se cache, derrière nos vies qui semblent impeccables.

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