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À quelques jours de la date fatidique des élections, Urbania s’est entretenu avec Pierre Céré, le candidat péquiste de Laurier-Dorion, dans le plus illustre bar du quartier; le Miss Villeray.
Au Québec, que nous soyons en période électorale, en crise économique ou même en crise sociale, un sujet demeure : le Canadien fera-t-il les séries? Alors que tous les grands spécialistes de l’Antichambre martelaient en début de semaine que l’affaire était dans le sac, les Canadiens, eux, se devaient de remporter un match à Tampa Bay, la « capitale des Snowbirds du Québec », pour se qualifier mathématiquement à l’après-saison.
Dans l’attente du match, le candidat péquiste de Laurier-Dorion, Pierre Céré, s’est offert une pause de porte-à-porte et d’appels téléphoniques pour discuter franchement de politique.
– Non, je ne prends pas d’alcool pendant une campagne électorale. C’est un conseil que Gilles Duceppe — l’ancien chef du Bloc québécois — m’a donné. Et je vais le suivre, m’explique Pierre Céré au moment de faire sa commande.
Trêve d’alcool au Miss Villeray, la seule boisson qui touchera la table de la soirée est de l’eau minéralisée. Mais même sans alcool, il n’en fallait pas plus pour que Pierre Céré se livre totalement à la conversation. L’ancien porte-parole du Conseil national des chômeurs est en fait un grand livre ouvert qui ne se cache pas pour parler et pour donner son opinion personnelle sur des enjeux de société.
Calme, il calcule chacun de ses mots avant de les prononcer sans pourtant se censurer. Plus près du philosophe de gauche que du politicien typique, le candidat critique même son propre parti quand il vient le temps pour lui d’expliquer sa pensée.
– Je ne suis pas un produit, je suis un esprit libre. Ce ne sont pas des stratèges en communication qui dicteront mon message aux électeurs, m’explique-t-il.
Avant de s’être lancé en politique cette année, Pierre Céré raconte avoir été un homme progressiste qui a même fréquenté au cours de sa vie des gens de l’extrême-gauche. Son cheminement vers le Parti québécois ne s’est fait que tout récemment. À l’automne dernier, un ministre qu’il ne nommera pas l’a convaincu de s’ajouter à l’équipe de Pauline Marois.
– J’ai tenu une conversation très ouverte et très franche avec ce ministre sans quoi je n’aurais sûrement pas pris cette décision.
Le Parti québécois, selon lui, est une belle coalition de personnalités de différents milieux qui cherchent à améliorer le Québec. S’il est élu, sa voix plus progressiste ne sera pas mise sous silence par des géants des affaires comme Pierre-Karl Péladeau. D’ailleurs, s’il y a des dossiers qu’il compte revendiquer à l’intérieur de parti, ce sont des politiques pour aider les communautés culturelles du Québec.
Sur le terrain de la Charte
Pierre Céré le dit lui-même, il a la peau sensible quand il est question d’enjeux identitaires. Par le passé, il a critiqué publiquement le Parti québécois pour un projet de loi qui visait à créer une citoyenneté québécoise. Le projet a depuis été mis en arrière-plan par le parti, mais n’a jamais été officiellement abandonné. Mais de nos jours, c’est plutôt un projet de Charte de valeurs qui suscite les critiques et les applaudissements.
Pour le candidat péquiste, le projet de Charte n’a rien d’irritant. Il comprend que de nombreux électeurs issus de communautés culturelles sont inquiets par cette politique, mais il ne lancera toutefois pas de pierre à son parti.
– La seule solution, c’est l’écoute. Il faut prendre le temps de discuter avec les électeurs et de partager avec eux notre opinion.
Il me raconte alors qu’une jeune bénévole d’origine pakistanaise travaille à son local électoral. Elle viendrait donner de son temps au parti justement à cause du projet de Charte. Un projet qui, selon Pierre Céré, permettrait de briser les chaînes de nombreuses femmes immigrantes à la maison. Par contre, il concède que le Parti québécois aurait dû passer le projet de loi avant de partir en élections.
– Un genre de « in-between » avec l’opposition aurait été acceptable. Surtout que rien n’aurait empêché le PQ de passer les points plus sensibles du projet après avoir remporté une majorité à l’Assemblée.
Il est vrai qu’un tel scénario aurait probablement orienté la campagne sous un angle beaucoup moins identitaire. Surtout que, pour le candidat, la grande absente des élections 2014 est l’éducation.
De l’indexation à la gratuité
– Ça va paraître bizarre venant d’un péquiste, mais il ne faut pas que l’ASSÉ lâche son combat, admet Pierre Céré.
Le candidat ne se cache pas pour le dire. Il croit qu’ultimement le Québec devrait se doter d’un système d’éducation gratuit pour tous. Cependant, il ne veut pas condamner le sommet de l’éducation tenu par sa chef Pauline Marois et son collègue, le ministre de l’Éducation supérieure, Pierre Duchesne. Ce sommet s’était conclu à l’hiver 2013 avec l’ajout d’une indexation aux frais de scolarité et une baisse du crédit d’impôt pour les études.
– Je crois que Pierre Duchesne a fait un excellent travail. Et étant donné qu’il fallait faire des choix entre des bourses et le crédit d’impôt, je crois que le gouvernement a pris la meilleure décision.
Enfin, pour le moment. Parce que selon Pierre Céré, il faudra un jour réinjecter massivement de l’argent dans le système d’éducation et ouvrir la voie à la gratuité scolaire. La question est de savoir si son parti sera du même avis et s’il se portera comme défendeur de la question rendu à Québec.
D’ici là, Pierre Céré a encore les deux pieds dans Montréal et il a du millage à faire s’il veut ravir Laurier-Dorion au libéral Gerry Sklavounos. Fraîchement arrivé en politique, il avoue avant de terminer notre entretien n’être pas encore habitué à tout ce que comporte la joute électorale. Les appels et le porte-à-porte le dépaysent encore un peu. Et il est dur de dire s’il aime la chose.
Pour ce qui est du Canadien, je n’ai appris le résultat que plus tard en soirée. L’équipe a perdu, mais s’est tout de même qualifiée pour les séries. N’en déplaise à certains politiciens, les séries se tiendront seulement après les élections. J’imagine que ce sera alors le bon moment pour inviter Gilles Duceppe et Pierre Céré à prendre un verre parce que l’eau c’est rafraichissant, mais plate en même temps.
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