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Dominic Arpin ne s’ennuie pas de Twitter (même s’il est un peu nostalgique)
Le 2 avril 2019 est une date importante pour Dominic Arpin, même s’il ne s’en rappelle pas tout à fait. Après 11 ans à alimenter presque quotidiennement son compte Twitter, il a subitement arrêté de publier sur la plateforme.
Dans les quatre années qui sont écoulées depuis, on peut compter sur les doigts d’une main les publications de l’animateur et grand amateur de plein air. Cinq petits messages qui détonnent avec son rythme d’autrefois, qui était de quatre tweets… par jour.
« Ça reste probablement les années les plus intenses que j’ai vécu sur les réseaux sociaux. Quand Twitter est apparu, j’étais comme un drogué qui tombe sur du crack. C’était maladif. », se rappelle-t-il.
On le retrouvait dans les palmarès des personnes d’ici les plus influentes de la plateforme. (« En toute franchise, j’avais une fierté d'[y] être », admet le principal intéressé.) Encore aujourd’hui, il dépasse les 375 000 abonnés. C’est plus que Véronique Cloutier, Julie Snyder et Maxime Bernier.
« Dans la décision de délaisser la plateforme, il y avait un peu de ça : reprendre ma vie en main. »
Et si son désintérêt pour Twitter pouvait nous en dire plus long sur l’évolution du réseau social?
Un départ non prémédité
La dernière année a été pleine de rebondissements pour l’entreprise basée à San Francisco.
Le processus de rachat par Elon Musk s’est échelonné sur plusieurs mois et a presque fini devant les tribunaux. Des milliers de mises à pied ont suivi. Des diffuseurs publics à travers le monde ont effectué une levée de boucliers devant le libellé « Média financé par le gouvernement » apposé à leurs comptes. Et le fameux « crochet bleu », autrement destiné à confirmer qu’une personnalité publique était vraiment la personne qu’elle clamait être, est devenu un privilège payant.
C’est cette dernière goutte qui a fait déborder le vase de Guy A. Lepage, probablement la personnalité québécoise qu’on associe le plus à Twitter.
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Contrairement à l’animateur de Tout le monde en parle, qui a fermé son compte avec un coup de gueule il y a quelques semaines, Dominic a fait sa sortie de manière beaucoup moins spectaculaire.
Ainsi, en ce fameux 2 avril 2019, il montrait au monde une photo de Mika, sa goldendoodle au poil foncé. Puis, silence radio jusqu’en mars 2021. On a collectivement eu le temps de découvrir à la dure ce qu’était un coronavirus avant son tweet suivant.
« Tu me replonges dans mes souvenirs… j’essaye de voir si y’a un X dans le calendrier. Je vois pas un événement en particulier qui a fait que j’ai arrêté de publier. »
Il admet que les années qui ont précédé ont été « intenses » et « parmi les plus trippantes, professionnellement ». « Mais tout le reste en souffrait. J’avais tout le temps mon téléphone dans ma main. J’ai négligé ma famille, ma blonde. Y’a eu des moments difficiles. »
« J’ai délaissé Twitter parce que la personne que j’étais a évolué. Mes intérêts ont changé. »
Si s’éloigner de Twitter lui a permis de retrouver un certain équilibre, il sentait aussi que la plateforme correspondait de moins en moins à sa personnalité. En effet, celui qu’on a découvert grâce à l’émission VLOG, à TVA, nous révélait de plus en plus son côté #VanLifer.
« L’arrivée du plein air et du sport dans ma vie, ça a pris beaucoup de place. J’aime la photo et Instagram me servait à m’exprimer différemment de Twitter. »
Mais plus encore, c’est l’expérience Twitter en elle-même qui avait changé, assure-t-il.
Gloires et misères d’un réseau social
Twitter a été créé en 2006 par quatre personnes, dont Jack Dorsey, le plus connu du groupe. Dès l’année suivante, la plateforme comptait plus de 300 millions d’usagers actifs par mois. Un demi-milliard de tweets étaient publiés chaque jour.
L’émission VLOG arrive quant à elle en 2007. Dominic Arpin, boulimique du web et des réseaux sociaux, utilisait Twitter comme un outil de travail et est rapidement devenu une référence au Québec.
« Ça me rappelle des moments de grande frénésie. Ça m’a propulsé… », décrit-il. Il est clairement habité par une nostalgie de ces années où Twitter créait « le buzz ».
« Oui, je pense que c’est le bon terme, confirme-t-il. Je regarde ça avec nostalgie, comme je regarde la période des blogues avec nostalgie. » Il s’explique : « On se créait des communautés. Il y avait un réel échange. On pouvait grandir par les commentaires des autres ».
« On parle beaucoup du clivage et de la haine sur Twitter. Je suis pas un gars super polarisant et c’est l’endroit où j’ai le plus été attaqué, où j’ai reçu le plus de haine. »
Guy A. Lepage était célèbre pour ses coups de gueule. Son côté provocateur invitait peut-être parfois les discussions houleuses avec d’autres personnalités publiques comme avec des quidams. Dominic, de son côté, a un côté plus consensuel : il ne voulait pas causer la controverse ou polariser. Et pourtant, avec le temps, il s’est souvent retrouvé à recevoir des insultes.
« Ça commençait à être lourd de recevoir des menaces un jour sur deux. Aucune plateforme n’est parfaite, mais le pourcentage d’insultes était plus élevé sur Twitter. Certains le vivent bien; moi, j’ai pas besoin de ça », explique-t-il.
Pas de retour en vue
En préparation de notre entrevue, Dominic est allé se promener sur le réseau social. « Quand je vais voir dans mon fil, c’est des trucs publiés par des gens que je ne connais même pas », se désole-t-il.
En effet, dans les derniers mois, la compagnie d’Elon Musk a commencé à pousser de plus en plus fort son fil « Pour vous », qui, comme celui de TikTok, utilise un algorithme pour proposer du contenu populaire qui pourrait intéresser ses utilisateur.rice.s, même si ça vient de comptes auxquels ils ne sont pas abonnés.
« Ce que je lis dans les médias ne me donne vraiment pas le goût de me réinvestir dans cette plateforme-là. »
Ça fait partie des expérimentations de Musk pour rendre la plateforme plus intéressante. Certain.e.s vont apprécier, d’autres, comme Dominic Arpin, n’y voient pas l’intérêt.
« C’est comme avec une blonde que tu rencontres jeune. À un moment donné, tes réalités changent, tu réalises que ce n’est plus la personne avec qui t’as envie de passer le reste de ta vie. J’ai une nostalgie des beaux moments passés sur cette plateforme, mais notre histoire est terminée. »