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Dodo chez un ami

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L’autre jour, mon fils de 5 ans a invité des petits amis de l’école à jouer à la maison. Les petits bâtards m’ont vouvoyé, y m’ont même regardé croche quand je faisais des blagues et m’ont appelé “Monsieur le papa de Xavier” quand ils se mouchardaient.

À la fin de l’après-midi, mon rejeton est apparu dans le salon pour me demander s’il pouvait aller dormir chez son ami.

Son visage s’est détérioré au son de mon “Non. Une autre fois.”

Je me suis donc rappelé (du même coup) combien c’était magique quand nous allions dormir chez un ami.

Vous vous rappelez ?

Lors de la demande, on joignait nos mains en prière en hurlant : “PLEASEEEEEEEE!!!!”

On pognait notre sac à dos de Hulk Hogan, on amenait 2-3 cassettes de Nintendo, un pyjama délavé avec une face de ninja dessus pis notre toutou favori. Pour ma part, c’était un singe blanc avec le cul rose qui portait des lunettes fumées, que mon père avait gagné à La Ronde en “gunnant” la yeule d’un clown avec un pistolet à eau.

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Rendu chez notre ami, c’était malade! Notre ami avait toujours plus de jouets que chez nous, et surtout, des jouets plus cool ! Tu rentrais dans la salle de jeux et tu te sentais comme un curé dans un orphelinat, tu avais le goût de toucher à tout.

Je ne sais pas pour vous mesdames, mais chez les garçons, nous mettions toutes nos bonhommes dans un tas et nous pigions aléatoirement pour se faire une armée de figurines.

Le p’tit crisse d’ami ne voulait jamais que tu choisisses les plus hot. Monsieur finissait avec un G.I. Joe, un Robocop pis le lance-pizza des Ninjas Turtles. Pis toi, avec un Kermit sur un skate de chez Mcdo que tu crinquais par en arrière, un porte-clé de joueurs de hockey et une Barbie toute nue avec juste une jambe garnie de traces de morsures de chien.

Après ça, on jouait à la cachette! Dès que tu pognais une bonne cachette, tu devais sortir parce que tu avais trop envie de pisser ! Next game!

NHL 94! Ton ami de marde connaissait le truc de faire le tour du filet pis bugger le goaler pour faire plus de but! Enculé! La chicane pognait, mais sa mère réglait le conflit à coup de beurrées de beurre de pinotte pis des Quiks avec fucking trop de chocolat en poudre. On devait taper pour avoir le droit aux “tites mottes” qui collaient dans le fond du verre. Si tu étais plus chanceux, tu avais le droit à la liqueur aux raisins qui était stockée dans le garage! Les parents disaient : “On a acheté ça SU’ Club Price.”

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On avait nos moustaches de jus de raisin et on s’en allait jouer au mini hockey dans le sous-sol.

TU NE CONNAIS PAS LE MINI HOCKEY ????!!!! WTF ?!?

C’est simple, ça te prenait une mite de baseball et un mini hockey. Pour délimiter les buts ? Facile! Une vieille pantoufle pis un coin de mur. Pis si y’avait un bar dans le sous-sol tu étais chanceux, ça faisait automatiquement l’autre but.

On incarnait Raymond Bourque, Ed Belfour pis Pavel Bure dans le même petit corps, celui aux genoux pleins de corne à force de se déplacer sur le tapis.

Après venait le grand moment de la douche! Une salle de bain toute verte, des savons en hippocampe dans une coupe décorative et le fameux code de douche! Chaque maison a son calisse de code de douche! Tourne l’eau chaude au max, tape 2 fois sur le robinet pis après monte l’eau froide graduellement!

Sa mère nous faisait un lit avec 3 coussins de divan reliés dans un drap contour. Mon ami et moi jasions des plus belles filles de l’école et surtout de la belle Sophie qui était capable de faire un lapin avec ses petits gants!

“DODO J’AI DIT !!!!!!!”, hurlait le père de l’ami.

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Le premier “Dodo j’ai dit” résonnait partout dans ma petite cage thoracique. Mon ami continuait de parler. Son père s’approchait de la chambre. Chaque pas en direction de nous faisait en sorte que mon estomac se serrait.

Il nous chicanait, mon ami répondait à son père, je me cachais la face dans l’oreiller pour ne pas qu’il me voit rire. Après 2-3 menaces de me rapatrier chez moi et bla bla bla… Le même genre de menaces que mon père me faisait dans le miroir du char quand je m’énervais avec mon frère en arrière. On voyait juste son haut de moustache brasser et ses sourcils qui bougeaient rapidement : “On va faire demi-tour Jonathan Roberge !!! Ça ne me dérange pas !”

(Nom complet cité lors d’une dispute = Tes parents étaient vraiment fâchés.)

Tout le monde s’endormait, sauf moi… On est tous comme ça! La maison de notre ami nous faisait soudainement peur. Plein de bruits weird et on était incapable de s’endormir! On avait tous les mêmes trucs. On allait voir ses parents et on sortait l’excuse de tous les enfants pas à l’aise à dormir quelque part : “J’ai mal au ventre.”

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C’était le festival de la grosse bouillote chaude sua bedaine et les larmes de crocodile qui venaient soutenir mon mauvais jeu d’acteur qui suppliait mon père au téléphone de venir me chercher. Il sacrait, il déneigeait le char et il venait me chercher. J’embarquais dans un char avec l’intérieur rouge vin. (Y’étaient toutes rouge vin me semble quand j’étais petit!)

C’était le silence total dans l’auto. Le son des flashers, qui sont toujours plus fort le soir, battait le tempo du malaise. Je regardais mon père et je me disais : “Ouin… Ce gars-là est motivé… Et fucking naïf… Jamais je vais me faire chier à aller chercher mon fils à minuit, en plein hiver, à l’autre bout de la ville.”

Ti-cul, c’est pour ça que tu n’es pas encore allé coucher chez ton ami.

Parce que je sais que je vais devoir aller te chercher…

Un jour, tu pourras! Pour l’instant, je ne te sens pas prêt, jeune padawan…

***

Pour lire un autre texte de Jonathan Roberge : “Ne touche pas à mon bébé”

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