Il y a une semaine jour pour jour Samuele présentait Dis-moi, nouvel EP composé essentiellement de chansons promenées en spectacles et réarrangées pour l’occasion, auxquelles s’ajoute un nouveau titre portant le même nom que l’album… ou l’inverse, c’est selon. Nous l’avons croisé lors de son premier passage au FME. Entrevue avec l’artiste qui chante avec des convictions de fer dans une pochette de velours.
J’ai été surprise de savoir que cette année, c’est ton premier FME, à la fois comme artiste, mais aussi comme membre de la foule…
Je ne passe pas souvent dans le coin (rires) et bien honnêtement je ne sors pas quand je n’ai pas à le faire. Alors si je n’ai pas joué dans un festival, c’est que je n’y ai probablement jamais mis les pieds. Je suis vraiment contente que mon travail m’oblige force à sortir de chez moi : je n’aime pas les foules, l’anxiété n’est jamais bien loin, disons que je ne suis pas vraiment un party animal. La culture de faire la fête sur trois jours, quand j’avais 15 ans ça me faisait tripper fort, mais là j’ai passé 30 ans, j’ai un kid à la maison. Quand je ne travaille pas, je préfère y rester.
Mais… aimes-tu les festivals?!
Oui oui, bien sûr, totalement! Je suis super contente d’être au FME! Tout le monde me disait que c’était vraiment cool, alors j’avais hâte de venir expérimenter. Tout le monde est ici. En fait, je vois tous mes amis de Montréal que je ne vois jamais. Ce que j’aime des festivals c’est qu’on se rencontre. C’est un métier qui est solitaire, on est chacun de notre bord. C’est dans les festivals qu’on peut se voir, qu’on peut voir les shows des autres aussi et se faire des amis. C’est ça que j’aime beaucoup des festivals.
Tu viens présenter ton dernier EP, dont j’ai la pochette entre les mains : une collection de langues roses en velours. Bel objet!
Ça, c’est grâce à ma chum Jessika Roy de la coop Coup d’griffe, qui est vraiment geek en sérigraphie. Ça faisait longtemps qu’on en jasait, on voulait l’essayer. Je suis très contente du résultat. L’objet, c’est quelque chose que j’apprécie quand j’achète un album, j’ai un rapport assez spécial avec ça. Une pochette, c’est une oeuvre d’art, ça donne un aperçu de l’univers de l’album. Et quand tu croises de nouveau la pochette d’un album que tu as aimé, c’est tout cet univers-là qui te revient en tête. Ce n’est pas pour rien que j’adore les vinyles et tout le cérémoniel qui les entoure. Tu peux pas juste faire jouer un vinyle et partir. Tu dois rester aux alentours pour changer de face, il faut le clipper, le nettoyer, en prendre soin. Comme on ne sortait qu’un EP en peu de copies, je me disais que ça valait la peine d’en faire une œuvre d’art, en faire quelque chose de cool. Et l’album est super sensuel, alors le velours, ça fonctionne!
« Une pochette, c’est une oeuvre d’art, ça donne un aperçu de l’univers de l’album. »
Sur le EP, on trouve trois chansons que tu faisais déjà en spectacle, mais que tu as réarrangées, dont Le goût de rien qui avait déjà été enregistrée en 2011. Je cherchais le bon mot en écoutant la nouvelle version. Elle est plus… langoureuse?
Il y a tellement un grand écart entre la personne que j’étais en 2011 et aujourd’hui. À l’époque, j’étais encore dans le placard, je me cherchais, j’habitais seule avec un enfant de 3 ans, je travaillais à temps plein et je faisais un album à côté. Disons que je n’avais pas beaucoup de temps pour me demander « qui suis-je? ». Depuis, j’ai grandi en tant que personne et je sais ce que je veux comme son. Cette chanson-là, elle dégouline de sexe et je l’assume!
Une évolution complètement réjouissante!
Cette toune-là a grandi aussi. On la faisait souvent en rappel et il y avait une bonne réaction du public, on a beaucoup de plaisir à la jouer. Tsé je finis sur le dos sur une table, avec des solos de guitare qui ne finissent plus, super cocky et j’adore ça. C’est pas vraiment un processus conscient de dire « je vais prendre une vieille toune et je vais la réarranger », un moment donné on s’est mis à jouer avec, elle est devenue autre chose, et je me disais que j’aimerais l’enregistrer, mais c’était clair qu’elle n’allait pas aboutir sur un nouvel album, ce qui est un peu le cas de toutes les chansons du EP. Malgré tout, fallait que ça sorte et ça donne un EP. Un EP pour faire l’amour!
Dis-moi, c’est une chanson qui parle de consentement, sans être « pédagogique ». Est-ce que tu crois à l’art comme outil de normalisation?
« Pour moi, être capable de décortiquer le consentement, ça permet de l’intégrer dans la vie de tous les jours. »
Quand j’étais jeune, je ne comprenais pas le consentement. À cause de ça, je n’ai pas toujours respecté le consentement des gens et souvent j’ai laissé des gens ne pas respecter mon consentement. Le jour où je me suis mis à réfléchir et que j’ai compris ce que c’était, ça a changé beaucoup de choses dans ma vie. Alors j’ai voulu propager la bonne nouvelle! Je ne me gêne pas pour en parler en show.
Et c’est bien reçu?
Mon argument principal, c’est que c’est sexy, la contrebasse part et on lance la toune. Y a un petit zine distribué qui parle des trois piliers du consentement : faut que ce soit éclairé, enthousiaste et ça se retire à tout moment. Sur scène, je raconte aussi de petites anecdotes. Pour moi, être capable de décortiquer le consentement, ça permet de l’intégrer dans la vie de tous les jours. Il y a tellement de gens qui ont plein de bonnes intentions, qui sont fondamentalement de bonnes personnes, mais qui posent des gestes qui ont des impacts négatifs sans s’en rendre compte. Mais le jour où tu intègres ce que c’est, c’est là que tu peux changer tes comportements.
Étonnamment, certains voient ça comme un obstacle! « Oh my god ça va être compliqué d’avoir le consentement à toutes les étapes »…
Faut changer cette perception-là! Je dis toujours que depuis que j’ai intégré le concept, je sais que si je propose quelque chose au lit et que je change d’idée en cours de route il n’y aura pas de conséquences négatives, alors je propose plus de choses et j’ai vraiment plus de fun!
Du fun, comme nous on en a eu à découvrir ce nouvel EP. Ce que vous pouvez faire tout de suite ici, si ce n’est pas déjà fait.
Et on suit Samuele là.