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Entretien avec Sarah-Maude Beauchesne sur la solitude apprivoisée
Devenir une femme qui sâĂ©coute.

URBANIA et Attraction Images sâassocient pour vous faire dĂ©couvrir la sĂ©rie Fourchette, Ă travers les yeux de son autrice Sarah-Maude Beauchesne.
La rĂ©putation de la plume de lâautrice, scĂ©nariste et maintenant actrice Sarah-Maude Beauchesne nâest plus Ă faire. Celle qui nous a partagĂ© les hauts et les bas de sa vie amoureuse tout au long de sa jeune vingtaine sur le blogue littĂ©raire « Les Fourchettes » est sur le point de dĂ©voiler la sĂ©rie Fourchette : jeune femme cherche amour propre. Dans cette adaptation, on retrouve Sarah, une femme dans la mi-vingtaine qui doit se remettre dâune peine dâamour dĂ©chirante. Celle-ci doit donc apprendre Ă apprivoiser la solitude dans une sociĂ©tĂ© qui fait tout pour nous faire croire que la recette du bonheur se trouve Ă deux. Afin de dĂ©mystifier les mĂ©andres de lâautofiction et de lâambiguĂŻtĂ© qui en dĂ©coule, on pose les questions Ă cette femme assumĂ©e qui nâa jamais eu peur dâaller « all-in » dans lâĂ©motion.
Dans lâadaptation de Fourchette, est-ce que tu as revisitĂ© des textes Ă©crits il y a longtemps?
Quand je me suis dit que jâallais transformer les billets de blogue en images, je me suis vite rendu compte que câĂ©tait trop littĂ©raire. Les fourchettes sont des Ă©tats dâĂąme, des essais Ă©motionnels. Il nây a pas de personnages, pas de quĂȘtes, etc. Avec mon expĂ©rience en scĂ©narisation, je me suis dit que ce serait de me tirer dans le pied dâessayer dâadapter les textes. Alors jâai replongĂ© dans ma vingtaine, jâai fait une chronologie, jâai relu mes journaux intimes et jâai créé une histoire avec ça.
Cette temporalitĂ© qui sĂ©pare lâhistoire de Sarah et ton prĂ©sent Ă toi, est-ce quâelle te rend plus ou moins vulnĂ©rable face Ă tout ça?
Depuis le dĂ©but des fourchettes, câest trĂšs rare que je me sois sentie vulnĂ©rable. MĂȘme quand câĂ©tait Ă chaud, jâassumais toujours ce que jâĂ©crivais. Les seules fois oĂč jâavais un malaise, câest quand je nâĂ©tais pas 100 % authentique. Avec le recul, jâai eu un coup de maturitĂ©, jâai pu analyser comment je me sentais. Jâai un regard de femme sur la sĂ©rie, ce que je nâavais pas quand jâĂ©crivais les premiĂšres fourchettes.
Comment câĂ©tait de devenir ton alter ego le temps du tournage?
Sarah, câest une extension de moi-mĂȘme. Câest moi avec une couche de fiction, moi embellie et enlaidie en mĂȘme temps. Jâai dĂ» me replonger dans lâĂ©motion, certaines scĂšnes mâont mĂȘme shakĂ©es. Câest lâavantage de jouer avec des comĂ©diens talentueux comme Guillaume Lorain. Sur le plan du jeu de comĂ©dienne, je ne voulais pas mâasseoir sur le fait que je jouais mon propre rĂŽle. CâĂ©tait de me mettre dans ma peau, mais dans la peau de moi plus jeune qui ne sait pas ce qui va lui arriver. Câest Sarah dans son moment prĂ©sent. Je devais redevenir une fille de 25-26 ans en crise existentielle qui apprivoise la solitude. Oui, câest un processus Ă©goĂŻste et non, je nâai pas vĂ©cu de grand drame, câest juste une histoire dâamour et de dĂ©samour, mais câest quand mĂȘme rĂ©el et ça mâa appris Ă©normĂ©ment de choses sur moi.
Quels sont les enjeux de partager publiquement des histoires qui font rĂ©fĂ©rence Ă des gens autour de toi? Comment est-ce que tu brouilles les pistes pour entre la fiction et lâautobiographie?
Jâessaie de garder ça assez flou. Ma rĂšgle, câest dâĂȘtre authentique. Je raconte comment moi je me suis sentie. Câest ma vision des choses. Oui, câest confrontant pour les gens qui se reconnaissent, mais câest mon rĂ©cit, câest mon point de vue. Peut-ĂȘtre que si on demandait aux personnes concernĂ©es de raconter cette histoire, ce serait autre chose. Pour moi, il nây a rien qui dĂ©passe la ligne parce que câest ma vĂ©ritĂ©. Je le vois comme un hommage aux gens qui mâont fait grandir.
Since day one, jâassume que Les Fourchettes, câest ma vie. Je nâaurai pas de malaise Ă raconter quelque chose si je feel que câest vrai. Je nâai pas honte de qui je suis, mĂȘme dans mes maladresses, mĂȘme dans mes folies passagĂšres, mes moves de marde, mes rĂ©actions de marde. Je pense que câest humain. Les Fourchettes mâont appris ça.
Le sous-titre de la sĂ©rie Fourchette, est « Jeune femme cherche amour propre », comment on fait pour le trouver ailleurs que dans le regard de lâautre cet amour propre?
Câest tough Ă trouver, câest long Ă trouver. Jâen ai fait ma quĂȘte personnelle pendant plusieurs annĂ©es. Je ne me suis jamais sentie belle aussi vivante quâĂ travers deux choses : mon travail, mon Ă©criture, et les femmes autour de moi, mes amies de filles, ma mĂšre et mes sĆurs. Ce sont les deux choses qui, maintenant, me remplissent le plus et qui me font sentir le plus awesome. Ăa prend du temps avant de switcher de mode, faut ĂȘtre bien dans sa peau, faut se connaitre, faut parler, faut lire, regarder des films, mais quand on pogne la twist, câest un feeling puissant. Au-delĂ de lâidĂ©e de lâattente dâaimer encore, jâen suis arrivĂ©e Ă un point de me dire, si ça arrive pas, câest pas grave. La finalitĂ© de mon bonheur ne sera pas de me matcher.
Sarah-Maude aujourdâhui, est-ce quâelle se sent plus dĂ©tachĂ©e du besoin dâĂȘtre aimĂ©e qui lâhabitait tant avant?
Je nâai pas de jugement par rapport Ă cette jeune femme-lĂ en quĂȘte dâamour. Câest un chemin nĂ©cessaire et peut-ĂȘtre inĂ©vitable quand tu aimes fort souvent. Je suis fiĂšre de la Sarah des fourchettes. Dâavoir assumĂ© quâelle avait crissement besoin dâaimer et de se faire aimer, dâĂȘtre allĂ©e all-in dans ses Ă©motions. MĂȘme si câĂ©tait maladroit parfois, mĂȘme si elle a fait de la peine. Je pense que toute personne qui Ă©crit de lâautofiction a besoin de se faire lire, de se faire comprendre.
Socialement, câest comme si le couple nâavait jamais besoin dâĂȘtre justifiĂ©, mais la solitude oui⊠Ăa vient dâoĂč selon toi cette idĂ©e que la vie Ă deux est plus confortable que la vie seule?
Câest nos parents, la sociĂ©tĂ©, les livres, les films quâon regarde quand on est ados. Tout glorifie le couple et personne ne parle de ce qui arrive quand tâes toute seule. Personne ne dit que câest positif, tout le monde dit que câest nĂ©gatif. Câest ça des fourchettes, câest de profiter de la solitude et rĂ©aliser qu âĂȘtre seule câest aussi ĂȘtre bien entourĂ©e. Câest ça que je voulais dire, parce que mon dieu que je nâai pas lu ou vu grand-chose qui me disait que câĂ©tait possible. Si je peux crĂ©er quelque chose qui peut ouvrir le dialogue, et bien tant mieux.
Je pense que quand tâes toute seule, tâas besoin dâen apprendre sur toi, de tâoccuper de toi-mĂȘme, dâĂȘtre ta propre amie et ta propre alliĂ©e. Souvent dans le tourbillon dâĂȘtre Ă deux, on sâoublie. Et quand tu sens le besoin dâĂȘtre seule, câest que tâas le besoin de te construire. Ătre seule câest un processus Ă©goĂŻste, mais dans le bon sens. Faut juste sâĂ©couter, on a juste tellement la pression de trouver son partner, dâĂȘtre duo et ça me gosse. Si tu veux ĂȘtre Ă deux, sois Ă deux et si tu veux ĂȘtre seule mĂȘme si câest tough, sois seule.
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Fourchette, la sĂ©rie, est disponible dĂšs maintenant sur ICI TOU.TV. Ăcrite par Sarah-Maude Beauchesne, rĂ©alisĂ©e par Catherine Therrien et produite par Attraction Images, elle mettra notamment en vedette Sarah-Maude Beauchesne, Guillaume Laurin, Magalie LĂ©pine-Blondeau et Bianca Gervais.