Logo

Des caméras sur les policiers

Publicité

Il y a quatre ans, un policier de ma commune à Cayes-Jacmel en Haïti a été lynché par une foule en colère après une grosse bavure sur un jeune en état d’arrestation. Ce jeune était mort suite à des blessures par balles infligées alors qu’il était menotté. Une foule s’était précipitée sur le policier quelques temps après les faits et l’avait simplement tabassé à mort. Les gens ne croyaient pas la justice capable de poursuivre un policier devant les tribunaux.

Malgré cette situation horrible, la confiance envers les policiers s’améliore peu à peu en Haïti. Depuis quelques années, de nouvelles approches sont par exemple mises en place dans la formation des policiers haïtiens, celle-ci en grande partie assurée par des policiers québécois. Des bavures ont lieu encore trop souvent, mais les policiers responsables font parfois (enfin) face à leurs actes.

Publicité

Une commission d’enquête vient ainsi tout juste d’être mise en place suite à des bavures dans la nuit du 17 au 18 août dernier ayant causé 43 blessés, dont deux par balles, dans le centre du pays. L’un des policiers accusés de ces bavures ce serait d’ailleurs enfui aux États-Unis après les faits. Les autorités américaines sont maintenant à sa recherche.

Au Québec, où je séjourne pour quelques jours, le lien de confiance entre les policiers et une grande partie de la population s’amenuise depuis quelques années, à tout le moins suite à la grève étudiante de 2012. Depuis trois ans, les cas de bavures apparentes se suivent, celui du cycliste happé par un policier à Québec la semaine dernière en est le dernier exemple.

En 2012, les ados d’amis étaient rentrés en pleurs d’une des fameuses manifs pacifiques contre la loi spéciale du gouvernement : « Comment des policiers peuvent faire ça, ne devraient-ils pas nous protéger? »

Publicité

La cassure s’était opérée : ils n’arrivaient pas à s’expliquer le non-sens de policiers, qu’ils croyaient là pour assurer leur sécurité, devenus une menace. Aujourd’hui, le doute s’est installé. Comme pour plusieurs, le lien de confiance était mis à l’épreuve.

Comment respecter celui qui doit nous protéger alors qu’un de ses collègues a déjà agi violemment ou de manière intimidante avec nous? À moins d’habiter dans une dictature, la chose est difficilement explicable à des enfants. De grandes discussions sont devenues nécessaires dans plusieurs chaumières pour expliquer et comprendre tous les enjeux et contradictions morales exprimées par des employés de la fonction publique menaçants avec les jeunes.

Les exemples d’archaïsme dans les techniques d’intervention des policiers, de la simple intimidation à des morts par balles, sont toujours marquants.

Loin de rassurer, on exonérait un policier montréalais la semaine dernière pour avoir tué une personne en crise psychologique. Le même jour, un policier de Québec a roulé à toute allure sur un cycliste pour une simple infraction de la route. Nous n’assisterons peut-être pas à des cas de lynchage de ci-tôt au Québec, mais le doute sur le professionnalisme de plusieurs agents de la paix, maintenant bizarrement nommé « force de l’ordre », est renforcé.

Publicité

Malgré les problèmes éthiques que ceci pourrait soulever, je me rallie de plus en plus aux syndicats des policiers sur une chose : les voitures de police, voire les policiers eux-mêmes, devraient être tous et toutes munis de caméras.

La façon dont on pourrait avoir accès à ces images devra être débattue, mais tant les citoyens que les policiers seraient mieux protégés par cette vision indépendante d’un travail aussi sensible et risqué.

Labeaume a beau ne pas comprendre les tensions existantes entre les policiers et des classes défavorisés de sa belle ville, il est temps que la lumière soit faite sur les situations d’abus et d’apparence d’abus policiers.

Twitter : etiennecp

*Photo du haut : T-shirts en vente dans la convention de policiers Urban Shield la semaine dernière à Oakland aux États-Unis. Source : profil Twitter de Shane Bauer

Publicité