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Décevoir, c’est pire que tout

L’affaire c’est qu’il ne faut jamais avoir d’attente

Par
Jay Du Temple
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Décevoir quelqu’un que tu aimes, c’est pire que tout. Peut-être pas pire que ne pas avoir lu Harry Potter, mais quand même. (Les gens commencent à me le dire quand je ne fais pas de référence au monde des sorciers, donc je ne prends pu de chance, je le fais dans la première ligne.)

Décevoir, ça veut dire que la personne avait des attentes. Elle t’estimait, te faisait confiance et tu n’as pas livré la marchandise. C’est le pire sentiment parce que tu passes de «j’aime tellement que j’ai des attentes élevées» à «j’aime moins que j’aimais avant».

L’affaire c’est qu’il ne faut jamais avoir d’attente. J’ai trippé à mon bal de finissants parce que j’ai loué mon habit la semaine avant, il shinait, je n’ai pas bu une goutte d’alcool parce que je conduisais, j’ai passé la nuit à parler avec mes meilleurs amis du secondaire, j’ai regardé le soleil se lever et c’était parfait parce que je n’avais aucune attente.

Lorsque tu as des attentes, il n’y a pas de milieu. Tu aimes ou tu es déçu.

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J’ai trippé lors de mon dernier voyage au Nicaragua parce que je suis allé acheter une gourde, un sac et un drap d’auberge au Sail avant mon show de vingt heures, je faisais ensuite un spectacle à minuit, je suis allé prendre une bière avec mon sac de plastique Sail entre les mains, j’ai fait mes bagages, sauté dans le taxi, j’ai googlé «Nicaragua» avant d’arriver à l’aéroport pour savoir vers où je décollais à 6h et je n’avais aucune attente.

J’ai trippé en visionnant le film «The secret life of Walter Mitty» parce qu’on était en Gaspésie et ce soir-là, on voulait faire écouter Slapshot à un Français qui était de passage en couchsurfing chez un ami, mais on ne l’a pas trouvé nulle part, donc on a mis «The secret life of Walter Mitty» avec Ben Stiller qui, avant ce film, était un peu comme les restaurants Quiznos, je sais que ça existe et quand j’en vois un, je suis content, mais une fois que j’ai fini mon repas, je n’ai pas nécessairement hâte d’y retourner. On l’a mis et là Kristen Wiig est arrivée. Elle est comme Marc Labrèche, je n’y pense pas chaque jour, je ne le vois pas souvent, je n’écoute pas tout ce qu’il fait, mais je l’adore. Puis, j’ai capoté sur le film parce que je n’avais aucune attente.

Décevoir c’est difficile parce que ce n’est pas quelque chose que l’on contrôle.

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Je n’ai pas capoté sur «Diner de cons» parce que je l’ai vu trop tard dans ma vie et tout le monde m’avait dit que c’était la chose la plus drôle au monde. «Tu ne comprends pas, c’est pissant!» Plus que «Le Masque»? «Big time! C’est Français!» Plus que «Astérix: Mission Cléopâtre»? J’avais trop d’attentes. J’ai ri, mais je n’ai pas ri à la hauteur des attentes que j’avais, donc j’ai été déçu.

Lorsque tu as des attentes, il n’y a pas de milieu. Tu aimes ou tu es déçu. À la seconde où c’est un tout mini petit simili peu en dessous de ce à quoi tu t’attendais, le verbe «décevoir» est de mise. Comme quelqu’un qui arrive à 10h01 à un rendez-vous qui était prévu à 10h, même si ce n’est que de soixante secondes, tu es dans la gang des «en retards», autant que celui qui arrive à 10h30.

«Je m’excuse», il ne faut pas le dire, il faut le montrer par des actions claires.

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Décevoir c’est difficile parce que ce n’est pas quelque chose que l’on contrôle. L’amour qu’une personne porte pour soi et ce dont elle s’attend de nous, on ne peut pas toujours le savoir. Je voudrais que Emma Watson m’aime, mais je n’y peux rien, elle ne répond plus à mes pokes. La difficulté avec ça, c’est que décevoir quelqu’un que tu aimes, ça fait vraiment mal parce que tu te mettais toi-même des attentes par rapport à cette personne-là. Tu ne voulais pas la décevoir, donc le coup rentre deux fois plus fort.

Il faut relativiser à ce moment-là. Les attentes étaient-elles trop élevées ou superflues? Dois-tu des excuses? S’excuser est un verbe que je n’aime pas. «Je suis désolé», «je m’excuse», je trouve ça tellement vide. «Je m’excuse», il ne faut pas le dire, il faut le montrer par des actions claires. Rester authentique. Être là pour l’autre. Assumer qui tu es, te prouver et prouver à l’autre qu’il n’a pas à être déçu de toi. Juste à t’aimer pour qui tu es, te souhaiter le meilleur et quand tu échappes la balle, être présent pour toi parce que la seule personne qui devrait avoir des attentes envers toi, c’est toi-même.

Pour lire un autre texte de Jay du Temple: «La lourdeur du «il faut»».

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