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Dans un cinéma près de chez vous en juillet 1998

Chronique nostalgie.

Par
Catherine J. Lalonde
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Été 1998. Le temps est bon, le ciel est bleu. J’ai au moins deux amis qui ne sont pas mes amoureux parce que j’ai 12 ans et ce qui m’intéresse c’est de faire du rollerblade et boire de la slush avec Magali.

Tous les soirs, on loue des films au club-vidéo ou on essaie de convaincre nos parents d’aller au cinéma. Le fabuleux Cinéma 9 de Gatineau a ouvert ses portes deux ans plus tôt et on n’en revient pas encore. Cet endroit ultramoderne offre neuf films par soir, de l’air conditionné et un son de FOU pour regarder Twister (ou plutôt Tornade parce qu’on allait voir les films en français). En plus, en bas du Cinéma 9, il y a un nouveau resto qui s’appelle Pizzédelic et les pizzas sont carrées et ils mettent des ingrédients comme des épinards et du feta dessus. Si vous saviez à quel point le monde s’offre à nous!

Le matin, et surtout le mardi parce que ça va coûter moins cher, on découpe les horaires dans le Journal Le Droit ou on appelle à la ligne info du cinéma pour connaître l’heure des séances. Internet? Voyons, on n’a pas ça chez nous.

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Armageddon joue à 7 h 05 ou à 9 h 10. Mais c’est sûr que mes parents voudront pas que j’aille à celui de 9 h. Faudrait qu’ils aillent nous conduire vers 6 h 30. Va falloir les convaincre de souper tôt…

– Ok! Au pire viens chez moi et on mettra des pizzas pochettes dans le micro-ondes.

– Humm… ma mère veut pas que je mange ça…

– Ben là on y dira pas! Tu veux-tu voir Ben Affleck ou pas?

– Mets-en! Je pense que je vais mettre son poster dans ma chambre!

– Hey! L’autre jour, Richard, le père de Joannie, a dit que Armageddon ça ressemblait au nom Armand Guindon. C’était tellllle-ment drôle!

Cet été-là, on est allées voir Saving Private Ryan (Il faut sauver le soldat Ryan) et j’en ai appris plus sur la Seconde Guerre mondiale. On a vu There’s something about Mary (Marie a un je-ne-sais-quoi) et on n’a pas tant ri à part le bout où elle a quelque chose de collée dans les cheveux. J’ai pas vraiment compris c’était quoi, mais c’était drôle.

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On a aussi regardé Ever After (À tout jamais) avec Drew Barrymore, mais l’histoire inspirée de Cendrillon était quétaine. Et moins l’fun que The Wedding Singer (Le chanteur de noces) à l’affiche quelques mois plus tôt.

Le meilleur film du mois de juillet 1998 était sans doute Truman Show (Le show Truman).

– Mag?

– Oui?

– Penses-tu que notre vie c’est comme celle de Jim Carrey? Penses-tu qu’on se fait filmer en ce moment et qu’on est dans une émission depuis notre naissance?

– Catou, je suis ben contente que tu me demandes ça parce que j’arrête pas d’y penser moi aussi. Imagine s’ils nous voient partir les boyaux des voisins et s’enfuir pour qu’ils se fassent arroser la prochaine fois qu’ils vont les utiliser…

– Ma mère sera pas contente… Elle qui me répète que son petit doigt lui dit tout. Dans le fond, peut-être que c’est parce qu’elle nous voit à la télé…

Parfois, on réussissait même à sortir de la ville et à aller au Ciné-Parc. Wow! On ne voyait pas si bien, on entendait mal à travers la radio, on avait trop chaud les fenêtres fermées et on se faisait piquer les fenêtres ouvertes, mais on regardait un film dans une auto!

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Comme mes parents trouvaient que c’était ben du trouble comparativement au vrai cinéma (avaient-ils tort?), on y allait avec Joannie et son père Richard. Dans son immense Ford Econoline 1988 des Jeux d’hiver de Calgary, on était bien, même si ça sentait le cigare. On était tellement énervées d’être au Ciné-Parc de Templeton qu’on criait, on riait, on chantait fort les tounes de Rock Détente jusqu’à ce qu’il sacre deux-trois fois ou que le premier film commence.

C’est moi ou tout ça c’était plus l’fun que de regarder Netflix toute seule dans mon lit? Qui vient au cinéma avec moi à la place? Magali travaille dans l’industrie du film à Toronto (au moins notre argent investi au Cinéma 9 a donné quelque chose!), Joannie est docteure à Châteauguay et son père a vendu son gros camion depuis longtemps. Allez, venez! J’apporte la slush.

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