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Dans l’univers de Khate Lessard

On a lu l'autobiographie de l'ex-candidate d'Occupation Double (qui est pas mal plus que ça!)

Par
Jasmine Legendre
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On la connaît pour son passage à Occupation Double, pour ses apparitions à La semaine des 4 Julie où elle a notamment documenté sa vaginoplastie et pour son authenticité lorsqu’elle aborde son quotidien de femme trans. Elle nous avait également offert un vibrant témoignage pour notre série vidéo Entre moi et moi dans laquelle elle s’adressait au Cédrick d’autrefois.

Cette fois, Khate Lessard a décidé d’ouvrir un peu plus la fenêtre sur sa vie privée en publiant Simple & fabuleuse, un livre qu’on pourrait qualifier de récit autobiographique. En un peu plus de 150 pages, elle relate son parcours, de son enfance jusqu’à la femme de 24 ans fierce et assumée qu’elle est aujourd’hui.

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Le livre rédigé avec la collaboration de Judith Lussier semble tout indiqué pour les adolescent.e.s et les jeunes adultes s’interrogeant sur le processus de transition. Ses fans pourront également y obtenir plusieurs réponses aux questions qu’ils se posent. Vendredi matin, nous avons trouvé deux copies dans notre boîte aux lettres, voici ce que nous avons retenu de notre lecture.

Se proposer comme modèle

Pour traverser ses moments difficiles et faire face à la critique, Khate a dû démontrer toute une force de caractère. Celle qui dansait sur Born This Way au début de sa transition cherche maintenant à devenir une inspiration pour les jeunes qui amorcent le processus, comme l’a été Lady Gaga pour elle à une autre époque. «J’ai développé un caractère un peu hautain pour que les gens sentent qu’avec toute cette confiance en moi, j’étais inatteignable», écrit-elle.

«J’ai développé un caractère un peu hautain pour que les gens sentent qu’avec toute cette confiance en moi, j’étais inatteignable», écrit-elle.

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Cette belle assurance transpire dans l’autobiographie. Khate met l’accent sur ses multiples projets de conférences dans les écoles, sur sa chaîne YouTube suivie par des milliers de personnes, sur son prix Mammouth qui lui a été décerné par les jeunes, mais revient aussi sur son métier d’influenceuse. «Quand tu deviens influenceuse, t’as aussi toutes sortes de compagnies qui te courent après pour que tu endosses leur produit. J’en refuse la moitié!», martèle-t-elle en réclamant son indépendance d’esprit.

Mais ce sont les quelques moments où elle se permet d’être plus vulnérable, s’ouvrant sur sa relation avec un chrétien dont la famille – très religieuse – va lui tenir des propos très durs, sur sa dépression ou sur sa dynamique familiale qui sont les plus touchants. Ce sont probablement ces passages qui parleront le plus aux lecteur.trice.s, plutôt que la description de ses collabs avec de grandes marques.

Vulgariser pour favoriser l’ouverture

Le style, abondant en points d’exclamation et en you go girl, s’apparente parfois à un long billet de blogue, mais représente bien la personnalité pétillante et généreuse de son autrice. Cela contribue aussi à remplir efficacement l’objectif premier du livre, c’est-à-dire démystifier le parcours d’une femme trans. « Si tu connais au moins une personne trans, t’as cent fois plus de chances d’être tolérant envers les autres personnes trans » affirme-t-elle.

«Si tu connais au moins une personne trans, t’as cent fois plus de chances d’être tolérant envers les autres personnes trans.»

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En montrant sa réalité au grand jour, on sent également qu’elle souhaite donner de l’espoir aux personnes trans qui vivent des difficultés. Elle a elle-même surmonté de nombreux obstacles, sa transition n’a pas toujours été de tout repos, elle a déjà été intimidée. Alors lorsqu’elle nous dit que malgré tout, il y a de la lumière au bout du tunnel, que ça ira mieux, le message sonne encore plus vrai.

On comprend aussi à travers les pages que le cheminement de sa famille s’est fait parallèlement au sien. Il a été certes été angoissant pour ses parents de voir le chemin qu’empruntait Khate, acceptant ses décisions à coups de laconiques «OK» et de «as-tu pensé à nous», mais on réalise vite que sa famille devient au fil du temps sa plus grande alliée. Aujourd’hui, sa mère se réjouit lorsque les gens la confondent avec Khate et sa grand-mère n’hésite pas à lui donner le maquillage dont elle cherche à se départir. On retrouve ainsi dans son récit beaucoup de lumière et de bienveillance.

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Éduquer avec humour

La grande force de Khate depuis ses débuts dans l’univers médiatique, de ses premiers vidéos YouTube jusqu’à l’écriture de son livre, c’est sa capacité à naviguer dans toutes les situations. Elle nous raconte, dans un passage émouvant, son expérience comme préposée aux bénéficiaires dans un CHSLD, un des premiers milieux de travail où elle s’est affichée en tant que femme.

«La plupart des bénéficiaires ne voyaient pas la différence. […] Dans l’aile psychiatrique, une madame avait vu deux gars s’embrasser à la télévision et faisait une fixation là-dessus depuis une couple de jours. Je lui ai dit que c’était correct deux gars qui s’embrassent, et je lui ai révélé que j’étais moi-même un garçon avant. Elle m’a dit: «T’avais un pénis?!» Et quand je lui ai dit que je l’avais encore, elle m’a répondu: “Mon Dieu! Ça doit être pratique!” Pas plus compliqué que ça!»

À coeur ouvert, elle s’ouvre également sur le Cédrick qu’elle était, une rare incursion dans l’intimité et le passé d’une personne trans, certaines préférant ne plus jamais parler de leur dead name.

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Tout ce côté accessible du récit fait en sorte que le livre peut être un premier pas intéressant pour les lecteur.trice.s qui voudraient en apprendre plus sur le vécu et l’expérience d’une personne trans. On y trouve aussi un lexique qui explique, en des mots simples, plusieurs termes liés à cette réalité.

Les mots de la fin sont laissés à sa soeur, qui l’accompagne dans son cheminement depuis les débuts. En parlant de Khate, elle écrit : «Elle possède une pelletée de défauts, et je dois avouer qu’ils jouent fortement à son avantage.» C’est vrai, elle a des défauts. Mais Khate aura tôt fait de nous rappeler que «si elle n’avait pas été aussi crue, vulgaire, dérangeante, qu’aurait-elle eu à dire et qui aurait entendu son message?» Elle fonce, tête haute, tête première, et c’est tout à son honneur.