COVID, blé d’inde, patates
Devant les files qui s’allongent aux comptoirs de dépannage alimentaire partout dans la province, il n’était pas question pour Jean-François Archambault et son équipe de garder les bras croisés. Celui qui, depuis 2002, est aux commandes de La Tablée des chefs, un organisme qui veille à nourrir les gens dans le besoin et à encourager l’éducation culinaire chez les jeunes, n’a fait ni une ni deux et a rapidement lancé Les Cuisines Solidaires. Son nom vous dit quelque chose? C’est peut-être parce que Jean-François était un de nos Extraordinaires en 2018 et on ne peut pas s’empêcher de penser qu’il l’est toujours autant deux ans plus tard.
Mais revenons à nos chaudrons. Aidé de ses partenaires, il a mobilisé en quelques jours les brigades de plusieurs chefs, des groupes de restauration et plusieurs acteurs de l’industrie alimentaire avec un objectif en tête : préparer 1,6 million de repas pour les Banques alimentaires du Québec. Un. Point Six. Million. De. Repas. Vous avez bien lu.
Pour y arriver, plusieurs restaurants fermés pendant la crise ont offert de prêter leur cuisine en adaptant les équipements pour mitonner cette quantité astronomique de nourriture. C’est le cas de la Taverne 1909 – signé St-Hubert du Centre Bell, où nous nous sommes rendus pour assister à la production des premiers plats.
D’emblée, le responsable des promotions de l’endroit, Vincent White, nous a avoué que son employeur n’a pas hésité une seule seconde avant d’embarquer dans l’aventure. On leur a alors confié la production de 50 000 repas au total, des pâtés chinois pour être précise. « La succursale de Montréal s’est engagée à cuisiner 30 000 repas, on a deux semaines pour les compléter » dévoile-t-il, avant d’ajouter que la succursale de Laval préparera les 20 000 autres.
«C’est une belle organisation qui fait du beau travail pour la communauté. J’ai tout de suite embarqué. On m’a appelé, j ’ai dit “oui oui, je peux être là dans deux jours.”»
Même son de cloche enthousiaste du côté d’Adam Martin, chef exécutif à la Taverne 1909 « C’est une belle organisation qui fait du beau travail pour la communauté. J’ai tout de suite embarqué. On m’a appelé, j’ai dit “oui oui, je peux être là dans deux jours.” » raconte celui qui n’en est pas à sa première collaboration avec la Tablée des chefs.
Après avoir reçu plusieurs palettes de pommes de terre, une quantité astronomique de viande hachée et de maïs en conserve (« on a arrêté de compter » nous a avoué Vincent devant la montagne de denrée), 8 cuisinier.ière.s se sont mis au travail.
Mais préparer des dizaines de milliers de pâtés chinois dans un endroit où les burgers, poulets rôtis et autres rôtis de boeuf sont habituellement à l’honneur, ça demande de l’adaptation. Les équipements ont donc été détournés de leur fonction habituelle pour répondre aux nouveaux besoins en cuisine. « Ici on a une marmite à vapeur qui, dans une cuisine normale sert pour faire des soupes ou des sauces, mais ça marche aussi pour faire saisir beaucoup de viande en même temps. » nous explique Adam en nous pointant une grande cuve haute d’un mètre, où cuit du boeuf haché. « Les grands fours, ce sont nos rôtissoires pour le poulet, mais comme on manque de place, on les utilise en ce moment comme étagères-réchauds » ajoute le chef débrouillard.
La production s’étend jusque dans la salle à manger, vide de clients, où un membre de l’équipe s’affaire à identifier et à empaqueter les barquettes de plats qui seront acheminés aux banques alimentaires. « C’est sûr qu’on est pas nécessairement équipés pour sortir 30 000 plats, mais avec juste un petit peu d’organisation, on va y arriver. » conclut Adam.
C’est Thérèse de la Petite vie qui serait fière.