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Complète la phrase…avec Emmanuel Schwartz, comédien et poète moderne.

Habitué de se poser des questions, le poète moderne est maintenant confronté aux nôtres.

Par
Antoine Desjardins-Cauchon
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Il est difficile à saisir, Emmanuel Schwartz. Il y a comme une aura de mystère qui flotte autour de lui. Autant par sa démarche artistique que par ses apparitions publiques, le comédien, auteur, musicien et metteur en scène ne se dévoile pas beaucoup. Cherchez par vous-même sur les zinternaits, peu d’informations coulent à son sujet. L’homme est discret, mystérieux, quasiment insaisissable…mais le comédien est bourré de talent pour interpréter des personnages tous plus intenses et singuliers les uns que les autres. Que ce soit sur les planches du TNM, dans une série-web sur tou.tv ou à la télévision de Radio-Canada le lundi soir, Emmanuel Schwartz pique la curiosité.

Voila pourquoi, chez URBANIA, on a souhaité collaborer avec lui le temps d’un article “Complète la phrase…” portant spécialement sur le théâtre, la beauté et l’art en général. Habitué de se poser des questions, le poète moderne est maintenant confronté aux nôtres.

Il y a de la beauté dans les yeux de mes parents quand ils se regardent avec tendresse.

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Le public qui va au théâtre est… croissant (au Québec, oui, oui !). Le public est multiple, il est jeune, vieux, gay, straight, bi, gender-fluid, d’origines mixtes, lettré, autodidacte, curieux, passionné, brassé, emmerdé, déçu, endormi, touché, transi d’émotion, captivé… et peut-être accroché par la peau des dents à cet idéal à atteindre: que la parole, la réflexion, la recherche d’idées nouvelles et la philosophie trouvent ou retrouvent leur place dans notre monde et s’arriment à notre vie sociale.

La création en groupe est…aussi difficile qu’agréable, aussi inspirant que castrant, aussi magnifique que compliqué. Une troupe peut être à la fois stimulante et écrasante. C’est ce caractère double de la création en groupe qui confère aux participants les rôles d’équilibristes, balancés au dessus d’un gouffre où s’échoue les amitiés brisées et les idées perdues, sur le fil du temps reliant le germe d’une idée à son exécution. Je crois que le mieux que l’on puisse espérer, c’est de se laisser transformer par l’expérience des autres.

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Il y a de la beauté dans…le visage des enfants de partout. Il y a de la beauté dans le sourire de ma blonde quand j’arrive tard et que je la réveille en l’embrassant pour lui dire que je suis là. Il y a de la beauté dans les yeux de mes parents quand ils se regardent avec tendresse. ¢ Tant de beauté dans les poèmes, les pièces de théâtre, les chansons, les toiles, les sculptures, les films et les écrits de mes amis et de mes ennemis, tant de beauté laissée par ceux qui sont morts bien avant moi et tant de beauté encore insoupçonnée de ceux qui viendront bien après. Il y a de la beauté dans cet ordre mystérieux qui fait s’aligner les victoires et les échecs, dans le choc de la force fléchie par la faiblesse, dans ces parfaits accidents que nous sommes en train de devenir ensemble. Et là où l’on croit qu’il n’y a rien, dans le silence profond du vide, la beauté nous attend encore, prête à nous dévorer.

Une troupe peut être à la fois stimulante et écrasante.

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Le star-système c’est…pas ma tasse de thé. En fait, j’aime pas le thé, tout court. Mais chacun a le droit de boire ce qu’il ou elle veut, surtout en se levant le matin.

Une audition, c’est comme…aller chez le dentiste. C’est plate, c’est inconfortable, mais c’est peut-être un mal nécessaire. Je le sais pas trop, en fait. Comme tout concours dans lequel y a pas de prix de consolation et dans lequel l’important n’est pas juste de participer, c’est un peu l’ordre cruel du monde en marche.

Un humoriste qui devient comédien, c’est…juste un changement d’étiquette. Pour moi, l’humour peut tout à fait être le fruit d’une démarche artistique légitime. ¢ C’est facile pour nous, acteurs de théâtre, ayant passé plusieurs années à étudier la voix, le corps en scène, le découpage d’un texte, de faire les frais avec nos vocabulaires, mais au fond, le talent, la capacité et le plaisir du jeu ne s’apprennent pas nécessairement.

L’argent et l’art sont...compatibles jusqu’à ce qu’ils ne le soient plus. Je pense que la logique de l’art échappe aux calculs, donc aux chiffres, donc à l’argent.

Pour moi, l’humour peut tout à fait être le fruit d’une démarche artistique légitime.

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La poésie aujourd’hui est…encore vivante, encore vive, encore brutale et brûlante, encore notre précieuse alliée, encore nos âmes déversées, encore nos utopies, encore nos mots mitraillettes, encore nos phrases longues qui tranchent dans la serviette mouillée serrée autour de notre cou collectif, encore notre goût de dire, encore et encore et encore et encore, encore nos guerriers du vide, encore nos manteaux longs de sens, encore nos chemins ventrus de pas curieux, encore nos machinations intérieures, encore nous contre le monde, encore le monde contre nous, et encore elle est là, infaillible, inatteignable, imaginaire.

La maladie mentale à l’écran est…très à la mode, on dirait, non ?

***

Ce n’est pas parce qu’il se fait discret sur les tapis rouges qu’Emmanuel Schwartz n’a rien à dire. Au contraire, en fait. On a comme l’impression que c’est ce petit coté sauvage bien préservé qui lui permet de rester proche de son art, au lieu d’en oublier les fondements en allant danser dans des décors penchés à 22.5 degrés à heure de grande écoute. Sa plume est crue et contemporaine, loin de la “cassette’ utilisée par bon nombre de politiciens et autres personnalités publiques. Et ça fait du bien. Suivez-le dans ses divers projets, à la télé, au cinéma ou sur le web, mais c’est sur scène que son talent est le plus magnifié. N’hésitez pas à sortir au théâtre pour le voir et l’entendre, ça redonne des cellules au cerveau entre deux épisodes d’Occupation Double à Bali.

Pour lire « Complète la phrase… » avec Philippe Fehmiu, c’est par ici!

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