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Comment se porte la musique francophone en Europe?

Y a pas juste au Québec qu'on fait du bon.

Par
Michelle Paquet
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Pendant mon voyage Ă  Bruxelles la semaine derniĂšre, on m’a appris que la scĂšne musicale francophone en Europe avait longtemps Ă©tĂ© considĂ©rĂ©e comme dĂ©passĂ©e ou « ringarde ». Un peu comme certains quĂ©bĂ©cois qui pensent qu’il ne se fait plus rien de bon en français au QuĂ©bec parce qu’ils entendent des chansons quĂ©taines Ă  la radio commerciale. Moi, qui tripe sur la musique francophone, j’ai Ă©tĂ© Ă©tonnĂ©e d’apprendre que c’est seulement depuis quelques annĂ©es que les jeunes EuropĂ©ens se sont remis Ă  avoir des projets en français.

Ce n’est pas une observation scientifique bien entendu, il y a toujours eu des artistes pour tenir le fort, mais on sent qu’il y a un renouveau dans la chansons française, autant chez nous que chez les Belges, les Français ou les Suisses, pour ne nommer que ceux-lĂ . J’ai profitĂ© de mon passage au Festival FrancoFaune de Bruxelles, qui m’avait invitĂ©e pour le week-end, pour parler Ă  deux programmateurs.rices de festivals francophones pour en savoir plus sur le lien qui unit les artistes de nos deux continents.

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La premiĂšre personne Ă  qui je voulais parler, c’est Cynthia Bellemare, responsable de l’administration, de la production et de la programmation du Festival FrancoFaune. Cynthia est une QuĂ©bĂ©coise qui habite en Belgique et elle Ɠuvre dans le monde de la musique depuis plusieurs annĂ©es. D’abord mĂ©lomane et animatrice radio Ă  MontrĂ©al, elle s’est dirigĂ©e vers une carriĂšre dans l’industrie de la musique, notamment au sein de la SOPREF (SociĂ©tĂ© pour la promotion de la relĂšve musicale de l’espace francophone). Ayant travaillĂ© des deux bords de l’ocĂ©an, Cynthia Ă©tait toute dĂ©signĂ©e pour rĂ©pondre Ă  mes questions.

Elle a rapidement confirmĂ© les rumeurs que j’avais entendues au sujet de la rĂ©putation de la musique francophone en Europe. « Ici, la musique se fait beaucoup en anglais, c’est ce qui est le plus rĂ©pandu, m’a-t-elle expliquĂ©. Je dirais que la scĂšne se passe Ă  80 % en anglais. » C’est donc plutĂŽt difficile pour les francophones de se faire entendre, surtout que le bassin de population qui parle leur langue est plus petit qu’ici. FrancoFaune a comme mission de montrer que la chanson française est plus Ă©clatĂ©e et diversifiĂ©e que l’idĂ©e qu’on en a du gratteux de guitare avec son tabouret.

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Le festival parle d’ailleurs beaucoup de biodiversitĂ© musicale, l’un des nombreux jeux de mots qu’ils s’amusent Ă  glisser ça et lĂ  dans leurs communications, mais aussi un vrai mandat qu’ils se donnent. « Avant on s’appelait la Biennale de la chanson française, mais on a changĂ© de nom, raconte Cynthia, parce que ça avait rien n’a voir avec ce que l’on fait pis ce que l’on veut faire. »

https://soundcloud.com/pierresaupluriel/un-enorme-tattoo

Je lui ai donnĂ© raison, moi si on m’avait invitĂ©e Ă  une biennale de la chanson, j’aurais possiblement pas fait 12 heures de vol pour ça
 Le nouveau branding, plus jeune et plus dynamique, reprĂ©sente mieux le genre de programmation qu’offre le festival, et reprĂ©sente mieux la chanson française actuelle.« Notre mission, c’est de montrer autant du hip-hop quĂ©bĂ©cois que de l’électro suisse ou de la chanson belge. On est pas des puristes, la chanson, on aime ça quand c’est Ă©clatĂ©. »

Des projets Ă©clatĂ©s, il y en avait plusieurs, mais il y en a trois qui ont volĂ© mon cƓur et que je souhaite voir (ou revoir dans certains cas) Ă  MontrĂ©al dĂšs que possible. La rappeuse française OrĂ© et son Ă©nergie de feu, le groupe Pierres avec ses textes lĂ©gers, mais sentis et ses tounes que j’ai encore en tĂȘte des jours plus tard, et finalement François Bijou, genre de Gab Paquet belge, avec sa pop Ă  paillette. Plusieurs artistes quĂ©bĂ©cois, dont Antoine Corriveau et SarahmĂ©e, ont aussi partagĂ© la scĂšne avec des groupes locaux et les cartes d’affaires des professionnels du milieu, agent, bookers, programmateurs, alouette, se sont passĂ©es de mains en mains. La table Ă©tait mise pour de vĂ©ritables Ă©changes musicaux au sein de la francophonie.

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Parmi les professionnels invitĂ©s, on comptait FrĂ©dĂ©ric Lamoureux, programmateur du festival Coup de cƓur francophone Ă  MontrĂ©al. Son festival arrange lui aussi de nombreux plateaux double ou des artistes europĂ©ens et quĂ©bĂ©cois complĂ©mentaires se cĂŽtoient le temps d’une soirĂ©e. Tout comme FrancoFaune, ils misent sur la diversitĂ© pour promouvoir la chanson francophone. « Je veux que tout le monde soit reprĂ©senté : connu, pas connu, homme, femme, la France, la Belgique, le Canada
 C’est ça qui est cool, d’essayer de trouver cet Ă©quilibre-là », m’explique Fred, qui a aussi travaillĂ© au sein de l’équipe des Francofolies.

Pour lui, faire des Ă©changes avec des artistes du reste de la francophonie, comme de mettre une Fishbach et un Bernhari sur la mĂȘme soirĂ©e, ça permet de se « dĂ©nombriliser », de sortir de notre scĂšne Ă  nous. « Quand tu sors un peu, tu rĂ©alises qu’il y a pas juste le QuĂ©bec. (
) Il y a plein de projets hallucinants [qui viennent d’ailleurs] et qu’on a pas dĂ©jĂ  vu plein de fois ici avant. » En associant des groupes « pareils, mais pas trop pareils » comme disait Fred, pour une soirĂ©e en plateau double, les programmateurs font dĂ©couvrir un.e artiste Ă  un public qui pourrait l’aimer et s’assure d’avoir un public pour un artiste de l’extĂ©rieur. C’est win-win, comme on dit en bon français !

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*Michelle Paquet a reçu le soutien financier de l’organisme LOJIQ pour se rendre au Festival FrancoFaune.