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Combien ça gagne un étudiant qui fait de ses études sa carrière?
Quand les études sont une passion et que la possibilité d’un doctorat se pointe le bout du nez, l’aspect financier d’une carrière universitaire est à considérer. Bourses, charge de cours, postes d’auxiliaire de recherche, correcteurs, les opportunités de financement sont multiples. Mais combien est-ce que ça paie? Comment est-ce qu’on y accède? Les réponses ne sont pas noires ou blanches et dépendent de nombreux facteurs. Cinq étudiants ou ex-étudiants au doctorat ont accepté de nous partager leurs expériences, et leurs revenus!
Le parcours « typique » et les fameuses bourses d’études
Boursier ou pas, des études doctorales ça se paye. Tout dépendants de l’institution ou de la discipline, les étudiants doivent avoir un plan pour le financer et éviter l’endettement. Soit ils travaillent à temps partiel à l’extérieur de l’université, soit ils se font engager à titre d’auxiliaire de recherche, de chargé de cours ou de correcteur.
La qualité du dossier académique est de première importance quand vient le temps de faire des demandes de bourses. Marie-Hélène, étudiante en troisième année du doctorat en éducation, a derrière elle un parcours pour le moins exemplaire : maîtrise terminée en moins d’un an, bourse FRQSC (21 000$ par année), publications, participation à des colloques scientifiques, contrats d’auxiliaire de recherche, charge de cours dès la 2e année du doctorat et plus encore.
Son succès, elle le doit à son travail acharné, mais aussi aux rencontres qu’elle a pu faire durant sa carrière. « Sans ma directrice de recherche qui m’accompagne depuis la maîtrise, je doute d’être rendue là où je suis maintenant, explique la jeune femme. Je considère avoir eu beaucoup de chance, mais j’ai aussi travaillé très fort pour mériter la bourse que j’ai en ce moment ainsi que toutes les opportunités de travail ».
Pas toujours simple d’obtenir des bourses
Le milieu académique valorise l’implication académique. Étant très compétitifs, ceux qui détiennent un parcours différent (pause d’étude, changement de discipline, travail à l’extérieur) peuvent avoir plus de difficulté à obtenir des bourses majeures. C’est une réalité que souligne Kenza, étudiante au doctorat en droit. « Personnellement, j’ai un parcours un peu atypique puisque j’ai fait une pause d’études pour travailler. J’ai toujours plus misé sur l’implication que les notes et ce n’est pas ce qui est principalement valorisé au niveau doctoral », explique-t-elle.
L’étudiant à la maîtrise ou au doctorat qui est en quête de financement doit aussi savoir que le processus d’application des bourses est relativement ardu. « Les documents de demande de bourse sont très longs à remplir et il faut sans cesse demander des lettres de recommandation. On se sent un peu comme quand on fait des collectes de fonds au secondaire et qu’on redemande toujours aux mêmes amis de nos parents d’acheter notre chocolat. C’est pénible et les refus sont nombreux », poursuit Kenza.
Ce point a aussi été soulevé par Jean-Christophe qui a étudié dans le domaine des sciences cliniques et biomédicales. « Les taux de succès sont variables, mais dans la recherche académique, le mot clé demeure ténacité! Il y a plusieurs bourses disponibles, mais encore faut-il avoir un dossier compétitif », nous dit-il. Ce dernier étant dans le domaine des sciences pures, raconte que son salaire doctoral a été payé moitié-moitié entre une bourse de recrutement de la faculté et ses superviseurs.
En plus des facteurs qui contribuent de façon évidente à l’obtention d’une bourse (bonnes notes, implications, publications, etc.), il faut aussi garder en tête que les opportunités de financements varient selon les domaines. « En sciences pures, il y a beaucoup d’opportunités de financement tandis qu’en sciences humaines, il y en a malheureusement très peu », nous dit Marianne qui termine un doctorat en anthropologie.
Pour cette dernière, le processus de financement a été plus complexe puisqu’elle a fait sa maîtrise dans une autre discipline. Elle connaissait donc peu de gens du milieu anthropologique. « Pour ma part, je savais que je travaillerais en même temps que mon doctorat, confie l’étudiante. Durant les deux premières années de mon doctorat, j’avais quelques bourses (environ 10 000$ par année) et un emploi à temps partiel (environ 15h semaine) ». Ceci dit, elle a tout de même réussi à obtenir la bourse du FRQSC (environ 20 000$ par année) pour les deux dernières années de son doctorat. Comme quoi, même si on a un parcours atypique, on peut réussir à obtenir des bourses.
Financièrement, la situation idéale est bien sûre d’obtenir une charge de cours.
Charge de cours et autres avenues financières
Financièrement, la situation idéale est bien sûre d’obtenir une charge de cours. Pour Jean-Christophe, c’était impossible dans son domaine, ou très rare, d’obtenir une charge de cours avant la fin de ses études. Pour Marie-Hélène, Marianne, Mathieu et Kenza, la charge de cours s’est avérée très intéressante. En plus d’être une expérience concrète d’enseignement, il s’agit d’une tâche bien rémunérée. Les honoraires varient entre 7000$ et 10 000$ par cours (2 à 3 heures en classe par semaine) par session selon les universités et les programmes.
Les contrats de travail comme auxiliaire de recherche ou correcteur sont aussi des avenues accessibles et relativement lucratives puisque les salaires varient entre 20 et 30$ de l’heure. Encore une fois, dans certains programmes, ces postes peuvent être plus rares.
Puis, comme le faisait remarquer Jean-Christophe, il existe d’autres manières d’arrondir son année lorsqu’on est aux études. « Dans certains domaines, les travaux de recherche peuvent être formatés en livre et vendus au grand public. Il y a aussi des plateformes en ligne qui permettent d’être tuteur virtuel pour de jeunes étudiants du secondaire, explique-t-il. Un des avantages du doctorat est de pouvoir bâtir son propre horaire. Cela permet parfois de trouver des opportunités de travail à temps partiel ailleurs qu’à l’université. Personnellement, j’ai même participé à un jeu télévisé et j’ai pu mettre la main sur un montant intéressant ».
Alors, ça gagne combien un étudiant au doctorat?
Parmi les étudiants questionnés, rares sont ceux qui ont dû travailler en dehors de l’université. Cela dit, cet échantillon ne prétend pas refléter une quelconque réalité. Ceux qui ont vécu majoritairement sur les bourses ont déclaré des salaires annuels allant de 21 000 à 35 000$. Toutefois, pour ceux qui ont eu des charges de cours et de nombreux contrats en tant qu’auxiliaire de recherche, les montants tournaient plus autour de 35 à 45 000$.
Ceux qui ont vécu majoritairement sur les bourses ont déclaré des salaires annuels allant de 21 000 à 35 000$.
Il faut savoir que les bourses scolaires ne sont pas imposables, mais les autres revenus oui. Le montant de 21 000$ est donc clair, tandis que le 35 à 45 000$ est partiellement imposable.
Est-ce possible de devenir prof?
Comme l’a souligné chacun des intervenants, les postes de professeurs d’université sont rares et très contingentés. Une fois le doctorat obtenu, certains se lancent dans un postdoctorat, d’autres deviennent chargés de cours – ce qui ne vient pas avec un statut permanent – tandis que d’autres partent travailler à l’extérieur du champ universitaire. « Suivant les statistiques données par la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l’Université de Montréal, seulement environ 20% des étudiants aux études supérieures atteindront des postes de professeurs suite à leurs études », explique Kenza. Être prof requiert non seulement un excellent dossier académique, mais aussi un soupçon de timing.
C’est d’ailleurs le cas de Mathieu qui a terminé son doctorat en histoire l’année dernière. « Mon ambition en entrant au programme de doctorat était certainement de devenir professeur. J’étais déjà très conscient que les emplois dans ce domaine sont rares et très compétitifs. L’obtention du doctorat est devenue un but en soi, un objectif réaliste qui évite de trop se projeter dans le futur et d’envisager les difficultés et les limites que présente le marché de l’emploi universitaire », confie-t-il.
Excellent dans son domaine, il a été récipiendaire de la fameuse bourse Joseph Armand Bombardier (105 000$ sur trois ans) en plus d’avoir décroché plusieurs contrats de recherche. À la fin de son doctorat, il a obtenu un poste de professeur adjoint dans son domaine d’expertise.
Combien gagne un professeur d’université?
Le salaire d’un professeur d’université dépend d’abord de son statut (assistant, adjoint, agrégé ou titulaire). Les chiffres varient selon les établissements et les domaines, mais si on prend exemple sur les salaires des professeurs en sciences humaines de l’Université Laval, on voit qu’un professeur assistant commence sa carrière à 63 753$ par année et pourra gagner jusqu’à 85 050$. Un professeur titulaire quant à lui, débute à 112 159 et pourra gagner jusqu’à 144 461 annuellement.
Gagner sa vie comme universitaire
En conclusion, si les études vous passionnent, il est très possible de gagner sa vie en tant qu’universitaire même avant de devenir professeur. Il faut seulement avoir le réflexe de s’informer des avenues possibles auprès des instances de vos programmes. Que votre parcours académique soit exemplaire ou non, il est toujours possible de changer de voix et d’en apprendre sur l’univers d’une nouvelle discipline. Chaque domaine a ses bourses, ses fonctionnements et ses possibilités. Une fois que l’on connaît le système, on peut y naviguer et s’y tailler une place.