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Combien ça gagne un.e serveur.euse dans un resto chic?
Je dois l’avouer, le métier de serveur a toujours été mystérieux pour moi. Ben, je comprends quelles sont leurs tâches, je ne suis pas niaiseux.
C’est un métier dont la rémunération semble complètement aléatoire.
Mais c’est un métier dont la rémunération semble complètement aléatoire. Mes amies de filles qui se trouvaient des jobs de serveuses au secondaire et au Cégep semblaient rouler sur l’or, même en ne travaillant que quelques soirs par semaine. En même temps, on connaît tous une dame qui s’est accroché les pieds dans une job de serveuse un peu trop longtemps et qui semble avoir de la misère à joindre les deux bouts.
Je me suis dit que c’est peut-être une question de restaurants; j’imagine que c’est plus payant être serveuse dans un resto 5 étoiles que dans une pataterie, non?
Pour résoudre ce mystère, j’ai interrogé Myriam Prud’homme, serveuse qui cumule une vingtaine d’années d’expérience dans le domaine.
Comme le dirait une bonne publication Facebook un peu clickbait, les résultats vont vous surprendre.
Tout est une question de pourboire
Ceux et celles qui ont déjà travaillé comme serveur.euse le savent, le principal revenu dans ce métier, c’est le pourboire des clients.
Il faut d’abord savoir que le salaire minimum pour les employés qui reçoivent un pourboire est plus bas que pour le reste des salariés (10,05$ de l’heure au lieu de 12,50$).
C’est donc le pourboire qui permet de compléter ce salaire (très) minimum et de réussir à tirer un bon revenu.
Mais ce fameux pourboire, il est convoité. Myriam Prud’homme, qui a été serveuse dans un restaurant très huppé de Montréal, raconte que dans son expérience, ces restaurants divisent souvent les pourboires entre les employés : le busboy, le plongeur, l’hôte, le barman…
Comme l’explique Myriam, ça peut être démotivant lorsque le pourboire est réparti entre les employés; même si tu offres un excellent service, si ta collègue s’est levée du mauvais pied ce matin-là et qu’elle offre un service pourri, ton revenu en sera affecté.
D’ailleurs, cette division du pourboire n’est pas nécessairement légale. Les normes québécoises établissent que le partage du pourboire doit être fait entre les employés qui offrent du service uniquement, et que ça doit être fait avec le plein accord du serveur.
« Oublie ça les normes du travail en restauration. Oublie ça, elles ne sont vraiment pas respectées! »
Mais comme le dit Myriam : « Oublie ça les normes du travail en restauration. Oublie ça, elles ne sont vraiment pas respectées! »
Le volume avant tout
Bref, le nerf de la guerre, c’est le pourboire.
Contrairement à ce que j’aurais pu croire, les restos chics ne sont pas les plus payants.
Est-ce que les clients aisés sont moins généreux? « Ils ne sont pas moins généreux, non. Y en a toujours qui compensent pour ceux qui le sont un peu moins. Dans tous les restaurants où j’ai travaillé, tu fais toujours un peu plus que 15% », raconte Myriam Prud’homme.
Le pourcentage de pourboire est semblable, donc, qu’on mange chez Normand Laprise ou au Normandin. La différence est au niveau du volume : « Tu peux aller dans un endroit où ils vendent leurs old-fashioned 40$, et finalement les serveurs ne font pas tant d’argent que ça, parce qu’il n’y a pas de roulement de tables ».
Dans un resto chic, le service est plus long. Ainsi, une table risque de ne pas servir plus de deux fois dans la même soirée. En revanche, dans un resto plus grand public, par exemple un St-Hubert, il est tout à fait envisageable que la même table se remplisse trois, quatre, voire cinq fois.
Et c’est plus payant de se faire 15% sur quatre factures à 50$ que sur une seule à 100$.
Quand Myriam travaillait dans un resto chic, elle faisait entre 150$ et 300$ de pourboire pour un soir de week-end. Aujourd’hui, elle travaille dans un restaurant qui sert des hamburgers et des pizzas à l’aéroport… et c’est beaucoup plus payant : « On passe tellement plus de monde. Juste moi, je peux servir 130 personnes. C’est facile de faire 400$ le soir! »
Plus on est de fous, moins on s’enrichit
Myriam me fait également part d’une autre différence entre les restos plus guindés et les restos grand public : l’organisation du travail. « Dans les grands restaurants, ils s’assurent qu’il y ait beaucoup d’employés parce qu’ils veulent offrir le meilleur des services. Alors, ils mettent plein de monde à l’horaire, et quand c’est un soir plus tranquille, ils coupent, alors tu retournes chez toi sans avoir travaillé. »
Comme elle l’explique, c’est difficile de trouver de la stabilité quand tu peux retourner chez toi les poches vides, parce qu’on t’as renvoyé chez vous faute de clients.
Bien sûr, les normes du travail interdisent ce genre de pratique. Mais rappelons-nous des sages paroles de Myriam citée plus haut dans le texte.
Bref, si vous voulez faire du cash rapidement, il vaut peut-être mieux éviter les restaurants avec de la coutellerie en argent.
Et si vous êtes déjà serveur et que vous sentez que vous ne recevez pas votre dû, n’hésitez pas à contacter la Commission des normes du travail; vous avez des droits, vous aussi.
*Ce texte a été modifié le 12 novembre 2019 pour retirer une citation qui aurait pu être mal interprétée.